Les Stolpersteine sont, littéralement des pierres de trébuchement. A Kehl-am-Rhein, sur la rive droite du Rhin, en face de Strasbourg, les deux cités étant maintenant reliées directement par le tram, il y a 63 de ces petits cubes de laiton collés sur du béton, entre les pavés. Ces pierres de mémoire portent les noms et dates de naissance et de décès de juifs allemands qui vivaient là avant la guerre hitlérienne. Ces stèles sont placées juste devant le domicile de ces familles occupés avant la Kristallnacht, Nuit de cristal, un nom beaucoup trop joli pour un pogrome qui s’est déroulé dans toute l’Allemagne le 9 le novembre 1938. Des juifs ont été tués ou blessés, leurs magasins ont eu les vitrines brisées et les appartements ont été  pillés. Par la suite les nazis ont déporté les juifs, souvent en France, à Gurs, par exemple, puis ils ont été amenés à Drancy avant d’être convoyés dans les camps de la mort en Allemagne, en Pologne ou en Autriche où ils ont été exterminés de suite, sauf ceux qui pouvaient travailler comme esclaves.

Jusqu’à présent, seuls les Allemands s’occupaient chaque mois de novembre de ces pierres, en les nettoyant et polissant pour qu’elles restent visibles aux passants et poussent à la réflexion.

L’an dernier déjà quelques Strasbourgeois, dont Georges Yoram Federmann, ont participé.

Cette année, ce sont plusieurs dizaines de Strasbourgeois, juifs ou pas, dont le rabbin du Bas-Rhin, qui se sont joints en prenant le tram jusqu’à Bahnhofstrasse.

De là, deux groupes ont pris la direction de quelques unes de ces pierres de mémoire qui ont été nettoyées pour qu’elles soient visibles à nouveau.

Un historien allemand parlant parfaitement français donnait le récit de ces familles, la plupart jamais revenues des camps, mais avec quelques survivants cependant.

Puis on a repris le tram jusqu’à la station Ancienne Synagogue-Les Halles où un plus grand nombre de personnes ont participé à une commémoration près de l’Allée des Justes et de l’emplacement de la synagogue incendiée par les nazis.

Plusieurs discours ont été tenus, avec Roland Ries, maire de Strasbourg, M. Roos du Consistoire, le rabbin Weill et tout s’est achevé avec une prière rappelant les camps d’extermination, suivie du Kaddish, par l’aumônier militaire juif de l’armée.

En mai 2019, des Stolpersteine seront insérés dans les rue de Strasbourg, une première en France.

Des Stolpersteine à Strasbourg en 2019

Une vingtaine de strasbourgeois, victimes de la Shoah, nommément tirées de l’oubli.
Pierres d’achoppement, pierres de mémoire, littéralement « pierres sur lesquelles on peut trébucher »*, les Stolpersteine sont faites de béton recouvert d’une plaque de laiton. Elles commencent toujours par la même formule « Hier wohnte… », c’est à dire « Ici habitait… ». Suivent le nom d’une personne, déportée et/ou assassinée pendant la période nazie, associé au lieu où elle s’est réfugiée avec la date et le lieu de sa mort.

De l’autre côté du Rhin, à Kehl, on en trouve plus de 60 disséminés partout en ville. À l’initiative de l’artiste berlinois Gunter Demnig, les « Stolpersteine » ont été scellées dans de nombreuses villes d’Allemagne, à la mémoire des victimes du nazisme. On en compterait près de 61 000 (dans 21 pays d’ Europe).Chaque pavé ravive chez les passants le souvenir d’un déporté. Installé généralement devant son dernier domicile connu.

Le but, au travers de ces pavés de la mémoire, est aussi de proposer un appareil critique, un outil pédagogique pour comprendre les mécanismes de la stigmatisation des groupes minoritaires par le nazisme et lutter contre les stigmatisations existantes aujourd’hui.

Un groupe de travail a été mis sur pied à Strasbourg

Il réunit à l’initiative de Bertrand Goldman, astronome du Max Planck Institute de Heidelberg et de Georges Federmann, les historiens Frédérique Neau-Dufour (directrice du CERD), Thierry Roos, vice-président du CIBR ( Consitoire Israélite du B-R) et conseiller municipal d’opposition à Strasbourg, Eckhard Wirbelauer, professeur d’histoire à l’Université de Strasbourg et Richard Aboaf, plasticien et historien d’art. Fabienne Regard, historienne, professeure à l’Université Elie-Wiesel Paris, a fait un travail de recherche conséquent sur le sujet (archives de Yad Vashem, archives de la Ville de Strasbourg, annuaire des adresses de la Ville de Strasbourg, Memorbuch…). L’adjointe au maire de Strasbourg, Nicole Dreyer ainsi que les sociologues Nathalie Heller et Freddy Raphaël ont soutenu le groupe dès son origine
Le grand-rabbin de Strasbourg et du Bas-Rhin, René Gutman, de son côté, indiquait, de manière inattendue, avoir « toujours émis un avis négatif » sur les Stolpersteine. « Nous avons assez de ressources intellectuelles et spirituelles en France pour innover en matière de devoir de mémoire plutôt que d’imiter ce qui existe déjà. Je trouve le symbole du pavé sur lequel on marche, ou – au pire – bute, incongru. Il y a d’autres façons plus dignes de rappeler la mémoire des noms comme le mur du cimetière de Cronenbourg et le mur des noms qui verra le jour au Mémorial de l’Alsace-Moselle. » (DNA du 24 avril 2016). Il aura fallu attendre l’arrivée de son successeur, Harold Weill, le 10 septembre 2017, pour pouvoir emporter l’avis déterminant du Consitoire israélite du Bas-Rhin.

Les premiers pavés seront posés à Strasbourg le 1er mai 2019

Richard Aboaf a obtenu l’accord de Robert Hermann, président de l’Eurométropole pour présenter le projet aux maires des 33 communes qui la composent. Dans l’édition de l’Alsace du 25 mai 2018 on pouvait apprendre l’existence d’un projet de pose de 16 stolpersteine à Marckolsheim dans un article consacré à Christophe Woehrle. Ils seront posés quasi-simultanément. Pour l’instant, il s’agit d’honorer la mémoire de victimes juives du totalitarisme nazi. Au sein du groupe de travail, Bertrand Goldmann et moi-même préconisons de ne pas en rester à la “mémoire juive”

Ce travail, par son indépendance idéologique sert l’expression du contre pouvoir des usagers et donc traduit une part de l’expression de nos droits et de nos devoirs par « ce devoir de connaissance » qui dépasse « le devoir de mémoire » et qui nous met dans la position de transmettre les mécanismes, les ressorts du nazisme et de faire de nous qui n’avons pas connu directement cette période, des passeurs vers les générations futures au moment où tous les témoins directs de l’époque disparaissent.

Le futur c’est de pouvoir trouver des relais parmi les membres des nouvelles générations qui considèrent que ces combats ne sont pas trop anachroniques mais portent en eux une modernité qui peut leur servir dans l’accomplissement de leur devoir civique

Georges Yoram Federmann
(Strasbourg, 11 novembre 2018)

Voir aussi :
http://la-feuille-de-chou.fr/archives/101400

Stolpersteine


Le Dr Federmann et J.Cl. Meyer, Rédacteur en chef de La Feuille de Chou, à Kehl (RFA)

*En allemand, stolpern signifie trébucher. Et pour qui craindrait que la démarche de mémoire n’entraîne sa chute lors de sa promenade, nous rappellerons ce proverbe bien connu : Ein guter Stolperer fällt nicht, un bon « trébucheur » ne tombe pas. Cette initiative, déjà présente ailleurs en Europe, nous rappelle aussi que même lors de nos pas les plus anodins, nous foulons un sol que d’autres ont parcouru avant nous, et où ils ont pu perdre la liberté puis la vie dans les conditions tragiques que l’épitaphe nous rappelle. La mémoire lapidaire peut donc s’y entendre au propre et au figuré, et ne restera pas sans effet, du moins le souhaitons nous tous (NDLR).

Des vidéos complèteront ce reportage dans les jours qui viennent.

Biographies de familles juives de Kehl victimes de la barbarie nationale-socialiste

Etablies par Friedrich PETER que la Feuille de chou remercie vivement pour avoir accepté de communiquer le résultat de ses travaux.

Dr. med. Karl Rosenthal

Ici, dans la Hauptstraße 59, renommée Adolf Hitler Strasse après 1933, le Dr Karl Rosenthal. Il est né le 16 octobre 1893 à Fribourg en tant que descendant de deux familles juives allemandes établies de longue date.
À l’âge de 21 ans, lors de la Première Guerre mondiale sur le front occidental, il a reçu la “Croix de fer”, interrompu ses études. Il a pu terminer sa formation de médecin en 1923 avec le doctorat pour devenir Dr. med. med. finition.
Un an plus tard, il épouse sa fiancée Olga Kuhn et s’installe en 1926 avec sa petite famille à Kehl. En 1924, naissance de son fils Claus. Le Dr. Karl Rosenthal a travaillé comme médecin auxiliaire pour la ville de Kehl et les communautés rurales environnantes. Karl Rosenthal était un citoyen respecté de notre ville. Mais même avant la prise du pouvoir par le NSDAP, on pouvait percevoir les premiers signes d’un désastre . En 1931, le conseil municipal de Kehl, dominé par les nazis,lui a retiré son contrat de médecin scolaire. Le 1er avril 1933, jour du prétendu “boycott des juifs”, de l’AS et de la police, les patients ont été interdits d’accès. Le Dr. Karl Rosenthal a été placé en “garde à vue” pendant 3 jours.
exclusion sociale ou professionnelle et déclin de la famille. Il n’a plus pu exercer jusqu’en 1936. En octobre 1938, il s’est vu retirer son diplôme de médecin. Ainsi, il était sans revenus. Il a décidé de quitter la ville avec son deuxième fils âgé de 12 ans, Gert de treize ans, sans son fils Claus. Le reste de la famille a déménagé chez des parents à Mannheim dans l’espoir de trouver un emploi à l’hôpital juif local.
Le 22 octobre 1940, Olga et Karl Rosenthal sont déportés à Gurs. Un an plus tard, ils sont déportés au camp de Rivesaltes à Perpignan. Claus a pu y entrer avec de faux papiers pour revoir ses parents. Mais il a fini par être piégé .
En 1942, le Dr Karl Rosenthal avec son épouse Olga et son fils Claus ont été déportés via Drancy près de Paris dans les camps d’extermination de l’Est. La famille a été séparée, Olga Rosenthal a été assassinée à Auschwitz immédiatement. Karl Rosenthal a dû travailler dans divers camps de concentration en tant que “médecin de camp”. Dans le camp de concentration de Gräditz, en Haute-Silésie, le père et le fils Claus se sont rencontrés par hasard. Le 26 février 1944, ils fêtèrent tranquillement le 20e anniversaire de Claus, et exactement un mois plus tard, le 26 mars 1944, le Dr Karl Rosenthal succombe de fièvre typhoïde dans les bras de son fils.

Familie Julius Wertheimer – Fritz Wertheimer

Julius Wertheimer est né le 2 juillet 1886 à Bodersweier et a vécu à Kehl à partir de 1895. Il y dirigea au moins de 1923 à 1927 une entreprise de négoce de bétail, après quoi il travailla, comme son épouse Elise (née le 24.3.1890) le déclara plus tard, “dans le domaine des farines et des céréales”. À partir de 1933, il a un commerce de sacs dans la Kinzigstr.21. En mai 1938, il a été privé de son permis de travail.

Complètement appauvri et n’ayant pas les moyens d’acheter le quatre pièces de la Rheinstrasse 41, ils s’installèrent (probablement à l’automne 1938 avec Bertha Bensinger de Bodersweier, qui les avait accueillis depuis le 29 décembre 1936). Ils vivaient là-bas avec Lazarus Mannheimer, qui enseignait à l’école de Falkenhausen en tant que professeur principal jusqu’en 1933, et son épouse Regine. Regine Mannheimer et Elise Wertheimer étaient soeurs et toutes deux de Bodersweier.

Elise Bensinger et Julius Wertheimer se sont mariés le 24 août 1920 à Bodersweier. C’était un double mariage, car le même jour, se sont mariés, le frère d’Elise, Simon Bensinger, commerçant de vélo, né le 22.9.1894 à Bodersweier et Sophie Wertheimer, la soeur de Julius, née le 5.8.1893 à Kehl. Les deux ont été assassinés en 1943.
 
Le couple avait deux fils, Kurt (né le 21 juillet 1921) et Fritz (né le 18 août 1928).
Julius Wertheimer a combattu durant la Première Guerre mondiale, il a été blessé deux fois et possédait à la fois la médaille d’argent badoise du mérite et la Croix de fer. Les deux n’allaient pas le protéger pendant la période nazie contre les abus et les mauvais traitements. Cet médaille a été remise par son fils Fritz Wertheimer au maire en 2001 à l’occasion de sa visite à Kehl. Ce sont des documents très spéciaux de l’histoire de la ville, qui sont conservés dans les archives municipales aujourd’hui.
À Dachau en 1938, Julius Wertheimer a dû rester debout pendant des jours dans la neige par des températures glaciales; si bien qu’il a eu un problème rénal toute sa vie.

Les autorités responsables ont prétendu que l’urémie jamais guérie n’était pas une conséquence de l’emprisonnement dans un camp de concentration, mais “liée à l’âge”, raison pour laquelle la pension de dommages corporels demandée a été rejetée. Le 17 juin 1953, il est mort de cette urémie.
Julius Wertheimer ne reçut aucune indemnité, car il n’était resté “que” 26 jours à Dachau (du 11.11 au 7.12.1938). Par conséquent, la peine d’au moins un mois d’emprisonnement ne correspondait pas aux critères de l’autorité de Fribourg.

Tous les quatre ont quitté Kehl le 15 mars 1939 pour Hambourg, où ils ont pu embarquer le 18 mars 1939 sur le paquebot “Madrid” à destination de Buenos Aires. La traversée coûtait 370 Reichsmark par personne, on leur attribua la cabine à 4 lits n ° 552.

En Argentine, ils reçurent une parcelle de terre du gouvernement à Entre Rios pour la remettre en état; mais elle était complètement stérile. En 1949, la famille abandonna après neuf années difficiles et s’installa à Buenos Aires. Kurt et Fritz Wertheimer soutiennent alors leurs parents.
Elise Wertheimer est décédée le 17 mai 1975 à Buenos Aires.

Famille Jakob und Klara Wertheimer

Klara Wertheimer est née le 11 février 1894 à Breisach, fille de Samuel et Hélène Geismar. Elle a épousé le marchand de bétail Jakob Wertheimer de Kehl, qui vivait ici depuis sa naissance. Ses parents étaient Nanette et Abraham Wertheimer de Bodersweier. Jakob Wertheimer avait participé à la Première Guerre mondiale.
Le couple s’est installé à Kehl. Ici, le 2 juillet 1921, naquit sa fille Margot, fille unique de Wertheimer.
Margot est allée à l’école à Kehl et voulait devenir assistante de laboratoire. Pour des raisons racistes l’accès à cette formation lui a été refusé. Elle a donc fréquenté, à partir d’avril 1936 jusqu’à l’été 1938, l’école de commerce à Kehl. En 1939, elle s’installe à Ludwigsburg. Là, elle fut arrêtée le 28 novembre 1941 et déportée en Lettonie. Ce n’était que le début d’un calvaire de 37 mois d’emprisonnement: la prison de Ludwigsburg et le camp de transit du Killesberg à Stuttgart dans le camp de concentration Jungfernhof, le ghetto de Riga, le camp de concentration du Stutthof près de Gdansk et enfin la prison de Krone sur la Brahe en Pologne
Après sa libération le 26 janvier 1945, Margot Wertheimer se rendit via Berlin à Stuttgart, où elle s’installa d’abord. Le 28 avril 1946, elle a émigré aux États-Unis, où elle vit toujours jusqu’à sa mort en 2017.
Margot Wertheimer-Stern accepte la pose de pierres à la mémoire de ses parents et de leur destin. Pour elle-même, cependant, elle ne voulait pas de pierre d’achoppement.

Après le départ de sa fille Margot à Ludwigsburg en 1939, les parents restèrent à Kehl. L’émigration était évidemment hors de question pour eux ; il était possible qu’ils se sentent davantage protégés grâce à la participation de Jacob à la Première Guerre mondiale.
Peu de temps après le début de la dictature brune, Jakob Wertheimer dut subir le déclin de son entreprise ce qui, en juin 1934, entraîna la vente aux enchères obligatoire de sa maison et de sa propriété dans la Rheinstrasse 26. La famille a ensuite vécu dans la Kinzigstraße 1 à 1939 à louer.

Jakob Wertheimer faisait partie des nombreux hommes juifs qui ont été gravement maltraités à Kehl le matin du 10 novembre 1938, lors de la nuit du Pogrom du Reich, puis envoyés au camp de concentration de Dachau. Il a été tatoué à son arrivée avec le matricule 22375. Ce n’est que le 22 décembre 1938 qu’il a été autorisé à retourner voir sa femme dans la Kinzigstraße 1. De là, le couple Wertheim aura été évacué au début de la guerre avec toute la population de Kehl – on ne peut être savoir où. Il est certain que son ancienne maison a été déclarée “maison aryenne” en 1939/40; il lui est interdit d’y d’entrer. Ils ont finalement trouvé refuge au 27 de la Schulstraße . C’est là que vivait la soeur de Jacob. On ne sait de quoi ils survivaient.

Le 22 octobre 1940, le couple est déporté avec Elsa Bodenheimer et les autres Juifs vivant encore à Kehl à Gurs dans le sud de la France non-occupée, où ils sont entassés dans un campement dans des conditions indescriptibles. Quelque temps plus tard, Jakob et Klara Wertheimer ont été transférés au camp de Noé, situé à quelques kilomètres de là, où les conditions n’étaient guère meilleures.
Finalement, en août 1942, ils ont été transportés à Drancy, où ils ont dû embarquer dans un train pour Auschwitz le 28 août 1942 – il s’agissait, selon Serge Klarsfeld, du “Transport n° 25”.

Tous deux ont probablement été assassinés sur place immédiatement après leur arrivée à Auschwitz.

Note des correcteurs

A la demande de l’auteur de ces biographies, la traduction française a été revue jusqu’à ce point.
Les biographies suivantes seront corrigées par la suite.

Famille Lazarus et Regina Mannheimer

Lazarus Mannheimer est né le 19 février 1886 à Eberbach/Neckar. De 1907 à 1912, il travailla comme enseignant à Bodersweier.
Regina Bensinger est née le 16 janvier 1889 à Bodersweier. Son père, Karl Bensinger, possédait à Bodersweier un magasin spécialisé dans la quincaillerie, il était depuis longtemps le chef de la synagogue.
Le 29 juillet 1912, Regina et Lazarus se marient à Bodersweier.
La même année, Lazarus Mannheimer commença son activité à Kehl. Il a été enseignant , d’abord à la Wilhelm Schule, puis à la Falkenhausen Schule. En outre, il était membre du conseil d’administration de la communauté israélite de Kehl, il a dirigé l’Association centrale juive de Kehl. En outre, il est devenu membre du Comité civil en 1925 et, en 1930, il a rejoint partie politique konservateut allemand, mais démocrate.
Le couple Mannheimer vivait dans différents appartements dans l’environnement de l’école de Falkenhausen, dont la dernière (documentée en 1931) se trouvait dans la résidence officielle municipale Nibelungenstraße 10. Tous les deux étaient des citoyens très respectés et estimés. Le mariage est resté sans enfant.
Avec la prise du pouvoir par les nazis en 1933, les mauvais moments du couple Mannheimer ont commencé.
Du 1er au 8 avril 1933, Lazarus passa quelque temps en “détention préventive”. Ensuite, il a perdu son poste d’enseignant, puis, selon le “paragraphe aryen”, l’affiliation en tant que représentant municipal au sein du comité des citoyens.
Vraisemblablement, les Mannheimers ont dû quitter leur résidence officielle. En 1934 au plus tard, ils emménagent dans la maison Kinzigstraße 20. Elle appartenait à la communauté juive de Kehl.
Dans la nuit de cristal le 10 novembre 1938, deux SS et un policier sont entrés dans leur maison, ils ont fouillé et confisqué diverses choses, lils ont détruit de nombreux objets et ont finalement arrêté tous les membres masculins de la famille âgés de 16 à 60 ans. Ils ont été conduits à la maison de la Gestapo, indiciblement maltraités et humiliés, puis conduits dans les rues jusqu’à la mairie. Là-bas, ils ont continué à être brutalement maltraités.
Après cela, tous les Juifs arrêtés ont été conduits à la gare et transféré au camp de concentration de Dachau, où les Juifs de Kehl ont pu être reconnus par le fait qu’ils avaient été sévèrement battus. Après quelques semaines, ils ont été libérés
Parmi les victimes, Lazarus Mannheimer et son frère cadet Theodor.
Lazarus et Regina Mannheimer ont probablement déménagé à Karlsruhe au cours de la seconde moitié de 1939. À partir du 1er décembre 1939, le mari a trouvé un emploi dans cette école juive.
Le 22 octobre 1940, le couple, comme la plupart des juifs de Baden, est déporté dans le camp de Gurs, dans la partie alors inoccupée de la France. Les listes de numéros 1784 et 1785 sont connues.
Le 7 août 1942, Lazarus et Regina Mannheimer sont déportés par le transport n °29 via Drancy à Auschwitz. Ils ont vraisemblablement été assassinés le 9 août, juste après leur arrivée. Le jour officiel de la mort est le 8 mai 1945, la fin de la guerre

Famille Schwarzkachel

Trois membres de la famille Schwarzkachel, composée de huit personnes, ont également été touchés par la campagne d’expulsion vers la Pologne: les parents Laja et Pinkas, ainsi que le plus jeune fils nommé Adolf, qui, à juste titre, ne s’est laissé adresser que par Arnold. Ils ont été déportés le 28 octobre 1938 en Pologne via Offenburg.
Le trajet a dû être une torture, à Beuthen, ville de la frontière allemande dans la Haute-Silésie le train est arrivé le 10 novembre. Le trajet a duré deux longues semaines.

Pinkas, Laja et Arnold Schwarzkachel ont finalement atterri à Breszko, près de Cracovie, lieu de naissance de Pinkas Schwarzkachel.
Les enfants restants étaient déjà âgés de 30 ans et plus au moment de l’expulsion et avaient quitté la maison de leurs parents depuis longtemps. Willy a vécu depuis 1936 à Strasbourg. Regina avait déménagé à Ludwigshafen en 1937 et s’était ensuite enfuie en Hollande avec son mari Isaac Bergmann.
Ces cinq personnes n’ont pas survécu à l’ère nazie et ont été victimes de l’Holocauste. Arnold a probablement été tué en Pologne. Willy s’est enfui à Strasbourg le 7 juin 1938, puis à Paris, où il a été arrêté le 20 août 1941 et interné à Drancy. Le 27 mars 1942, les Allemands le déportèrent à Auschwitz, où il mourut le 5 avril 1942. Regina Bergmann et son mari ont été déportés à Auschwitz le 24 novembre 1943 via Westerbork, où ils ont probablement été assassinés immédiatement après leur arrivée.
Les trois autres frères et sœurs Freyda, Joshua et Max ont pu survivre: Freyda a dû se cacher avec les siens en France, Joshua et Max ont réussi à s’échapper en Palestine.

Famille Sophie et Paul Wertheimer

Paul et Sophie Wertheimer se sont mariés le 4 septembre 1930. Ils ont eu deux filles: Doris est née le 25 août 1932 et Evelyne le 9 décembre 1937. Paul Wertheimer était partenaire de la société Weil & Wertheimer, importateur, exportateur et recycleur de matières premières, qu’il dirigeait avec son beau-père, Simon Weil. Il se retira le 30 avril 1938 de l’entreprise, qui fut liquidée le 31.12.1938.
Le 13 septembre 1938, il s’est enfui avec sa femme et ses deux filles à Strasbourg. Au début de la Seconde Guerre mondiale, il est interné en tant qu ‘”étranger ennemi” . Jusqu’à la fin du mois de janvier 1940, il était dans des conditions similaires à celles de la détention et de la surveillance policière dans les camps de Raon, L’Etape et Mirecourt. Peu de temps après, il a dû être interné à nouveau, car on sait que son épouse, Sophie, a dû passer son temps entre avril et juin 1940 dans le camp de Neufchateau dans les Vosges. On ignore si la famille s’est séparée pour augmenter les chances de survie. Après que les Allemands avaient occupé la France, les Wertheimer ont été cherché par la Gestapo et ont dû se cacher. Sophie Wertheimer portait un nom de camouflage pendant la persécution et s’appelait Susanne Wittmer. Lorsque le danger d’être découvert est devenu trop grand, Paul Wertheimer décida de se confier à une organisation d’aide à l’évasion et de s’enfuir avec sa famille en Suisse après avoir versé une somme considérable.

Après leur arrivée en Suisse, le 13 septembre 1943, ils ont été placés tout de suite dans « les centres d’accueil » de Charmilles et de Belmont et, le 13 mars 1944, on les a transféré dans camps à Champéry. Sophie Wertheimer souffra d’une opération chirurgicale qu’elle a du subir en 1942 et on l’a déclarée inapte de vivre dans un camps le 30 septembre 1944. Ensuite, elle et son mari ont été envoyés à Heiden, où ils étaient sous surveillance policière. Elle mourra le 1.5.1945
Après la guerre, Paul Wertheimer et ses deux filles s’installèrent rue Louis Apfel à Strasbourg, d’où il rouvrit son magasin à Kehl en 1950 dans la Kasernenstraße 19. En mémoire de son beau-père et ancien partenaire assassiné, Simon Weil, il a appelé la société « Weil & Wertheimer »

Famille Weil, Schulstr. 3

Hedwig et Simon Weil se sont mariés en 1910 à Kehl. Ses deux filles, Ilse et Margot, sont nées en 1913 et 1922. Simon Weil avait déjà une fille Sophie de son premier mariage, née le 1 er avril 1904 et qui devait épouser Paul Wertheimer en 1930, qui fonda avec Simon Weil à Tullastrasse 3 la société Weil & Wertheimer, qui importait et exportait “Produits bruts”. Deux à trois employés et 25 à 30 travailleurs étaient employés dans cette entreprise. La famille habitait Schulstraße 3.

Après que les deux filles Ilse Stern et Margot Weil eurent déjà déménagé à Wuppertal au début de juin 1937 et au début de juillet 1938, leurs parents les suivirent au cours de l’évacuation de Kehl, en 1939. De là, sa fille Ilse a réussi à s’échapper via Marseille en Argentine. Margot Weil, cependant, a déménagé à Cologne, où elle a travaillé comme infirmière d’apprentissage à l’hôpital juif.
Ses parents Simon et Hedwig Weil sont déportés le 20 juillet 1942 avec 245 autres Juifs de Wuppertal-Elberfeld, d’abord à Düsseldorf et le lendemain avec un autre train à destination de Theresienstadt. Margot fut victime du même sort en septembre 1942, lorsqu’elle fut également déportée de Cologne à Theresienstadt et y retrouva ses parents.

Simon Weil, 72 ans, est décédé peu après dans les bras de sa fille, Margot, souffrant de malnutrition. Sa femme a été assassinée deux ans plus tard à Auschwitz. Sa fille Margot a également été déportée là-bas, elle n’a pas été envoyée directement au gaz, mais a dû travailler comme esclave de travail jusqu’à la fin du mois d’octobre 1944 et a ensuite été “poussée” dans le camp de concentration de Mauthausen. Le 5 mai 1945, il y avait la libération par les Américains. Margot Weil est d’abord revenue à Wuppertal et a émigré dans les années 50, comme de nombreuses années avant sa sœur en Argentine. Entre temps, elle avait épousé son ami d’enfance Claus Rosenthal, lui aussi né et élevé à Kehl.

Ruth Hilde est née le 5 novembre 1919, et trois ans plus tard, elle reçoit une petite soeur appelée Martha Nelly. Les deux filles ont grandi dans de bonnes et prospères conditions familiales à Hermann-Dietrich-Straße 10. Tous deux sont allés à l’école de Falkenhausen.
Ruth doit quitter l’école secondaire supérieure à Pâques 1934 et peut encore aller à l’école supérieure de commerce où elle est autorisée à passer la “maturité moyenne” en 1936. N’ayant pas suivi d’apprentissage à Kehl, la jeune fille de 17 ans s’est rendue à Strasbourg grâce à une “carte frontalière” ou elle a fréquenté une école de langues. Elle gagnait sa vie comme femme de chambre.
Heinrich Bodenheimer a vécu à Strasbourg à partir de 1937 après avoir été privé des bases économiques.
Lors d’une visite à Kehl en 1937, Ruth fut interrogée par la Gestapo et la carte de frontalière lui fut retirée. Néanmoins, elle a réussi à rentrer à Strasbourg avec son permis de séjour français.
Par la suite, elle ne revit plus jamais sa sœur car “Martl” fut déporté à Theresienstadt en 1942 puis assassiné le 29 janvier 1943 à l’âge de 21 ans à Auschwitz.
Au début de la Seconde Guerre mondiale, en septembre 1939, Ruth quitta Strasbourg pour se réfugier dans “l’intérieur” de la France. Elle fut internée pendant quatre mois à Gurs en tant qu ‘”étrangère hostile”, puis travailla comme femme de ménage à Versailles et arriva finalement à Saumur. où elle a trouvé refuge chez un ami.
Elle y rencontra une famille qui devait déterminer sa vie future et la sauver ainsi d’une mort certaine.

Dans les environs de Saumur vivait dans une grande ferme, la famille Rothschild, d’origine Suisse, avec d’autres membres de la famille. Le 12 mars 1920, John Jacob Rothschild est né. Le père de John avait acheté et cultivé cette ferme sur la Loire peu de temps avant sa mort, car les gens s’inquiétaient pour les parents juifs vivant en Allemagne.
Mme Rothschild a proposé à Ruth de rester, car ils pensaient tous être en sécurité et que des mains travaillant au moment de la récolte étaient également nécessaires. Ruth est restée.
Ruth âgé de 21 ans, a rencontré John, ils sont tombés amoureux et, au bout de trois semaines, le jeune homme a annoncé à sa mère qu’il souhaitait épouser Ruth. La mère n’était pas très enthousiaste et lui a conseillé d’achever le service militaire en Suisse avant le mariage. À la fin de 1939, John rentra en Suisse.
Ruth a également quitté Saumur pour travailler chez un membre de sa famille à Versailles au foyer et comme baby-sitter. Les deux fiancées ont écrit des lettres et John leur a même rendu visite à quelques reprises – malgré la situation menaçante.

Le père Heinrich Bodenheimer avait été envoyé dans plusieurs camps d’internement en France, le plus récemment à Gurs / Pyrénées. Il y rencontra après trois ans son épouse, qui se trouvait maintenant sous le régime déporté le 22 octobre 1940, à Baden et aux Juifs palatins.

 En mars 1942, les déportations de Juifs de France vers les camps d’extermination de l’Est ont commencé. En juillet 1942, la Gestapo fouilla la ferme de la mère de John à Saumur. Tous furent arrêtés et emmenés. Quatorze membres de la famille, dont la mère, les grands-parents, la soeur et le frère de John, ont disparu même s’ils étaient de nationalité suisse. Lorsque John le découvrit, il décida de faire venir Ruth immédiatement de France en Suisse.
En août 1942, Ruth est internée pour la deuxième fois, cette fois-ci à Nexon et à Rivesaltes, où tous les jours des transports sortaient le camps en destination Drancy et Auschwitz. Le jeune militaire suisse John Rothschild a reçu l’autorisation de ses supérieurs de se rendre en France.
L’incroyble : Il réussit à libérer Ruth du camp de Rivesaltes le 15 octobre 1942 avec l’aide d’ un amis français et les deux amourezx ont commencé une dangereuse échappée longue de 1000 km traversant Guéret et Lyon à travers la France occupée en direction de la Suisse. Le 13 novembre 1942, ils ont rencontré à Lyon des troupes d’occupation allemandes. Quelques jours plus tard, grâce à l’aide des contrebandiers ils ont pu arriver à Genève, ils ont réussi à rentrer illégalement en Suisse.
Dès leur mariage en 1943, John travailla comme ingénieur à Fribourg / CH. En 1944, sa fille Silvia naquit et émigra aux États-Unis en 1951, où elle reçut également le nom de Renée. En 1953, le fils Armand est né.
Renée Ruth Rothschild-Bodenheimer est devenue professeure de langues romanes à l’Université d’Oakland. Le 5 décembre 2017, Ruth et John ont célébré leur 75e anniversaire:

John Rothschild a écrit le: 20 février 2018: Renée, l’amour de ma vie, est décédée samedi le 27 janvier à la maison le 27 janvier: ”
Ce grand amour est plus fort que la mort.

Maintenant, ils sont réunis depuis le 15 mars 2018, date anniversaire de la mort de John Jacob. L’amour est plus fort que la mort.