Communiqué de presse du 27 décembre 2018

Quand M. Ries se prend les pieds dans les eaux troubles du racisme postcolonial.

Le problème de l’inhumation de Cheriff Chekatt prend un tour inattendu, mais somme toute logique, au regard de l’histoire coloniale de la France et des relents périodiques du racisme
postcolonial dans un contexte de montée de l’islamophobie et des nationalismes en Europe.

Que le maire de la ville de Strasbourg le veuille ou non, Cheriff Chekatt fait partie de notre communauté, urbaine ou nationale. Il est né et a grandi dans notre ville, dans notre système éducatif, très tôt il a été pris en charge par les services de protection de l’enfance du département puis des services pénitentiaires et de police avec qui il a passé la plus grande partie de ses dernières années. Ne pas lui accorder le droit de faire reposer sa dépouille à Strasbourg c’est refuser d’assumer d’accepter que nous faisons collectivement partie des 29 années de sa vie.

Nous ne cautionnons ni ce qu’il a fait ni comment il l’a fait. Nous ne tentons pas l’équation impossible de mettre en rapport ce moment sacré qu’est l’inhumation et celui de son geste macabre, qui l’a aussi emporté. Toutes les familles frappées sont endeuillées. Et ce n’est certainement pas au maire de juger et de hiérarchiser les peines et leurs réparations morales.

Malheureusement avec sa disparition s’éloigne aussi le moment de la justice qui ne pourra jamais faire son travail. Nous ne saurons pas de sitôt comment juger les terribles actes du 11 décembre : terrorisme, attentat, fusillade meurtrière, démence macabre, folie meurtrière …

La posture raciale postcoloniale de M. Ries s’inscrit dans une longue tradition républicaine de considérer les descendants des immigrés originaires d’anciennes colonies comme des étrangers à durée indéterminée, fussent-ils nés en France ou Français. Celle-ci a permis de nommer les populations colonisées d’Algérie successivement « Indigènes », « Étrangers », « Français-musulmans ». Aujourd’hui, souvent désignés fils d’immigrés, ils sont racialisés et la cible des politiques discriminatoires et du racisme d’État. M. Ries s’y inscrit donc médiocrement alors qu’on aurait apprécié une posture plus en accord avec l’humanisme rhénan dont il se veut le digne représentant.
Cette posture vise donc ceux qui restent et qui sont proches de lui comme sa famille, mais surtout la communauté à laquelle il est renvoyé: celle des enfants de celles et ceux qui sont venu-e-s travailler en France et qui aujourd’hui habitent majoritairement les quartiers populaires de nos villes de France.

Collectif antiraciste et antifasciste 67