lu dans le quotidien L’Alsace
Prostitution : les principes… et la réalité

le 01/08/2012 à 05:00
Alors que le nouveau gouvernement affiche son intention d’abolir la prostitution, champ de bataille traditionnel des féministes, Roland Pfefferkorn évoque « un sujet compliqué ». « La position majoritaire, parmi les féministes, est incontestablement celle que prône le gouvernement aujourd’hui, qui dit qu’il faut abolir la prostitution, qu’il s’agit d’une violence inacceptable, et qu’il faut donc pénaliser les clients, comme en Norvège ou en Suède.

D’autres féministes considèrent, à l’opposé, qu’il faut défendre les droits des prostituées. Personnellement, je ne suis pas convaincu de l’efficacité des mesures scandinaves. Des enquêtes sociologiques montrent que la prostitution de rue y a effectivement disparu pour l’essentiel, mais qu’elle s’est déplacée, par exemple sur l’Internet, et qu’elle s’exerce dans des conditions plus dangereuses. »

Tenir compte du monde réel
Le sociologue strasbourgeois rappelle également qu’il existe aussi une approche féministe radicale, « qui considère que la prostitution relève d’un contrat comme un autre, entre deux contractants égaux », position défendue notamment par Élisabeth Badinter et Marcela Iacub. « Mais les deux positions de principe – vouloir abolir la prostitution par la pénalisation ou défendre la prostitution en tant que profession libérale – ne tiennent pas compte du monde réel, où il y a domination et exploitation, où la plupart du temps, il y a des considérations économiques, psychologiques, voire liées à la toxicomanie, qui conduisent les femmes à la prostitution.

Les travaux sociologiques sur la question sont toujours plus nuancés. Ils montrent notamment qu’il n’y a pas qu’une sorte de prostitution et qu’il y a aussi des prostitués hommes, des clientes femmes… Et quand vous parlez du sujet avec des sociologues indiennes, la question de l’abolition leur apparaît totalement abstraite : car le monde réel est un monde extrêmement inégalitaire et les problèmes économiques des unes peuvent les conduire à devenir des travailleuses du sexe, simplement pour survivre et élever leurs enfants. »

le 01/08/2012 à 05:00

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