LES LIBERTES D’EXPRESSION ET CREATION SONT-ELLES MENACEES EN FRANCE ?

Depuis quelques années, des manifestations d’intolérance parfois violentes ont été organisées en France contre des publications satiriques ou des œuvres artistiques relatives à une religion monothéiste. Des œuvres picturales ont été endommagées, des pièces de théâtre ont du faire l’objet d’une protection policière, les locaux d’un journal satirique ont été incendiés.
Les auteurs de ces violences appartiennent à des groupes qui prétendent agir en vertu de principe religieux sacrés. Tel est le cas récemment du groupe catholique intégriste “Avenir de la culture”.

Le Président du CFCM en avait eu la tentation, mais les responsables” d’Avenir de la culture” l’ont fait : ils ont déposé plainte contre X auprès du Procureur de la République de Strasbourg pour “blasphème et tentative de blasphème” au sujet de la représentation de la pièce de Romeo Castellucci “Sur le concept du visage du fils de Dieu”.

Les dogmes et rites des diverses religions établies en France seraient-ils devenus tabous dans la République laïque française ? D’autre part, Il s’agit du regard d’un auteur, nul n’est tenu d’assister à la pièce ou d’adhérer aux idées qui y sont exprimées.

Si la loi de 1905 assure la liberté de conscience et la liberté religieuse(celle-ci n’existait pas, sous le régime du Concordat, avant 1905), elle établit clairement une séparation entre le domaine cultuel et le domaine civil et sociétal. Les dogmes et rites propres à chaque culte ne sont sacrés que pour ceux qui y adhèrent.
Ils peuvent faire l’objet de critiques, de représentations artistiques ou caricaturales (les cultes monothéistes n’ont pas manqué de se critiquer vertement avant de se résoudre à une cohabitation plus harmonieuse).

Non contents de tenter d’interdire par la force, à Paris, cette pièce de théâtre, les responsables de ce groupuscule catholique intégriste se sont tournés vers l’Alsace pour déposer plainte pour blasphème en s’appuyant sur un article archaïque du code pénal local (art 166) encore en vigueur en Alsace et en Moselle. En France, une plainte pour cause de blasphème n’est possible qu’en Alsace et en Moselle.
Peut-on imaginer que l’Alsace ou la Moselle deviennent le déversoir juridique des groupes religieux intégristes pour déposer plainte pour blasphème ?

Il est temps que les pouvoirs publics mettent fin à cet archaïsme juridique qui contrevient à la liberté de conscience, à la liberté d’expression et la liberté de création artistique. Il suffit d’abroger l’article 166 du code pénal local et de moderniser l’article 167 (sur le trouble à l’exercice du culte) en le remplaçant par l’article correspondant de la loi de “Séparations des Eglises et de l’Etat”, conforme aux principes républicains(art.32).
Changer ces deux articles, c’est faire progresser le Droit local tout en respectant pleinement les éléments progressistes et emblématiques( nombreux aspects du droit du travail, sécurité sociale etc…).
Pour chaque élément du droit local, les diverses législations sont indépendantes les unes des autres, moderniser un aspect n’a aucune influence sur les autres éléments. Les juristes de l’Institut du Droit local de Strasbourg reconnaissent aussi la nécessité de moderniser ce Droit local pour le rendre conforme au Droit européen.
La modification de ces deux articles du code pénal local offre une belle occasion de réaliser cette modernisation. Aux Alsaciens, aux Mosellans et à tous les citoyens français soucieux de démocratie d’appuyer cette démarche.

Signataires :
Laïcité d’Accord, LDH section de Mulhouse et de Moselle, FSU du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de Moselle, FCPE du Bas-Rhin, UNSA-Education-Alsace, Union Régionale UNSA-Alsace , Ligue de l’enseignement de Moselle et du Bas-Rhin, Cercle Jean Macé Moselle et Roland Rouzeau ancien responsable Fsu, Pol Berger ancien responsable Snes.

Correspondant

Bernard Anclin président de « Laïcité d’Accord »
bernard.anclin@wanadoo.fr ou laicite.daccord@la poste.net