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12.000 euros d’amende contre un prêtre hébergeant des sans-abri

Créé le 11/06/2014 à 15h18 — Mis à jour le 11/06/2014 à 15h50

20 Minutes
JUSTICE – Une amende record a été requise mercredi contre un prêtre de Saint-Etienne à la retraite parce qu’il hébergeait des sans-logis dans un local paroissial…

Gérard Riffard, prêtre de 70 ans, est accusé d’avoir mis à la disposition de personnes en attente d’un hébergement un local paroissial de l’Eglise Sainte-Claire, dans un quartier classé en zone de sécurité prioritaire. A la retraite, il préside depuis quatre ans une association d’accueil et d’accompagnement des sans-logis, baptisée Anticyclone, «par référence aux hautes pressions qui chassent les nuages et font rentrer le soleil, même quand il fait froid», a-t-il déclaré à l’audience.

239 amendes de 50 euros

«Au départ, il y a environ sept ans, j’ai commencé à héberger des personnes sans toit dans mon appartement», a-t-il expliqué, ajoutant que depuis le nombre était monté à une quarantaine de sans-abri, dont de nombreux Africains originaires de la RDC, qui dormaient dans la salle paroissiale attenante à l’église.

Le représentant du parquet, André Merle, a requis une condamnation correspondant à 239 fois une amende 50 euros, pour avoir enfreint un arrêté municipal de février 2013 ordonnant l’arrêt de l’hébergement dans ce bâtiment.

Le manque de sécurité mis en cause

La mairie avait interdit le logement de migrants dans le local paroissial au motif que l’endroit ne respectait pas toutes les normes de sécurité pour l’accueil du public.

L’ecclésiastique a fait valoir que «l’Etat est tenu par la loi d’héberger les demandeurs d’asile, ce qu’il ne fait pas complètement», soulignant le conflit entre ce qu’on lui reproche et «l’obligation à ne pas laisser les gens dehors, en situation de danger». «On fait ce qu’on peut avec les moyens qui sont les nôtres, mais on ne tient pas à répondre à toutes les normes de l’hébergement car nous ne sommes pas une structure de cette nature», a-t-il expliqué.

Un «appel d’air pour l’immigration clandestine»

Le prêtre, qui a reçu le soutien de l’évêque de Saint-Etienne Mgr Dominique Lebrun, réfute l’argument suggéré par le président du tribunal d’instance Henry Helfre, selon lequel l’ouverture des portes de cette église et de ses installations sommaires provoquerait «un appel d’air en faveur du puits sans fond qu’est l’immigration clandestine».

L’avocate du prêtre invoque «l’état de nécessité et la protection contre un danger imminent, face à la non-application du droit fondamental que constitue l’hébergement d’urgence», et demande la relaxe de son client. Le tribunal de police de Saint-Etienne a mis son jugement en délibéré au 10 septembre.

A.B. avec AFP

Paul Ricoeur
http://2010anneedesmigrations.protestants.org/index.php?id=32554&tx_ttnews[tt_news]=606&tx_ttnews[year]=2010&tx_ttnews[month]=04&cHash=d8f500e0d5

L’argument de Kant mérite d’être cité en entier : « Il est ici question non pas de philanthropie, mais du droit. Hospitalité (Wirthbarkeit) signifie donc ici le droit qu’a l’étranger, à son arrivée dans le territoire d’autrui, de ne pas y être traité en ennemi ». Il s’agit « d’un droit de visite, le droit qu’a tout homme de se proposer comme membre de la société, en vertu du droit de commune possession de la surface de la terre sur laquelle, en tant que sphérique, ils ne peuvent se disperser à l’infini ; il faut qu’ils se supportent les uns à côté des autres, personne n’ayant originairement le droit de se trouver à un endroit de la terre plutôt qu’à un autre ».

Kant résume l’énoncé de ce droit dans le concept « de l’hospitalité universelle »(4).

(4) On notera l’argument quasi copernicien ou neutonien tiré de la rotondité de la terre et de la finitude qui en résulte ; on notera surtout le corollaire de ce droit de visite, celui de « se proposer comme membre de la société ». Fichte devait développer ce thème dans Du Droit des Gens et du Droit Cosmopolite, deuxième annexe au Droit Naturel, § 22 : « l’arrivant étranger dispose du droit humain originaire, qui précède tous les contrats juridiques et seul les rend possibles : le droit de présupposer pour tous les hommes qu’ils peuvent entrer avec lui, par des contrats, dans une relation juridique. Cela seul constitue le véritable droit de l’homme, qui revient à l’homme en tant qu’homme : la possibilité d’acquérir des droits… C’est dans ce droit de circuler librement sur le territoire et de s’offrir pour contracter des liens juridiques que consiste le droit de simple citoyen du monde ».

Ce droit de visite du voyageur ou du résident étranger est loin de se réduire à une simple curiosité. Il est tout simplement révélateur de l’essence même de l’hospitalité que le Robert définit ainsi : « le fait de recevoir quelqu’un chez soi, en le logeant gratuitement, en le nourrissant gratuitement ». La définition du Robert semble privilégier le couvert et le vivre ; j’aimerais y ajouter la conversation.