“Je ne me sens pas en capacité de faire évacuer des terrains sans offrir d’alternative.” Roland Ries, Maire de Strasbourg, Conseil municipal du 26 mai 2014

“Je crois qu’il est de la responsabilité d’une ville, d’une cité, d’élus qui se veulent humanistes (…) d’accueillir ces populations qui parfois n’ont pas le choix et qui ne partent pas toujours de chez elles simplement parce qu’elles en ont envie, mais aussi, parfois, parce qu’elles y sont contraintes.” Mathieu Cahn, adjoint au maire en charge de la lutte contre les discriminations, Conseil municipal du 22 septembre 2014

“Je ne pense pas que dans une ville comme Strasbourg, on puisse laisser ces gens-là à la rue, sans solution pour eux.” Roland Ries, Maire de Strasbourg, Conseil municipal du 22 septembre 2014

“Nous avons décidé, à Strasbourg, de regarder ces populations pauvres, vivant à la rue, dans des conditions sanitaires terribles et surtout en grand danger pour elles-même, nous avons décidé d’apporter un regard social et humanitaire.” Marie-Dominique Dreyssé, adjointe au maire en charge des Solidarités, de la lutte contre la précarité et l’hébergement de la population Rom,  Conseil municipal du 22 septembre 2014

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Que les familles soient installées sur des campements de fortune ou “placées” sur les « espaces temporaires d’insertion » de la Ville, faux projets d’accompagnement social mais vrai camp de stockage de populations dans la misère, tous les moyens sont bons, et souvent les plus perfides, pour amener les Roms à quitter Strasbourg, dans la droite ligne des politiques migratoires sarkozistes et frontistes pourtant officiellement décriées par la Ville PS-EELV.

Une des techniques de pression -outre les pressions psychologiques constantes- développée par les responsables de la mission Roms est la méthode qui consiste à réduire au maximum l’espace de vie des familles, à contraindre les moindres mouvements du quotidien, à obliger les corps au moins de liberté et de respiration possible, bref, rendre la vie tellement insupportable qu’il n’y aura pas d’autre choix pour les familles que partir. Dans un précédent article, nous avions déjà fait mention de l’apparition de zones délimitées par des rubans plastiques à l’intérieur desquelles les familles ne devaient plus s’installer au prétexte qu’elles empêchaient l’herbe d’y pousser ! Un véritable parcours labyrinthique était alors imposé aux familles pour rejoindre leurs caravanes, dans un dédale de barrières plastifiées.

Dernier exemple en date, sur le site « Petite Forêt » où une famille avec 6 enfants vient d’être doublement expulsée : expulsée du terrain d’abord, expulsée du pays ensuite.

 

Site « Petite forêt » 12-03-2015

Sur le site « Petite Forêt », des plots plastifiés installés l’an dernier ont cédé la place à des piquets métalliques de 2,5m de haut auxquels se fixeront bientôt des dizaines de mètres de grillage. Une famille avec 6 enfants est expulsée de son emplacement de fortune situé à l’intérieur de l’enceinte. Les ouvriers chargés de poser la clôture nous expliquent que ce grillage est chargé de faire dégager cette famille mais aussi d’empêcher que d’autres s’installent sur cette zone. Désormais ces clôtures délimitent et protègent des espaces vides -vides de Roms- selon les vœux de la Ville et les consignes ministérielles.

Comme nous le dénonçons depuis des années, la politique de la Ville PS-EELV -comme celle du gouvernement- à l’égard des Roms et des migrants se résume à une course à l’échalote avec la droite dure et le FN, harcelant les familles au quotidien dans les bidonvilles, les humiliant et les déshumanisant par tous les moyens y compris en dépensant des centaines de milliers d’euros en faux projets d’insertion pour fixer des familles hors des centre-villes et les forcer peu à peu à quitter discrètement le pays.

 

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« Petite forêt » 14-03-2015

A première vue, la pose de poteaux métalliques sur le terrain de la Petite Forêt prouve son efficacité puisque la famille avec 6 enfants a quitté les lieux “d’elle-même” avant même que le grillage soit fixé sur les poteaux. Plus tard, nous apprendrons qu’elle a subi des pressions et des menaces pour quitter le camp. Ce samedi matin, 14 mars, on a vu le père de famille démolir à la masse la vieille caravane qui leur servait d’abri précaire.

famille expulsée f2c

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Comme on leur demandait où ils allaient se “reloger”, ils nous ont dit qu’ils regagnaient la Roumanie.

Puis, ils nous ont montré les billets Eurolines ( 9 en tout, avec le frère de l’homme) d’une valeur de plusieurs centaines d’euros, achetés, selon leurs dire, par la mission Roms. Version, on ne peut plus plausible puisque la famille qui vivait dans le plus grand dénuement, ne disposait pas d’une telle somme et qu’elle n’avait pas l’intention de quitter Strasbourg. D’ailleurs les passeports des enfants étaient périmés, preuve supplémentaire qu’un retour au pays n’était pas prévu.

Les billets achetés ce vendredi (13-03) indiquent que le départ est prévu dimanche 15-03 à 13 h 30 place de l’Etoile, en face de la CUS.

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Sollicités par la famille pour transporter leurs bagages ( 7 gros sacs) jusqu’à un immeuble 65A rue des Petites-Fermes, à Koenigshoffen, où ils disaient pouvoir passer leur dernière nuit à Strasbourg, nous avons fait plusieurs voyages avec les sacs puis les enfants pendant que la maman rejoignait les lieux à pieds avec la poussette de la petite dernière.

Cette expulsion forcée d’une famille, dont quatre enfants étaient scolarisés route des Romains, a parfois été justifiée par le fait que c’est la présence d’enfants scolarisés qui fait rester les familles en France, ce qui les place, du coup, en tête des expulsables.

Donc, pour échapper à l’obligation scolaire, la Ville s’arrange pour faire retourner prioritairement au pays en Roumanie les familles avec enfants nombreux !

A noter qu’il est possible que cette expulsion était prévue par la Ville de longue date, cette dernière n’ayant pas payé les frais de cantine des enfants scolarisés depuis 2 mois ! Il n’y a pas de petites économies… à condition de les faire sur le dos des plus miséreux… Quelle humanité chez ces élus de la République et ces fonctionnaires, tous défenseurs de« l’esprit Charlie » depuis des semaines !

C’est en même temps la preuve du mensonge du discours sur l’insertion tenu par la Ville depuis des années. Ce n’est rien moins que la reprise de la méthode Sarkoziste « d’aide au retour » qui était pourtant critiquée par le chef de la mission Roms lors d’une projection-débat publique le 15 octobre dernier. (voir video ci-dessous)

A la question d’une étudiante lui demandant comment les Roms vivent cet acharnement contre eux de la part des gouvernements français (Sarkozy-Hollande), le chef de la mission Roms visiblement gêné ne trouve rien d’autre à lui répondre que : « Sarkozy a donné un sérieux coup de main aux Roms qui voulaient venir et qui sont finalement venus ». Puis démontrant que les Roms venaient en France pour toucher plusieurs fois de suite les subventions d’aide au retour d’une valeur totale de plusieurs milliers d’euros,  insistant sur sa démonstration, il répète : « Sarkozy a fait une politique anti-roms mais, en fin de compte, il a fait une politique qui a permis aux Roms de venir à Strasbourg et de trouver de belles petites maisons en Roumanie »…

 

Lundi 16 mars au soir, la grand-mère des 6 enfants paniquée appelle à l’aide : aucune trace de la famille et des 6 enfants qui n’ont jamais confirmé leur arrivée en Roumanie. Mais sont-ils seulement partis de Strasbourg ? Livrés à eux-mêmes, sans ressources et sans abri, n’auraient-ils pas fait de mauvaises rencontres ?

A toutes leurs inquiétudes légitimes, nous ne pouvons apporter de réponses…

 

Mardi matin 17 mars, les grillages étaient posées, condamnant non seulement l’accès à toute la première partie du terrain mais également aux toilettes de fortune creusées à même le sol mais qui offraient “l’avantage” d’être éloignées des baraques, garantissant un minimum d’hygiène en éloignant les germes et les odeurs, mais aussi les rats. Sécurité sanitaire minimale que la clôture posée par la Ville a fait perdre.

Quant à la famille, ses proches n’ont aucune nouvelles alors qu’elle aurait dû arriver la veille (lundi) en Roumanie.

Curieusement, les neuf personnes qui devaient être véhiculées de la rue des Petites Fermes à la place de l’Etoile dimanche n’étaient pas au rendez-vous fixé à 11h. Nous n’avons aucune nouvelle depuis. Tout se passe comme si la mission Rom, une fois le départ du bidonville obtenu, se désintéressait totalement du sort des gens. Rappelons qu’il y parmi eux 6 très jeunes enfants, 3 garçons et 3 filles dont un bébé.

La responsabilité morale du devenir des migrants expulsés ne s’arrête pas à la frontière, l’expulsion est un abandon de ces hommes, femmes et enfants, livrés à eux-mêmes et bien souvent offerts sur un plateau à tous les réseaux mafieux, passeurs et marchands de misère.

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