M . Le Directeur de l’Espace Julien

39 Cours Julien

13006 Marseille

Marseille, le 20 janvier 2010

Objet: Propagande du KKL à l’Espace Julien


Nous avons appris avec consternation la programmation d’un concert organisé par Keren Kayemeth Leisrael (KKL) dans vos locaux sur le Cours Julien le 29 Janvier prochain.

L’Espace Julien est un lieu innovant, convivial, respectable et respecté, dont on n’imagine pas que les responsables acceptent sciemment d’inviter ou recevoir une structure telle que le KKL1.

C’est pourquoi nous sommes convaincus que conformément à la stratégie du KKL (et de ceux qui le soutiennent) de masquer sa réelle vocation, vous avez été victime de sa propagande mensongère coutumière car le KKL se présente comme une organisation environnementale qui serait « la première organisation verte d’Israël ».

Dans les faits, ses actions prétendument écologiques ne sont qu’un prétexte pour masquer sa volonté de pratiquer activement depuis sa création en 1901 «la rédemption de la terre du peuple juif», la colonisation des terres palestiniennes et l’expropriation des autochtones palestiniens à travers notamment des confiscations de terrains.

Son projet et ses moyens sont ceux de la conquête et de la dépossession arbitraire du peuple palestinien et de son patrimoine. Les deux-tiers des terres gérées directement par le KKL, et la totalité des terres dites « d’Israël » que le KKL cogère avec l’Etat, sont des terres volées aux Palestiniens expulsés de leur pays en 1948.

Dans la longue liste des violations flagrantes du droit international dont le KKL est responsable, il faut souligner outre l’appropriation des terres des palestiniens expulsés, le fait que les milliers d’arbres que l’organisation se vante d’avoir plantés l’ont été sur les ruines des villages palestiniens de Galilée et du Néguev dynamités en 1948, et sur les territoires occupés depuis 1967. Ainsi le KKL a planté grâce à des fonds canadiens, le «Canada Park » sur les ruines des villages cisjordaniens de Latroun et d’Amwas (Emmaus pour les Français), rasés par Ariel Sharon en 1967.
Il faut aussi ajouter qu’à aucun moment, malgré ses prétentions environnementales, le KKL n’a dénoncé les arrachages ou destructions de centaines de milliers d’oliviers ou autres arbres cultivés par les paysans palestiniens de Cisjordanie ou de Gaza


Enfin aujourd’hui, le KKL lève des fonds français pour planter un « Parc de France» sur des terres expropriées des villages entourant Jérusalem, entre la colonie de Maale Adoumim et Jérusalem Est. Ainsi ce serait un parc «français» qui permettrait de parachever les contours du «grand Jérusalem» voulu par les colons.

Le KKL réunit aussi des fonds pour financer la «judaïsation du Néguev» en expulsant et regroupant les Bédouins qui le peuplent dans des villes-réserves, comme il en a récolté pour financer des «aires de repos» pour le bien-être des soldats rentrant de Gaza. Ce processus de colonisation, dans ces divers aspects est considéré comme autant de crimes de guerre par la Quatrième Convention de Genève.

En outre, les terres gérées par le KKL sont gérées selon des critères explicitement racistes .

A travers tous ces motifs, la présence de cette organisation à l’Espace Julien, dont l’activité principale est le spectacle, ne pourrait qu’apparaître indécente et insupportable à tout défenseur des droits de l’Homme informé sur les objectifs et les réalisations véritables du KKL.

Parce que nous aimons, fréquentons et respectons l’Espace Julien, nous ne pouvons imaginer que ce lieu puisse être utilisé à asservir, spolier, déraciner un peuple !

C’est pourquoi, nous vous demandons de refuser d’être complices du vol des terres palestiniennes, des violations des droits humains et du droit international en ne recevant pas le KKL à l’Espace Julien !

Dans l’attente de votre réponse, nous restons à votre entière disposition pour toute information complémentaire

Premiers signataires : UJFP (Union Juive Française pour la Paix).

M. le directeur de l’Espace Julien

39, Cours Julien

13006, Marseille

De la part de

Pierre Stambul

Marseille le 17 janvier 2011

Monsieur

Je m’exprime au nom de l’UJFP (Union Juive Française pour la Paix). Notre association défend la perspective d’une paix fondée sur l’égalité des droits et la justice pour tous les habitants de Palestine et d’Israël. Dans la guerre du Proche-Orient, il y a un occupant et un occupé. Nous estimons que la politique israélienne est à la fois criminelle pour les Palestiniens et suicidaire à terme pour les Israéliens et les Juifs du monde entier. Nous voulons faire entendre une voix juive fondée sur le droit international et le refus du colonialisme.

Nous avons appris que vous vous apprêtez à accueillir le 29 janvier dans vos locaux le KKL (Keren Kayemeth Leisrael), c’est-à-dire le fonds national juif.

Cette association mondiale, fondée en 1901, n’est pas une association écologiste ou humanitaire. Elle a joué un rôle essentiel dans la confiscation des terres palestiniennes et elle continue de le faire. Son but a toujours été de s’approprier par tous les moyens des terrains, des forêts, des bâtiments en Palestine afin d’y installer des immigrants juifs ou des Israéliens.

Alors que les Palestiniens possédaient encore 92% de la terre palestinienne au début de la guerre de 1948, le KKL a participé activement à la confiscation des terres en se jouant de toutes les tentatives d’application des décisions prises conformément au droit international.

Depuis 1950, la loi israélienne attribue 76,5% du territoire à l’Etat, 13% au KKL, 8% aux propriétaires privés et seulement 2,5% aux Palestiniens (qui forment 20% de la population ayant la nationalité israélienne). Les statuts du KKL excluent les non juifs de la propriété des biens, ce qui constitue une forme de racisme.

Ce processus et le refus du retour des réfugiés sont parmi les causes principales de cette guerre sans fin qui dure depuis plus de 60 ans.

Après 1967, le KKL a joué un rôle essentiel dans la colonisation de la Cisjordanie, de Gaza et du Golan. Il participe de façon active à la « judaïsation » de Jérusalem Est où, maison par maison, les Palestiniens sont expulsés de leur ville. Très récemment, dans le Néguev, le KKL a envoyé 300 jeunes lycéens pour participer à la destruction d’un village bédouin (Al Araqib). Les Bédouins du Néguev sont des Palestiniens, théoriquement citoyens d’Israël. Et le KKL qui occupe 6 des 13 sièges de l’organisme national qui gère les terres participe à leur expropriation de leur propre pays.

Cette occupation se prolonge indéfiniment à cause de l’impunité des dirigeants israéliens. En accueillant le KKL, vous allez participer, sans doute sans le savoir, à une action de soutien à une politique qui viole tous les jours le droit international et qui a été qualifiée de criminelle dans un rapport de l’ONU (le rapport Goldstone).

Au nom de l’UJFP, je vous demande de ne pas le faire et de renoncer à faire venir le KKL à l’Espace Julien.

Recevez, monsieur le directeur,

l’assurance de mes sentiments distingués.

Pierre Stambul