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Résumé du débat organisé par France-Culture sur le droit local des cultes.

Beaucoup ont dû suivre ce débat sur internet, mais une trace écrite peut être utile même résumée. Les phrases en italiques sont des commentaires ajoutés à la transcription. Ce document n’est pas une transcription littérale, mais la retranscription des arguments avancés en essayant, autant que possible, de ne pas les déformer.

Ce débat a été organisé, jeudi 23 février, dans le cadre de l’émission “Le Grain à Moudre” de France Culture animée par Hervé Gardette. Trois débatteurs étaient conviés :

  • Deux, favorables au droit local des cultes (législation non-laïque) : Francis Messner (FM), Directeur de recherche au laboratoire Société, Droit et Religion en Europe (CNRS) et Jean Volff (JV), Avocat Général honoraire à la Cour de Cassation et par ailleurs ancien vice-président de l’ECCAL (Eglise des protestants luthériens).

  • Un, favorable à l’introduction de la laïcité en Alsace-Moselle : Roland Pfefferkorn (RP), professeur de sociologie et chercheur au laboratoire Culture et Société en Europe (CNRS), Directeur du département de sociologie U.F.R. des Sciences sociales (Université de Strasbourg).

Le débat a été organisé par thèmes.

  1. LE CONCORDAT ET/OU LA LOI DE 1905 SONT-ILS DES ANOMALIES ?

FM : Il n’y a d’anomalies ni en Alsace-Moselle (avec le Concordat), ni dans le reste de la France (avec la loi de 1905). Le Concordat est une Convention signée entre l’Etat et l’Eglise catholique et étendue aux cultes protestants et au culte juif. Cependant, avant ou après la loi de 1905, des législations spécifiques ont été accordées à la Guyane (ordonnance de 1828) et aux Territoires d’Outre Mer (décrets Mandel de 1939). Ces particularismes correspondent à la situation alsacienne, il y a une diversité du régime des cultes dans la République française.

Juridiquement la situation du droit local alsacien-mosellan est différente de celle des territoires cités par Francis Messner. La législation spécifique de la Guyane et des TOM résulte de la colonisation et a été spécialement conçue pour ces territoires. Le droit local alsacien-mosellan résulte de la période d’annexion qui a soustrait l’Alsace-Moselle à l’évolution législative de la France et particulièrement aux lois de laïcisation. C’est un droit local d’application provisoire.

RP : Avec le Concordat, on peut dire que la France entière n’est pas laïque. En effet, tous les contribuables français, avec leurs impôts, rémunèrent, en Alsace-Moselle, les ministres des cultes reconnus (catholique, protestant, juif) et les enseignants de religion officiant à l’Ecole publique. Cette contribution est obligatoire, alors qu’en Allemagne, les contribuables peuvent signaler qu’ils refusent l’impôt religieux.

D’autre part, le statut scolaire local (enseignement religieux à l’Ecole publique) ne découle pas du Concordat, ce sont des législations différentes. Le statut scolaire dépend notamment de la loi Falloux et de législations ultérieures allemandes et françaises.

Le prélèvement obligatoire de l’impôt religieux (destiné à l’Alsace-Moselle) est de toute évidence inconstitutionnel (article 2 de la loi de 1905), mais ce problème ne rentre pas dans le cadre des QPC. Ce prélèvement obligatoire ne respecte pas non plus l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme.

JV: Il n’y a pas eu de définition de la laïcité. En matière de laïcité, d’un point de vue juridique, il n’y a pas que la loi de 1905, il y a aussi l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme. Cette Convention a été ratifiée par la France et elle a une force supérieure aux lois nationales.

Son article 9 indique que “toute personne a droit…à la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l’enseignement, les pratiques et l’accomplissement des rites.” Cet article correspond à la situation alsacienne.

Donnant un avis personnel (non émis par une juridiction) il estime que l’article 2 de la loi de 1905 viole les articles 9 et 14 de la Convention européenne en discriminant les religions.

  1. LES INTENTIONS DE FRANCOIS HOLLANDE.

Celui-ci a modifié son intention première de constitutionnaliser les principes de laïcité (en fait les articles 1 et 2 de la loi de 1905) avant de proposer ensuite d’exclure l’Alsace-Moselle de cette constitutionnalisation.

FM : Les deux propositions posent des problèmes constitutionnels.

Dans tous les cas, constitutionnaliser l’article 2 de la loi de 1905 reviendrait à abroger les articles 13 et 19 de la loi de 1905 (l’article 13 est une concession faite aux catholiques en 1908 pour laisser aux collectivités publiques la propriété des lieux de culte dont elles assument “l’entretien et la conservation”. L’article 19 accorde aux associations cultuelles des facilités de gestion financière et de financement).

Dans le cas de la non-application à l’Alsace-Moselle, une nouvelle difficulté constitutionnelle serait soulevée. Il y aurait entre l’Alsace-Moselle et le reste de la France métropolitaine une grande différence de droit (elle existe actuellement, mais sous un régime provisoire, et n’est pas constitutionnalisée). Le Conseil constitutionnel pourrait rejeter cette proposition (ce qui fragiliserait la position juridique des partisans du droit local des cultes) ou il pourrait obliger à des ajustements du droit local (cequi aurait pour effet de mettre en débat national le régime local des cultes, ce que redoutent les partisans de ce régime).

RP : Il refuse d’entrer dans un débat juridique et préconise une évolution du statut scolaire local conforme à la réalité de la société alsacienne. La réalité c’est la baisse de fréquentation de l’enseignement religieux année après année et au long de la scolarité. Cette réalité doit avoir comme corollaires : la suppression de l’obligation d’indiquer, sur des documents officiels, sa religion ainsi que la suppression de l’obligation de demander une dispense pour ceux qui ne souhaitent pas choisir l’ enseignement religieux.

La société a évolué, la population alsacienne est largement sécularisée, elle n’est pas plus pratiquante que dans le reste de la France. La pénurie de prêtres oblige à des regroupements de paroisses.

Il faut aller progressivement vers une solution raisonnable traduisant la sécularisation de la société.

En 2004, en Moselle, la fréquentation des cours de religion s’établissait à 62% au primaire, 41% au collège et 2,6% en lycée. Elle si faible aujourd’hui que le rectorat ne publie plus de statistiques.

La fréquentation est supérieure en Alsace : en 2004 elle est estimée plus de 65% au primaire (63% en 2010), 41% en collèges (31% en 2010) et 10,5% en lycées (13,8% en 2010). Cependant, le nombre total d’élèves suivant l’enseignement de religion ne cesse de diminuer : dans le Bas-Rhin, pour le primaire la fréquentation passe de 60 000 en 1993 à 51 000 en 2004 et pour le secondaire de 48 000 en 1993 à 38500 en 2004 et 31500 en 2010.

Nous ne disposons pas de toutes les statistiques.

JV : Le cadre du Concordat a évolué en Alsace-Moselle. Pour les protestants, par rapport aux articles organiques de 1802, des réformes sont intervenues. Récemment deux décrets ont réformé l’organisation des consistoires et des paroisses. Ces décrets ont été préparés par les autorités religieuses et acceptés par le pouvoir civil après avis du Conseil d’Etat.

En application des articles organiques du Concordat,ces décrets, préparés par les deux Eglises protestantes d’Alsace (ECCAL et ERAL), visaient à entériner leur décision de se réunir en une seule structure, l’EPAl. Contrairement à ce que suggère Jean Volff, cette intervention de l’Etat ne résulte pas d’une évolution du Concordat, mais de sa simple application. L’Etat n’a pas transgressé la loi de 1905, il a appliqué la législation locale propre à l’Alsace-Moselle.

Cette situation est conforme à celle qui prévaut dans toute l’Europe où les rapports entre les cultes et l’Etat sont régis par des Conventions.

RP : Oui la situation a évoluée : à l’école primaire publique, la prière n’est plus obligatoire à l’entrée dans les classes et le crucifix a pratiquement disparu des salles de classe. Il faut poursuivre cette évolution et cesser d’exiger la signature d’une demande dispense pour l’enseignement religieux. Seule l’inscription, pour ceux qui désirent cet enseignement, doit être proposée.

Il fut un temps où la Fédération protestante était sur cette position raisonnable, mais il y a maintenant un durcissement.

Cette résistance à l’évolution correspond à la volonté de maintien d’un privilège des cultes en Alsace-Moselle.

FM: L’arrêt du Conseil d’Etat de 2001 établit que l’enseignement religieux est obligatoire à l’Ecole publique mais que l’obligation ne concerne que les chefs d’établissement qui doivent organiser cet enseignement ( en fait le CE dit que c’est à l’Etat qu’incombe cette obligation). Il n’y a pas d’obligation pour les élèves, dans la pratique il existe un système de dispense. Dans la pratique, c’est par le biais de l’inscription que s’organise l’enseignement religieux et non par la dispense formelle.

Habile manœuvre : l’ambiguïté de la rédaction des attendus de l’arrêt du CE permet aux partisans du statut scolaire local de se présenter comme respectant la liberté de conscience alors qu’ils imposent toujours la demande de dispense. Cetarrêt du CE est redoutablement retord.

Si l’on suit le raisonnement deFrancis Messner, à quoi sert l’obligation de demander une dispense si aucune contrainte ne la justifie pour les élèves ?

JV : A l’origine, à l’époque de la loi Falloux (XIXe siècle) et jusqu’à la première moitié du XXe siècle, l’enseignement religieux était confessionnel, mais il a évolué et est maintenant majoritairement interconfessionnel. D’autre part ce n’est plus un enseignement dogmatique, mais un enseignement de culture religieuse. Un enseignement de ce type est indispensable pour comprendre les œuvres culturelles dont beaucoup ont un soubassement religieux. La culture religieuse est indispensable. Il n’est pas question de privilège, mais d’identité culturelle.

Habile manœuvre là aussi, mais qui passe sous silence que ce sont les enseignants laïques qui, par leurs luttes, ont imposé que les écoles deviennent interconfessionnelles afin de les séculariser. Manœuvre qui utilise aussi le fait que l’Etat n’a toujours pas pris en charge des enseignements laïques d’histoire des religions.

FM : La loi de 1905 n’ignore pas les cultes. Elle participe à leur organisation en garantissant la liberté religieuse, l’aumônerie, en fixant le cadre des associations cultuelles et en prévoyant une participation financière des collectivités publiques. L’Etat n’est pas séparé des cultes.

Rétablissons les faits : la loi de 1905 n’est pas une loi d’ignorance des cultes, par contre, c’est bien une loi de séparation de l’Etat et des cultes, une loi de divorce qui fixe nécessairement les obligations des uns et des autres.

Au Danemark, il existe une Eglise d’Etat qui participe encore aux registres d’état civil. La population n’est pas pratiquante, mais attachée à cette tradition pour des raisons culturelles. En Alsace, nous retrouvons une situation de ce type. Ce n’est pas une question de pratique religieuse, mais d’identité culturelle. Le statut scolaire fait partie de l’identité alsacienne.

Le droit des cultes n’est pas lié au niveau de la pratique religieuse.

Les traités de l’Union européenne énoncent qu’en ce qui concerne l’organisation des cultes, ce n’est pas le droit européen qui s’applique, mais le droit national ciment de l’identité nationale.

Cette affirmation doit être nuancée par de récents arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme qui mettent l’accent sur la “liberté négative” et s’appuient sur des principes proches de ceux de la laïcité.

Mais si nous suivons ce propos de Francis Messner, au même titre que les autres régions, l’Alsace est une région de l’Etat français. A ce titre, pour ce qui concerne les cultes, c’est le droit national qui doit s’appliquer, c’est à dire la laïcité.

  1. L’ARTICLE DU MAIRE DE STRASBOURG DANS “LE MONDE” A SUSCITE DES POLEMIQUES.

RP : l’argumentaire de Roland Ries est un sophisme. On ne peut être laïque et soutenir l’enseignement religieux à l’Ecole publique et la rémunération des ministres du culte par les contribuables du territoire national.

Imaginer que la population approuve massivement cette situation relève d’une conception essentialiste de l’identité qui nie l’évolution de la société alsacienne, aujourd’hui largement sécularisée. Un exemple en est aussi donné par la pratique de la langue alsacienne, on peut le regretter, mais aujourd’hui elle est de moins en moins parlée.

Quand on parle de laïcité, il ne faut pas seulement se référer à la loi de 1905, il faut aussi citer les lois de laïcisation de l’Ecole publique des années 1880 qui portent sur les bâtiments (suppression des signes religieux, crucifix, croix etc.), sur les personnels (exclusion des ministres du culte et emploi de personnels laïques) et sur les programmes (suppression de l’enseignement religieux). Ces principes fondamentaux ne sont pas pleinement respectés en Alsace-Moselle.

En Alsace, les personnels qui enseignent la religion sont formés par les cultes qui fournissent au rectorat, pour agrément, la liste des enseignants de religion qu’ils ont arrêtée. Pour leur inspection ces enseignants dépendent directement des cultes.

Roland Pfefferkorn se déclare partisan d’une prise ne charge par l’Education nationale d’un enseignement laïque de l’histoire des religions.

Le contenu et la qualité des cours de religion sont variables. En Alsace-moselle aussi la déprise religieuse est patente, mais l’objectif des cultes reconnus reste de “garder le contact avec les jeunes pour transmettre la foi”. Le prosélytisme est toujours sous jacent.

Ces cours sont toujours réputés obligatoires alors que la majorité de la population est, non pratiquante, non croyante ou indifférente aux religions.

JV : Il n’y a pas de définition de la laïcité mais il y a une jurisprudence constante de la Cour de Cassation et du Conseil d’Etat qui repose sur deux principes fondant la laïcité : l’Etat ne doit pas être inféodé aux cultes et il doit être neutre, c’est tout ! La loi de 1905 n’est pas la laïcité à elle seule.

Ces juridictions jugent toujours dans un sens libéral, conformément aux préconisations d’Aristide Briand pour qui l’essentiel était l’article 1 de la loi de 1905. Tout ce qui n’est pas interdit doit être interprété dans un sens libéral, c’est licite.

Les enseignants de religion dépendent d’une hiérarchie religieuse, mais à l’origine, avec la loi Falloux, les instituteurs avaient la charge d’enseigner la religion à l’Ecole publique. C’est la défection des instituteurs au cours du temps qui a amené la prise en charge de cet enseignement par des enseignants dépendant des hiérarchies religieuses. Il ne subsiste que très peu de pasteurs qui enseignent, la grande majorité sont des laïcs formés par les Eglises et agréés par l’Education nationale.Ces enseignants ne sont pas des salariés soumis à l’autorité des cultes. Ils font un travail bénévole, l’Etat leur verse une indemnisation, mais ce n’est pas grand chose.

le nom “laïc” [avec un “c”] désigne les non-clercs, ceux qui ne sont pas ministres d’un culte. Le nom “laïque” désigne une personne se référant à la laïcité.

Il est exact que la majorité des enseignants de religion à l’Ecole publique sont des laïcs, mais ils dépendent directement de la hiérarchie religieuse bien qu’ils soient rémunérés par l’Etat.

D’autre part le nombre de ministres du culte officiant à l’Ecole publique n’est pas négligeable. En Alsace, dans le secondaire, ils étaient encore 50 en 2010 pour 195 laïcs.

Enfin, il semble que Jean Volff ne soit pas très informé de la rémunération des enseignants laïcs de religion. Dans le secondaire, la majorité sont des Certifiés titulaires et gagnent autant qu’un enseignant du public de même grade. D’autre sont auxiliaires ou vacataires et gagnent autant que les enseignants du public des mêmes catégories, c’est à dire, pour tous, fort peu. Dans le secondaire, en 2010 : 118 sont certifiés, 11 maîtres auxiliaires, 59 contractuels, 7 vacataires, 50 ministres du culte et…1 certifié d’une autre discipline (sans doute un volontaire enseignant par ailleurs une discipline générale).

Seul un petit nombre est bénévole au niveau du primaire.

  1. L’ISLAM POSE-T-IL PROBLEME AVEC LE STATUT LOCAL ?

FM : En Alsace-Moselle, l’islam fait partie des cultes non reconnus. En Belgique, l’islam est un culte reconnu alors que la Belgique a été territoire français sous la révolution et a adopté le système des cultes reconnus. Une telle évolution est possible en Alsace par simple voie réglementaire. Il faut éviter la voix législative afin d’éviter un débat au parlement. Cependant, il y a des problèmes à régler : la nature de la représentation des musulmans actuellement mal identifiée, la définition de circonscriptions, la formation des imams, la nature de l’enseignement et de la rémunération des imams. L’islam aurait un statut spécifique différent de celui des cultes reconnus.

Les partisans du statut local militent pour l’ouverture du statut au culte musulman pour des raisons d’équité entre cultes, mais surtout pour assurer la revitalisation du statut, la participation des élèves diminuant régulièrement. Ils instrumentalisent l’islam pour renforcer le statut local.

RP : Le statut scolaire local crée des discriminations envers les croyants de religions autres que les cultes reconnus et envers les non-croyants et les indifférents aux religions.

L’extension au culte musulman pose le problème des limites, d’autres religions pourraient revendiquer la même ouverture comme les évangélistes, les bouddhistes et bien d’autres cultes. La situation serait ingérable et il y aurait toujours des cultes discriminés ainsi que les laïques.

De plus, cette extension augmenterait encore le montant du financement public assuré par l’impôt de tous les contribuables.

En Alsace-Moselle, il faut en revenir à l’abolition des privilèges des cultes, comme l’acceptait, il y a quelques années, la Fédération protestante.

Il faut arrêter de financer les cultes en Alsace-Moselle, il est anormal que les contribuables continuent de payer les salaires des ministres des cultes et des enseignants de religion. Il est toujours possible de changer une loi ou un règlement.

JV : Le financement des cultes est légitime et les sommes engagées ne sont pas élevées. L’Etat finance aussi des syndicats, des associations, des partis politiques qui appartiennent, comme les cultes, au domaine des opinions et des convictions.

Le statut local peut s’ouvrir à l’Islam mais aussi à d’autres cultes comme les évangéliques.

Les limites sont faciles à trouver, les cultes nouvellement admis doivent avoir une certaine importance, être bien établis, avoir une visibilité et une assise sociale. En appliquant ces principes, l’extension du statut scolaire à tous les cultes ou aux sectes qui en feraient la demande est ainsi contrôlée.

Comme l’a dit Roland Pfefferkorn, une telle situation est ingérable et source de discrimination envers les cultes qui seraient écartés et envers les laïques. Comment définir les critères d’admission des nouveaux cultes ? L’Etat laïque a une obligation de neutralité, il ne peut s’immiscer dans l’organisation des cultes (article 1 de la loi de 1905).

Les partisans de l’extension du statut local souhaitent le retour à un gallicanisme anticonstitutionnel.

Là s’arrête le débat.

Une autre présentatrice, Julie Gacon, donne la parole à celui qu’elle présente comme communément appelé “l’aumônier de l’assemblée nationale”, le père Mathieu Rougé. En fait, il officie à 3 minutes de l’assemblée et dirige le “Service pastoral d’études politiques” dans sa paroisse de la cathédrale Ste Clothilde.
Il reçoit les parlementaires catholiques allant selon ses dires “des communistes aux Villiéristes.” qui ne veulent pas séparer leur travail législatif de leurs convictions chrétiennes. Ils abordent des problèmes d’éthique, des problèmes liés à la famille, à l’émigration, à la laïcité. Il considère que ces discussions apportent une valeur ajoutée au travail des parlementaires. Les élus de Gauche apparaissent parfois un peu gênés d’échanger avec des élus de Droite. Il note une sur-représentation d’élus centristes de type démocrates chrétiens, en particulier ceux de l’est de la France (
sur ce point, on le croit sur parole).

 

A la fin de l’émission, le présentateur signale la prochaine sortie du livre de notre ami Jean Marie Gillig sur l’Etat des lieux en matière de Droit des cultes et particulièrement en ce qui concerne le statut scolaire local.
Ce livre sera une référence indispensable aux laïques d’Alsace-Moselle et d’ailleurs.

 

Comme à l’accoutumée, Roland Pfefferkorn a porté avec justesse les couleurs de la laïcité en Alsace-Moselle. Ce n’était pas facile, tout particulièrement face à Jean Volff.

Roland Pfefferkorn a fait plusieurs publications universitaires concernant le statut scolaire local. Sauf pour les derniers ajouts, il a contrôlé et corrigé ce document pour ce qui le concerne.

 

Les problèmes économiques et sociaux touchant aux conditions de vie, à l’organisation du travail, à l’habitat, aux charges financières, au chômage, aux discriminations mobilisent à juste raison l’attention. Cependant, la question laïque est plus que jamais d’actualité sur l’ensemble du territoire national et encore plus particulièrement en Alsace-Moselle. Ce n’est pas une question secondaire, elle engage notre conception de la sphère civique, de la démocratie, des discriminations de tous ordres.

 

Compléments.

Il existe bien, dans les programmes du collège des chapitres dédiés à la connaissance des religions. Mais ils se contentent de reprendre les principaux dogmes sans aucun commentaire ou analyse. On se croirait au catéchisme. Le seul élément signalé comme nécessitant une mise en perspective concerne l’Islam avec le passage où Mohamed monte au ciel sur une “échelle céleste” et en redescend par la même voie.

Pour contrer l’enseignement religieux à l’Ecole publique en Alsace-Moselle et pour donner à tous les élèves des repères concernant le rôle des religions dans l’Histoire des peuples, il est nécessaire de proposer un enseignement laïque et critique de l’histoire des religions.

Cet enseignement s’étalerait tout au long de la scolarité primaire et secondaire avec les dimensions historiques, sociales, philosophiques, artistiques liées aux religions.

 

Pour ce qui concerne la coût du Concordat, les DNA avaient publié des chiffres en 2007 indiquant que l’Etat avait plafonné le nombre de ministres du culte qu’il pouvait rémunérer à 1409 emplois et que le coût total des dépenses était de 55,9 millions d’euros.

En 2012, il y a 1393 ministres du culte à rémunérer et le total des prestations versées s’élèvent à 58 millions d’Euros auxquels il faut ajouter 1 978 000 euros pour la tutelle des congrégations et collectivités religieuses.

Nous ne disposons pas de chiffres fiables concernant le coût de la rémunération des enseignants de religion.

Pour le primaire seul, en 2003, dans le seul Haut-Rhin l’enveloppe était de 479 000 euros, ce qui doit faire un peu plus de un million d’Euros pour l’académie. Ces chiffres ne coïncident pas avec ceux de la Moselle pour la même période : 1 053 359 euros pour ce seul département pour 37 000 élèves. A suivre.

En Alsace, en 2010, l’augmentation des effectifs d’élèves qui suivent l’enseignement religieux au lycée est liée aux vigoureuses incitations des circulaires rectorales (voir notre document “audience au recteur”) et à l’implication sans réserve de quelques chefs d’établissement dont ceux du lycée Marcel Rudloff de Hautepierre. Ces chefs d’établissement orientent l’enseignement religieux sur” l’Eveil Culturel et Religieux”(ECR) qui bénéficie de méthodes pédagogiques et de programmes attractifs. Un des chefs d’établissement du lycée Rudloff avait même été jusqu’à rendre “obligatoire” l’ECR pour tous les élèves durant le premier mois de cours. L’intervention de JC Meyer, enseignant dans cet établissement, a obligé le proviseur et le rectorat à faire marche arrière.

Le rectorat a même ajouté un nouveau gadget, des Heures d’Accueil et d’Animation (HAA) pour “faire découvrir l’enseignement religieux aux élèves intéressés.”

 

La vie laïque est dure en Alsace !

 

Pour Laïcité d’Accord

Claude Hollé février 2012.