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RETRAITES :LES ANNONCES SE PRÉCIPITENT VERS DU TRÈS MAUVAIS POUR LE MONDE DU TRAVAIL

Le gouvernement recevra d’ici quelques jours les organisations syndicales et patronales pour leur livrer le fruit de sa réflexion sur les retraites.

Mais c’est un secret de polichinelle.

Les milieux gouvernementaux et patronaux, leurs experts, le rapport Moreau ont déjà signifié qu’il n’y aurait point de salut en dehors de mesures draconiennes frappant les retraités et surtout les futurs retraités.

La presse livre chaque jour, à petites doses, ce qui serait envisagé.

Le régime général des retraites de la Sécurité Sociale ne serait plus que l’ombre de lui-même et son extrême précarité fait déjà saliver les fonds de pension qui rêvent de venir prendre la place et de présenter aux salariés, qui en auront les moyens, des systèmes de retraites par capitalisation.

Ainsi la France se coucherait devant les injonctions de Bruxelles qui réclame que partout les politiques d’austérité s’appliquent et que les systèmes de Sécurité sociale mis en place en Europe à la libération soient définitivement rayés de la carte car devenus trop généreux dans une période de crise, dit-on, dans ces milieux de privilégiés.

Ainsi ce matin sur France inter, le porte parole du patronat, du journal les Échos, nous a fait le point des mesures que s’apprêteraient à annoncer la premier ministre : une hausse importante de la CSG qui affecterait les retraités et les actifs, un allongement de la durée de cotisation qui pourrait aller jusque 44 ans étalé dans le temps.

Sarkozy et Fillon ont rêvé d’une telle réforme et n’avaient pu l’obtenir en 2010 face à plus de 7 millions de personnes au total qui avaient manifesté durant plusieurs semaines à l’appel des organisations syndicales et des partis de gauche dont le parti socialiste.

Le commentateur de France-Inter disait ce matin que les travailleurs prenant leur petit déjeuner vont pour ainsi dire le prendre de travers.

Il a raison.

C’est certain et en particulier pour tous ces jeunes précaires, ces jeunes chômeurs en attente parfois pendant des années d’un vrai boulot permettant de cotiser pour les retraites pour obtenir un jour le droit de partir avec les trimestres nécessaires pour une retraite à 60 ans comme les manifestants de 2010 l’exigeaient.

Même chose pour les retraités qui vont voir leur niveau de vie reculer sérieusement et suivre les autres reculs remontant jusqu’aux mesures Balladur de 1993.

Cette réforme est une grave faute du gouvernement, il veut la prendre en parfait accord avec le patronat car il s’agit de mettre un terme, au bout, à la cotisation dite patronale déjà amputée par de multiples exonérations et de la faire payer pour la quasi-totalité par le monde du travail avec la CSG et éventuellement la TVA .

Pendant ce temps les grandes entreprises s’engraissent et distribuent toujours plus de profit à leurs actionnaires avec ce qui est en sorte pris aux salariés et aux retraités, ne serait-ce par les exonérations de cotisations sociales dont bénéficient ces grands groupes jusqu’à 1,6 SMIC.

Le gouvernement, c’est grave, résilie 1945 et le système solidaire de la Sécurité sociale mis en place par Parodi, Croizat et Laroque avec l’aide puissante de la CGT et de ses cinq millions d’adhérents ainsi que du Parti communiste qui représente près de 28 % des voix aux élections.

Je rappellerai que Croizat s’était opposé à une Sécurité sociale basée sur l’impôt, contestant le système mis en place en Grande Bretagne par Béveridge, qui faisait reposer la Sécurité sociale sur la fiscalisation.

La cotisation fut le choix du législateur à l’unanimité de l’Assemblée provisoire et Croizat indiquait alors que la cotisation était en lien avec le travail, la création de richesse de la classe ouvrière et que la cotisation de l’employeur n’était en fait que la cotisation de l’entreprise avec celle du salarié prise sur les richesses créées.

L’âge de la retraite était fixée à 65 ans mais avec l’idée qu’au fur et à mesure de la reconstruction du pays détruit par la guerre cet âge pourrait évoluer vers 60 ans ce qui arrivé tardivement en 1982 grâce à l’Union de la Gauche et à un gouvernement la composant après une formidable bataille de la CGT qui disait à cette époque vaut mieux payer des retraités que des chômeurs.

Ici, c’est donc un recul de civilisation auquel hélas le gouvernement nous convie.

Ce choix doit être combattu avec opiniâtreté par tous les travailleurs et les retraités et le 10 septembre doit marquer notre désaccord le plus complet par la participation massive de tous les travailleurs et des retraités.

En 1945, il n’y avait plus rien dans les caisses de l’Etat, la droite pétainiste avait mis le pays à genoux avec les nazis, il fallait reconstruire du social et des hommes et des femmes l’ont fait avec la Sécurité sociale et ils ont choisi la cotisation sociale pour alimenter cette solidarité que nous a envié le monde entier.

Ils n’ont pas hésité les Pierre Laroque, Alexandre Parodi, Ambroise Croizat, George Buisson, Henri Raynaud dans leur diversité d’opinion politique, syndicale à donner les moyens de financement par cette cotisation sociale qui est la clé de voute du système dont le patronat de l’époque a été le seul à le contester, lui qui avait collaboré avec les nazis en ruinant le pays et en faisant des affaires avec les forces occupantes.

Le détruire aujourd’hui en privilégiant la CSG et la décroissance de la cotisation dite de l’employeur serait une honte et un offense à ceux qui nous ont légué cette sécurité sociale et ce système de retraite.

Il faut que la retraite reste à 60 ans pour tous et avant pour les professions pénibles, il faut avoir le courage, comme nos prédécesseurs, de fixer la cotisation salariale et celle de l’entreprise pour financer nos systèmes de Sécurité sociale.

S’il y a encore quelques choses à attendre de ce gouvernement c’est qu’il ait enfin le courage de s’attaquer à l’argent roi plutôt que de charger la barque du coté des salariés et des retraités.

Monsieur le Président de la République ne soyez pas le fossoyeur de la retraite par répartition et solidaire.

Bernard LAMIRAND

Animateur du Comité d’honneur national pour la reconnaissance d’Ambroise Croizat comme l’artisan principal de la mise en place de la Sécurité sociale.