Tribune libre

Le 14 juillet rappelle le début de la révolution française et notamment, depuis 1880, la fête de la Fédération le 14 juillet 1790 qui marqua l’unité du pays, un an après la prise de la Bastille. Au départ en 1790 c’était une fête très populaire avec tous ces députés et élus des départements qui défilaient au champ de Mars (voir document joint).
Deux ans plus tard, la révolution a eu à faire face à l’agression d’armées étrangères, à des rois et à un empereur qui voulaient retrouver leurs privilèges ou tremblaient pour leurs trônes. Nous avons tous en tête la bataille de Valmy remportée en 1792 par la courageuse armée révolutionnaire de l’époque contre les armées prussiennes et autrichiennes plus nombreuses et expérimentées.

Après la défaite de 1870 et la perte de l’Alsace-Moselle, l’Assemblée décida en 1880 de faire du 14 juillet 1790 la fête nationale française. Les gouvernements décidèrent de faire du 14 juillet une fête militaire pour exhiber l’armée. Il y avait de la revanche dans l’air avec les paroles de la Marseillaise promue hymne national : la guerre contre l’Allemagne, se préparait.

Cela doit-il constamment rester ainsi ou être revu à l’occasion des Présidentielles ?

En 2011, Sarkozy et le gouvernement Fillon ont fêté le 14 juillet en faisant défiler l’armée de métier “en opérations extérieures” c’est-à-dire des troupes au service de Karzaï, marionnette américaine en Afghanistan, ou des troupes en Afrique francophone destinés à mettre en place, à maintenir ou à faire partir les dictateurs, ou en Méditerranée à aider les dirigeants israéliens et américains. Sarkozy et Fillon envoient, sous le couvert de combats pour la liberté,  les soldats pour le plus grand profit des multinationales françaises et étrangères, notamment américaines, qui ne rêvent que de profits mondialisés pour leurs principaux actionnaires et dirigeants ! Les soldats eux risquent leurs vies. Derrière ces batailles lointaines, nous prépare-t-on à une guerre contre les concurrents chinois, russes, indiens … adeptes eux aussi du néolibéralisme ? Ou s’agit-il de garantir à nos multinationales 5 milliards d’euros de bénéfices par an issus des richesses d’Afrique ?

Eva Joly a raison de proposer de fêter autrement le 14 juillet car la méthode Sarkozy-Fillon en 2011 ne rappelle en rien la fête de la Fédération de 1790 et les principes de liberté, d’égalité et de fraternité, bien au contraire !

Dire qu’Eva Joly “n’a pas une culture très ancienne des valeurs françaises” ou lui reprocher un manque de connaissance de la société française est une imposture.
Avoir une double nationalité permet parfois de mieux comprendre le pays où l’on vit !
Evoquer à ce sujet sa double nationalité, est aussi une hypocrisie.
Lorsque l’UMP et le FN ont des amis qui profitent d’une double nationalité, ils ne disent rien. Reprochent-ils à certains officiers de l’armée française d’être devenus chefs d’Etat en Afrique ? Parmi ces derniers et leurs conseillers, combien ont une double nationalité ? Sarkozy a-t-il reproché au soldat israélien Gilad Shalit sa double nationalité franco-israélienne ? Il le soutient avec énergie, oubliant de demander la libération du jeune franco-palestinien Salah Hamouri. prisonnier d’opinion depuis plus de 6 ans. Si Sarkozy devait reprocher la double nationalité à tous les franco-américains et franco-israéliens, il aurait beaucoup d’ennuis ! A l’UMP on se prétend patriote. Est-ce en exonérant des multinationales comme Total, de l’impôt sur les sociétés en France, en maintenant le système des paradis fiscaux et l’injustice fiscale, en contribuant au maintien du système néolibéral, affameur des peuples dans le monde et responsable de la pauvreté en Europe ? L’UMP n’est pas regardante sur ses soutiens qui habitent parfois en Suisse, à Monaco, à Londres ou ailleurs, pour payer moins d’impôts. Sarkozy est l’ami des ultra-riches et défend avec dynamisme leurs intérêts par toutes ses réformes.

Eva Joly, cette candidate à l’élection présidentielle qui a fait trembler les dirigeants d’Elf quand elle était juge d’instruction, Présidente de la Commission du développement au Parlement européen, se voit reprocher sa double nationalité franco-norvégienne. En réalité Eva Joly fait peur. A droite on croit pouvoir l’isoler en s’appuyant sur l’ignorance et les sentiments les plus bas de certains Français. C’est de l’hypocrisie destinée à masquer l’incapacité à résoudre les problèmes économiques et sociaux du pays. Cela révèle la peur durant la campagne présidentielle de voir dénoncer certains faits gênants. Il y a de quoi faire et la société doit bouger si nous ne voulons pas aller dans le mur ! Eva Joly fait partie de ces femmes courageuses qui osent nous sortir des idées reçues et du conformisme mortifère.

Alfred Zimmer alfred.zimmer16@orange.fr

14 juillet 1790
La Fête de la Fédération
Ce document existe en version intégrale pour les Amis d’Hérodote
Le 14 juillet 1790, à Paris, les Français commémorent en grande pompe le premier anniversaire de la prise de la Bastille.
La Fête nationale du 14 juillet perpétue le souvenir de cette fête, qui, elle-même, commémorait la prise de la Bastille.
L’union nationale
Des fêtes civiques spontanées organisées çà et là dans les départements ont inspiré l’idée de cette grande fête d’union nationale aux députés de l’Assemblée constituante et au marquis de La Fayette, homme de confiance du roi.

Fête de la Fédération de 1790

Les députés et les délégués de tous les départements, les «Fédérés» forment un immense cortège qui traverse la Seine et gagne la vaste esplanade du Champ-de-Mars.

Dans les tribunes, sur les côtés de l’esplanade, on compte 260.000 Parisiens auxquels s’ajoutent une centaine de milliers de fédérés, rangés sous les bannières de leur département.
La tribune royale est située à une extrémité du Champ-de-Mars, sous une haute tente. À l’autre extrémité, un arc de triomphe. Au centre de l’esplanade, Talleyrand, évêque d’Autun (qui ne se cache pas d’être athée), célèbre la messe sur l’autel de la patrie, entouré de 300 prêtres en surplis de cérémonie.
Ensuite vient la prestation de serment. La Fayette, commandant de la garde nationale, prononce celui-ci le premier, au nom des gardes nationales fédérées : «Nous jurons de rester à jamais fidèles à la nation, à la loi et au roi, de maintenir de tout notre pouvoir la Constitution décrétée par l’Assemblée nationale et acceptée par le roi et de protéger conformément aux lois la sûreté des personnes et des propriétés, la circulation des grains et des subsistances dans l’intérieur du royaume, la prescription des contributions publiques sous quelque forme qu’elle existe, et de demeurer unis à tous les Français par les liens indissolubles de la fraternité».
Après La Fayette, c’est au tour du président de l’Assemblée de prêter serment au nom des députés et des électeurs.
Enfin, le roi prête à son tour serment de fidélité aux lois nouvelles : «Moi, roi des Français, je jure d’employer le pouvoir qui m’est délégué par la loi constitutionnelle de l’État, à maintenir la Constitution décrétée par l’Assemblée nationale et acceptée par moi et à faire exécuter les lois». La reine, se levant et montrant le Dauphin : «Voilà mon fils, il s’unit, ainsi que moi, aux mêmes sentiments».
Malgré la pluie qui clôture la journée, le public retourne ravi dans ses foyers.

Discours de Victor Hugo au Sénat, séance du 3 juillet 1880.

C’est son troisième discours en vue d’obtenir le vote de l’amnistie des Communards. Il y fait le lien avec l’autre débat du moment, voté le 6 juillet, celui du jour fixé pour la fête nationale.

J’appellerai seulement votre attention sur un fait. Messieurs, le 14-Juillet est une fête ; votre vote aujourd’hui touche à cette fête. Quelle est cette fête ? Cette fête est une fête populaire. Voyez la joie qui rayonne sur tous les visages, écoutez la rumeur qui sort de toutes les bouches. C’est plus qu’une fête populaire, c’est une fête nationale. Regardez ces bannières, entendez ces acclamations. C’est plus qu’une fête nationale, c’est une fête universelle. Constatez sur tous les fronts, anglais, espagnols, italiens, le même enthousiasme ; il n’y a plus d’étrangers.

Messieurs, le 14-Juillet, c’est la fête humaine. Cette gloire est donnée à la France, que la grande fête française, c’est la fête de toutes les nations. Fête unique. Ce jour-là, le 14-Juillet, au-dessus de l’assemblée nationale, au-dessus de Paris victorieux, s’est dressée, dans un resplendissement suprême, une figure, plus grande que toi, Peuple, plus grande que toi – l’Humanité ! (Applaudissements)

Oui, la chute de cette Bastille, c’était la chute de toutes les Bastilles. L’écroulement de cette citadelle, c’était l’écroulement de toutes le tyrannies, de tous les despotismes, de toutes les oppressions. C’était la délivrance, la mise en lumière, toute la terre tirée de toute la nuit. C’était l’éclosion de l’homme. La destruction de cet édifice du mal, c’était la construction de l’édifice du bien. Ce jour-là, après son long supplice, après tant de siècles de torture, l’immense et vénérable Humanité s’est levée, avec ses chaînes sous ses pieds et sa couronne sur sa tête.

Eh bien, messieurs, ce jour-là, on vous demande de le célébrer de deux façons, toutes deux augustes. Vous n’y manquerez certainement pas. Vous donnerez à l’armée le drapeau, qui exprime à la fois la guerre glorieuse et la paix puissante, et vous donnerez à la nation l’amnistie, qui signifie concorde, oubli, conciliation, et qui, là-haut, dans la lumière, place au-dessus de la guerre civile la paix civile. (Très bien ! – Bravos.)

Le 14-Juillet a marqué la fin de tous les esclavages. Ce grand effort humain a été un effort divin. Quand on comprendra, pour employer les mots dans leur sens absolu, que toute action humaine est une action divine, alors tout sera dit, le monde n’aura plus qu’à marcher dans le progrès tranquille vers l’avenir superbe.

Messieurs, ce sera un double don de paix que vous ferez à ce grand pays : le drapeau, qui exprime la fraternité du peuple et de l’armée ; l’amnistie, qui exprime la fraternité de la France et de l’humanité.

Rendons grâce à la République.

Victor Hugo.

Réécriture de la Marseillaise :

interprétées par Graeme Allwright :
” Pour tous les enfants de la terre
Chantons amour et liberté.
Contre toutes les haines et les guerres
L’étendard d’espoir est levé
L’étendard de justice et de paix

Rassemblons nos forces, notre courage
Pour vaincre la misère et la peur
Que règnent au fond de nos coeurs
L’amitié la joie et le partage

(Refrain)
La flamme qui nous éclaire
Traverse les frontières
Partons, partons, amis, solidaires
Marchons vers la lumière.”

Paroles: Graeme Allwright, Sylvie Dien 2005