Une émission “Des Noirs et des hommes”
Réalisateur : Amélie Brunet, Philippe Goma.
rediffusée

 

  • Le 18/08 à 00:01 sur LCP / PS
  • Le 26/08 à 15:01 sur LCP / PS  Une critique du Nouvel Observateur.

La patrie des droits de l’homme a toujours eu le plus grand mal à concilier l’image qu’elle veut donner d’elle-même et son histoire : deuxième empire colonial au monde (après l’Angleterre), pratique intensive de la traite négrière, légitimation de la possession d’esclaves par le Code noir.
Tout cela a laissé des traces : d’une part, la foi dans le « métissage, avenir du monde » ; de l’autre, les pratiques discriminatoires quotidiennes, notamment dans le domaine de l’embauche, du logement, de l’orientation scolaire.
Selon Françoise Vergès, présidente du Comité pour la Mémoire de l’Esclavage, « une ligne de couleur traverse la citoyenneté française ». Nous retrouvons le même clivage : d’un côté, le blanc, «couleur tellement naturelle qu’elle en devient invisible » ; de l’autre, le noir, plus ou moins différencié selon la personne qui regarde. « Si un Blanc entre chez mon coiffeur, il ne voit que des
Noirs ; si un Antillais entre, il ne voit que des Africains ; si un Africain entre, il ne voit que des Congolais », note l’historien François Durpaire. De la même façon que le Blanc crée le nègre, comme l’a dit le psychiatre antillais Frantz Fanon, être considéré comme noir dans l’espace français constitue une « expérience sociale » souvent stigmatisante, estime l’historien Pap Ndiaye, auteur de  “la Condition noire” (Calmann-Lévy).
Il ne suffit pas d’applaudir à l’élection de Barack Obama à la présidence des Etats-Unis, il faudrait aussi souhaiter que la vie politique se renouvelle et engager des réformes en ce sens. «Est-ce que cette démocratie est représentative de l’ensemble de la population ? » : telle est la question que se posent les jeunes s’ils allument leur téléviseur un mercredi après-midi et tombent
sur les débats de l’Assemblée nationale. Mais forcer la diversité dans les lieux où elle n’a pas cours – le monde politique, les grandes entreprises, les écoles qui forment les élites – scandalise les gardiens de l’orthodoxie, qui rejettent toute politique d’ouverture sociale au nom de l’égalitarisme républicain.
« Ce qui me paraît essentiel, c’est de reconnaître l’existence de difficultés.
Pour améliorer la situation des minorités, il faut des données quantitatives », note Pap Ndiaye, d’accord sur ce point avec le Conseil représentatif des Associations noires.
Mais la mesure de la diversité est un sujet tabou en France. Et celle de la discrimination ethnique, du même  coup, plus improbable.
Eric de Saint Angel © Le Nouvel Observateur