vu dans les DNA Bischwiller

Des gendarmes « sanctuarisent » le lycée Goulden à Bischwiller
« Les gendarmes, ça fait bizarre, on n’a pas l’habitude ! » : à Bischwiller, des élèves scrutent les dix militaires contrôlant des véhicules devant le lycée professionnel, un établissement « sanctuarisé » dans le cadre du dispositif Sages mis au point par la direction de la gendarmerie.

Ce contrôle, destiné à rendre visible la présence des uniformes « bleus », est déployé depuis mi-mars dans le cadre du programme de « Sanctuarisation globale de l’espace scolaire » (Sages) par les gendarmes de Bischwiller devant l’un des quatre établissements secondaires de cette ville de 13 500 habitants, au nord de Strasbourg, soit le lycée professionnel Goulden.
Conçu après plusieurs actes de violences à l’école en France, Sages a été activé au niveau national en septembre dans 184 établissements « sensibles », dont les noms n’ont pas été dévoilés afin de ne pas les « stigmatiser » (172 en zones police, 12 en zones gendarmerie) .
A midi, des élèves de ce lycée, situé face à un quartier sensible, sortent de cours et découvrent les gendarmes en action. Une trentaine de lycéens hésitent entre la surprise et l’amusement. Mais Alain, 17 ans, porte un regard sombre sur les militaires. « Je ne comprends pas pourquoi ils sont là. Le lycée est calme. La “génération 2010”, elle ne va pas chez les gendarmes, elle règle les problèmes elle-même », assure-t-il.

« Notre job, c’est de trouver les bons mots »

A la tête de la compagnie de gendarmerie de Haguenau, dont dépend Bischwiller, le chef d’escadron Yann Roudeilla admet la dimension répressive du dispositif Sages, tout en insistant sur le « volet prévention » : interventions devant les lycéens sur des thèmes tels que les addictions, le racket et les risques pénaux encourus.
« Notre job, c’est de trouver les bons mots pour (leur) faire comprendre » ce qu’ils ne doivent pas faire, explique l’officier.
Dans le cadre de Sages, deux femmes gendarmes « référentes » participent ainsi aux « cellules de veille » bimensuelles du lycée où l’on parle de cas d’élèves difficiles et des problèmes de sécurité.
Les militaires sont aussi amenés à prendre contact avec les parents et peuvent le cas échéant se rendre chez eux pour discuter des difficultés rencontrées avec leurs enfants. « Cela permet de rétablir le lien, souvent totalement rompu » entre la famille et le lycée, observe le proviseur Francis Navlet.
Des patrouilles conjointes de gendarmes et de policiers municipaux sont organisées quasiment tous les jours aux abords de cet établissement de 450 élèves qui, sans être classé sensible, bénéficie depuis 2008 d’un plan de prévention de la violence.
Bagarres entre élèves, alcool, intrusions, dégradations y sont en effet récurrentes. 73 % des élèves viennent de milieux défavorisés, « le taux le plus élevé de l’académie », note M. Navlet, un chiffre qu’il explique par le « contexte économique » de Bischwiller marqué par des fermetures d’entreprises ces dernières années. Mais, assure-t-il, depuis le déclenchement de Sages, « on sent très, très nettement un mieux ».
Selon lui, le dispositif a été bien accueilli par les enseignants du lycée. A l’inverse, Philippe Derrien, président de la FCPE (première fédération de parents d’élèves) du Bas-Rhin, fustige une dérive vers un « lycée forteresse » et regrette que le « manque de personnel » scolaire soit « compensé par des gendarmes ».

Édition du Mardi 6 avril 2010

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