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Mercredi 5 juin 2013, Clément Méric, un jeune syndicaliste et militant antifasciste originaire de Brest a été attaqué près de la gare Saint-Lazare à Paris, alors qu’il sortait d’un magasin de vêtements. Des fascistes, proches des Jeunesses Nationalistes Révolutionnaires, la milice de Serge Ayoub, l’ont roué de coups. Transféré aux urgences, il était en état de mort cérébrale et est déclaré mort à 17h22 le lendemain.
Nous exprimons notre solidarité et notre soutien à sa famille, ses camarades de lutte et ses proches. Nous appelons l’ensemble des travailleurs, des travailleuses, des militants progressistes et révolutionnaires à manifester samedi à 14h00 à Bréguet-Sabin, à Paris.
Nous n’oublierons pas Clément. Mais nous pensons aussi à toutes les victimes anonymes des fascistes.
Ce crime est un précédent, c’est le premier depuis une longue période qui est directement imputé à l’extrême droite. C’est en cela qu’il fait précédent. Combien d’autres crimes, exactions, assassinats, tortures ou ratonnades on été commis?
Tous camouflés par la police, les préfectures, l’état. Ces affaires racistes et fascistes étaient tues, ou transformés en rixes ayant dégénéré, niant leur caractère politique. Même là, les médias parlent d’un “étudiant” et de “skinheads”. Ces crimes, nous ne les inventons pas. Nous avons vu les traces indélébiles des tortures commises en marge de bals de campagne, des immigrés nous ont raconté les tentatives de meurtres, et ce sont ceux qui en ont réchappé qui ont pu nous les raconter.
La mort de Clément Méric est symptomatique d’une période d’activité et d’excitation accrue de l’avant-garde de la réaction ; l’éventail large et hétéroclite des groupuscules fascistes s’en est en effet donné à cœur joie récemment, investissant la rue et profitant de la mobilisation homophobe des « manifs pour tous » pour élargir leur audience, recruter, avec la complicité des médias. Les rues de Lyon, Tours, Nice, Paris et tant d’autres villes en ont fait les frais.
Les agressions fascistes n’ont pas pour vocation l’élimination méthodique de tous les militants. Par des agressions ciblées, ils cherchent à briser le moral du milieu militant progressiste, à le pousser à une retraite désordonnée face à leurs actions terroristes. Il veulent nous pousser à rester cloîtrés chez nous, nous empêcher d’occuper la rue, à l’isolement et l’inaction. Ils cherchent aussi ce que notre attention soit fixée sur eux, afin que nous nous epuisions dans ce combat au lieu de lutter pour renforcer notre camp, celui du prolétariat, de mener la lutte contre les offensives attaquant nos droits sociaux.
Bien entendu, il est hors de question de laisser les fascistes agir impunément. Nous-mêmes avons payé le prix (négligeable par rapport à celui des camarades parisiens) de la lutte antifasciste, avec 6 arrestations à Clermont et Lyon depuis notre création (qui remonte au mois de Janvier). La question de savoir comment mener la lutte antifasciste n’est pas à prendre à la légère, il s’agit d’une question stratégique.
Nous n’appellerons pas à la dissolution des groupes fascistes au prétexte qu’ils sont violents et antirépublicains
Le PG s’est précipité comme un vautour sur cette affaire, laissant entendre que Clément était militant de ce parti. Ils ont cherché à spolier de leur parolecelles et ceux qui étaient les plus légitimes pour s’exprimer, l’Action Antifasciste de Paris Banlieue et par là même souillé la mémoire de Clément qui était un militant anarchiste.
Le PG et les autres organisations réformistes en appellent au Ministère de l’Intérieur et exigent de Valls la dissolution des groupes antirépublicains et violents. Nous ne souscrivons absolument pas à ces revendications.
Il existe certes des contradictions entre la bourgeoisie “démocratique” et celle qui est derrière les nervis fascistes. Quand ils deviennent incontrôlables, l’état leur rappelle qui est leur maître. Cependant, les contradictions entre les bourgeois de gauche et les fascistes sont moindres par rapport à ce qui, nous, nous oppose à la bourgeoisie dans son ensemble. Car nous défendons l’intérêt du prolétariat, dont l’intérêt est intégralement antagonique à celui de la classe dominante.
Cinquième ou sixième république bourgeoise, c’est toujours la même dictature
Exiger la dissolution des groupes antirépublicains et violents, c’est tirer une balle dans le dos de toutes les organisations militant pour la révolution dans l’Etat Français. En effet, nous-mêmes ne nous ne sommes pas républicains, nous sommes communistes. La république bourgeoise, nous voulons l’anéantir. La République ne peut plus qu’apporter la réaction sur toute la ligne. Les droits démocratiques servent de paravent à la dictature de la bourgeoisie. Le capitalisme, dont la bourgeoisie est la classe dominante, n’en finit plus de pourrir, de tomber en déliquescence. Prête à tout pour maintenir sa domination, la bourgeoisie est forcée de démasquer la nature dictatoriale de son pouvoir, par exemple pour faire passer en force les réformes, réprimer les grèves ou les organisations progressistes et révolutionnaires. Elle utilise pour cela les armes juridiques, policières et les groupes fascistes, qui ne sont que des nervis à son service. « Le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à apparaître et dans ce clair-obscur surgissent les monstres », écrivait Gramsci.
Face à la bourgeoisie, nous n’avons aucun problème à employer la violence
Argumenter sur le fait que “les fascistes sont méchants parce qu’ils sont violents et que nous, nous sommes gentils parce que”… est grave également. Nous n’avons pas envie que l’Etat nous considère comme inoffensifs. Nous portons l’intérêt du prolétariat, qui est de renverser l’Etat bourgeois, le capitalisme. Nous n’avons aucun problème à théoriser le fait que nous devons utiliser la violence pour le faire. Bien sûr, notre violence n’est pas dirigée, comme celle des fascistes, contre les masses populaires, mais contre les forces qui entravent la marche inéducable vers la révolution, et qui n’ont pas envie d’abandonner le pouvoir, sont prêts à tout pour s’y accrocher. Affirmer que nous ne sommes pas violents, c’est abandonner toute perspective de changement révolutionnaire.
Après l’arrestation de 25 militants lyonnais, Doutre, adjoint à la sécurité de la préfecture du Rhône laissait entendre qu’il allait écraser tous les “groupes violents”. Alors que la préfecture du Rhône a toléré des semaines de manifestations quotidiennes fascistes, il a suffit d’une mobilisation antifasciste pour qu’il procède à ces interpellations et nous menace. Appeler à la dissolution des groupes antirépublicains et violents, c’est tendre la matraque à la police.
Certes, l’interdiction des groupes fascistes en tant que groupes fascistes resterait une bonne chose, bien que peu efficace. La seule véritable dissolution des groupes fascistes exigerait une épuration en règle au sein de l’appareil d’état. Car c’est de la que nait le fascisme, du coeur même de l’appareil d’état. Or, le passage à un régime fasciste n’est pas à l’ordre du jour et les contradictions entre les différentes parts de la bourgeoisie restent faibles. Nous n’aurons donc qu’une interdiction superficielle.
Nous ne troquerons pas notre indépendance de classe contre d’illusoires promesses
Hollande, Valls sont responsables de la mort de Clément. Ils ont consciemment laissé trainer les débats du mariage pour tous et ont permis le déferlement des réactionnaires dans la rue. Comme Mitterrand en son temps, ils agitent le spectre de l’extrême-droite. Ils peuvent ainsi se faire passer pour des progressistes, eux qui mènent une politique anti-ouvrière avec l’adoption de l’ANI, raciste en continuant les expulsions massives de sans papiers et de roms. Ils ont joué avec le feu et c’est l’un des nôtres qui à été tué. Eux, ils sont en sécurité, la rue n’est pas le terrain des organisations bourgeoises.
Nous n’avons pas – malgré tous nos efforts – été capables d’avoir été assez persuasifs pour avoir été capables, par exemple de dissuader les manifestations homophobes. Nous n’avons pas non plus réussi à engager une véritable lutte contre l’ANI. Nous sommes faibles, et bien que faibles, nous sommes physiquement menacées par les groupes fascistes. Cependant, ce n’est pas en appelant à ceux qui possèdent aujourd’hui les moyens de coercition, le monopole de la violence, l’état, que nous nous renforcerons. Nous serons amenés à toujours plus de compromis, puis à des compromissions, à nous retrouver entravés par une alliance avec des forces bourgeoises qu’il ne faut pas froisser.
Nous ne sommes peut être pas très nombreux et nombreuses mais nous avons pour nous d’immenses réserves. Alors que la bourgeoisie s’affaiblit, dépérit, cela la rendant d’autant plus agressive, les masses prolétariennes et populaires se renforcent. Elles sont certes abattues par des décennies d’hégémonie culturelle et politique de la bourgeoisie. À nous de faire notre travail pour leur redonner conscience de leurs intérêts de classe, de les organiser et d’engager à leur côtes la lutte contre la bourgeoisie. « La vie l’emportera » si nous savons faire prospérer les germes de la lutte des classes.
Unité à la base et dans l’action contre les actes terroristes des fascistes
Pour nous, l’antifascisme n’est pas une question qui se règle dans les locaux des préfectures, des ministères ou des mairies, mais uniquement par une activité indépendante de mobilisation et d’organisation pour la défensive de classe. Nous sommes pour faire front contre les fascistes, comme nous l’avons fait jusqu’à aujourd’hui, à la base et dans l’action, et non pas par des tractations au sommet dans des bureaux cossus de la bourgeoisie.
Nous apprécions que les camarades parisiens de Clément ne comptent pas se laisser bâillonner par tous les appareils réformistes parisiens.
Aujourd’hui plus que jamais, nous avons besoin d’une lutte antifasciste inscrite dans le combat classe contre classe.
Face à la terreur fasciste, soyons toujours plus déterminés à poursuivre nos objectifs révolutionnaires ! Le meilleur hommage que nous puissions rendre à Clément, c’est de refuser de baisser la tête et de poursuivre la lutte !
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