Alors que le débat au Parlement grec se déroule ce mercredi après-midi 15 juillet, il est important de prendre connaissance de la déclaration du ministre de la Reconstruction productive, Panagiotis Lafazanis, et celle d’une majorité absolue du Comité central de Syriza, ce d’autant plus que la tendance à marginaliser le parti de coalition qu’est Syriza à l’avantage des instances exécutives est affirmée depuis quelques mois.
Le seul argument mis en avant par Alexis Tsipras dans son intervention télévisée du 14 juillet avait trait à une possible ouverture pour une restructuration dite importante de la dette. Une restructuration qui n’entrerait en vigueur qu’une fois le coup de massue – ou les obus de la Grosse Bertha (Dicke Bertha) – des contre-réformes aurait écrasé la société. Ce genre de promesse avait déjà été fait en 2012 lors du second mémorandum. Angélique Kourounis, correspondante de Radio France à Athènes, utilisait une métaphore illustrant le dilemme quotidien auquel font face les Grecs: manger du yaourt blanc, qui est exonéré de la TVA à 13%, ou manger du yaourt sucré, au prix salé par une TVA à 13%.
Au sein même des instances européennes, les prévisions sur l’économie grecque sont claires: une nouvelle récession entre 2 et 4%. Donc, une impossibilité de dégager un excédent primaire (solde budgétaire en pour cent du PIB avant le service de la dette) de 3,5% en 2018. Cet objectif a une tonalité politique, comme l’ensemble du diktat. Et les analyses macroéconomiques prévisionnelles de cet accord sont aussi fantaisistes que les prédictions sur les taux de change à 10 ans. Aujourd’hui, la société grecque est enfoncée dans une crise analogue à celle des années 1930 où se mélangent la colère, la résistance, le mécontentement, la déprime. A quoi s’ajoute une crise de leadership du côté des partis de la droite (Nouvelle Démocratie, Pasok, To Potami) et de Syriza. Simultanément, l’Etat est désargenté et les banques sont plongées dans une situation d’illiquidité, largement pilotée par la politique de la BCE. Une façon de mettre l’économie grecque sur la voie du Grexit, ce à quoi plus des acteurs économico-politiques de l’Union européenne ont déjà réfléchi.
La capacité d’initiative, dans cette situation difficile et complexe, avant tout de la gauche de Syriza, mais aussi de composantes d’Antarsya – à laquelle il faut ajouter la fraction organisée combative du mouvement syndical (META) – va jouer un rôle tout à fait important pour tracer les prochains pas, ceux nécessaires à toute perspective effective. Sauf à penser que des plans alternatifs parachutés tomberaient à l’endroit et au moment voulu, ce que les expériences militaires démentent. Enfin, les néonazis «anti-austérité» d’Aube dorée, qui reste le troisième parti dans les sondages, peuvent apparaître – si les dynamiques centrifuges dans la société grecque aboutissent à masquer sur une certaine durée les affrontements de classes – comme un recours pour des secteurs sociaux. Les partis ayant constitué les précédents gouvernements, tout en votant ce troisième mémorandum, pourraient affirmer: «Si l’acceptation de cet accord est dictée par la volonté de rester dans le cercle de l’euro, nous aurions pu le faire à moindre prix.» La crédibilité de cette affirmation n’est pas grande aujourd’hui, mais elle peut s’accroître.
La responsabilité reposant sur les épaules de la «gauche de Syriza» et des forces qui peuvent agir de manière unitaire rend encore plus nécessaire une solidarité multiforme de la part des «éléments» de la gauche radicale européenne. Dans le secteur public, des débrayages ont eu lieu dans la santé, les transports, l’administration, même si la manifestation entre midi et 15 heures était limitée. Par contre, sur la place Syntagma, et face au Parlement, la manifestation de ce soir, dès 20h30, est importante. Dans le haut de la place se concentrent la gauche de Syriza, les forces syndicales; dans le bas, le PAME, le front du KKE. Au moins ils sont réunis, sur le même lieu. A cette occasion, la réapparition des forces de police, à sa façon, est une indication de la nouvelle phase. (Réd. A l’Encontre)
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Grèce. «Retirez l’accord!»
Déclaration de Panagiotis Lafazanis
«L’accord qui a été signé avec les «institutions» est inacceptable et ne mérite pas d’être pris en charge par un parti radical, comme Syriza, et un gouvernement de combat qui a promis l’abolition des mémorandums [de 2010 et 2012] et de l’austérité.
Les prétendus partenaires – et avant tout l’establishment allemand – se sont comportés envers notre pays comme s’il était leur colonie et avec la froideur brutale d’extorqueurs et d’«assassins de la finance».
Avec cet accord, le mandat populaire et le fier «Non» du peuple grec lors du référendum [du 5 juillet] vont être annulés dans la pratique.
Cet accord pourrait passer par le Parlement, avec l’aide des voix de la Nouvelle Démocratie, le Pasok [Mouvement socialiste panhellénique] et To Potámi [La Rivière, dont le leader, construit par le système oligarchique, est Stavros Theodorakis]. Cependant, cet accord ne passera pas auprès du peuple qui va l’annuler dans la pratique au moyen de son unité et de ses luttes.
Le gouvernement et le premier ministre lui-même, encore aujourd’hui, ont le droit et la possibilité de changer de position et de retirer l’accord avant que des décisions finales et définitives soient prises au Parlement [mercredi 15 juillet et à l’aube du 16, selon les normes de fonctionnement de la Vouli].
La Grèce avait et a une solution alternative à cet accord.
Le dilemme présenté par les créanciers – capitulation ou la destruction de l’économie – est erroné et terroriste. Il s’est effondré dans la conscience populaire.» (14 juillet 2015)
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Déclaration par 109 membres du Comité central de Syriza
Dans une déclaration publiée aujourd’hui 15 juillet, 109 membres sur 201 du Comité central du Syriza ont pris position contre l’accord qui a été signé par le gouvernement et les créanciers, l’appelant «un protocole [mémorandum] à caractère d’assujettissement onéreux et d’humiliation».
L’appel des 109 demande que le gouvernement «ne se soumette pas à l’ultimatum extorqueur des créanciers», tout en avertissant que l’accord n’est «pas compatible avec les idées et les principes de la gauche».
Les 109 exigent une convocation immédiate du Comité central. Il convient de noter que, malgré la décision quasi unanime du Secrétariat politique de Syriza, le Comité central n’a pas été appelé à se réunir jusqu’à présent [or, selon les signataires et les statuts, il est le seul à pouvoir mandater effectivement les membres de Syriza participant au législatif, raison pour laquelle, entre autres, des mesures disciplinaires ne peuvent être envisagées face aux opposants à l’occasion du vote; les composantes de la Plateforme de gauche organiseront une réunion publique le lundi 20 juillet pour présenter les éléments centraux de sa proposition alternative].
Cette position de la majorité des membres du Comité central est, entre autres choses, est un atout pour répondre à ceux qui se sont précipités afin d’exiger des mesures disciplinaires contre les députés et les cadres de Syriza s’opposant à l’accord. (Rproject)
Texte de la déclaration
«Le 12 juillet, un coup a été mis en œuvre à Bruxelles. Un coup qui a prouvé que l’objectif des dirigeants européens consistait à infliger une punition exemplaire à un peuple qui avait une vision d’une orientation différente, s’éloignant et allant au-delà du modèle néolibéral de l’extrême austérité. Un coup d’Etat qui vise directement toute notion de démocratie et de souveraineté populaire.
L’accord avec les «institutions» est le résultat de chantages à une strangulation économique immédiate C’est un nouveau mémorandum à caractère d’assujettissement onéreux et d’humiliation pour le pays et pour notre peuple.
Nous nous rendons compte de la pression suffocante qui a été exercée sur la partie grecque [sur les négociateurs, parmi lesquels Euclide Tsakalotos et Alexis Tsipras], mais néanmoins nous croyons que le fier «non» du peuple lors du référendum ne permet pas au gouvernement de se soumettre à l’ultimatum extorqueur des créanciers.
Cet accord n’est pas compatible avec les idées et les principes de la gauche. Mais plus important, il n’est pas compatible avec les besoins des classes populaires. Cette proposition ne peut pas être acceptée par les membres et les cadres de Syriza.
Nous demandons que le Comité central soit réuni immédiatement et nous appelons les membres, les cadres et les députés de Syriza de maintenir l’unité du parti, sur la base des décisions de notre Congrès et sur nos engagements programmatiques.» (15 juillet 2015)
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