Ramené·es à la frontière plutôt qu’à l’hôpital

L'hélicoptère du secours en montagne dépose une famille d'exilé·es au poste frontière, Montgenèvre, 16/01/2021 - ©Baptiste Soubra, Collectif la Faille

PGHM, familles 2 adultes, 2 enfants dt un de 25 jours

Communiqué de presse du Collectif Maraude du Briançonnais

Ramené·es à la frontière plutôt qu’à l’hôpital

Samedi 16 janvier 2021, un peu avant 16 heures, l’hélicoptère du secours en montagne a déposé une famille exilée au poste de frontière de Montgenèvre au lieu de l’amener à l’hôpital. La manière dont s’est déroulé ce secours, à plus de 2000m d’altitude, d’un nourrisson de quelques jours, de son frère d’à peine un an et de leurs parents constitue une nouvelle escalade du gouvernement français dans le mépris des droits fondamentaux et la mise en danger des personnes exilées.

Les maraudeuses et maraudeurs présent·es à Montgenèvre samedi sont resté·es stupéfait·es en voyant l’hélicoptère se poser devant le poste de la police de l’air et des frontières (PAF) et faire descendre la famille. Ce n’est pas une pratique habituelle des secours en montagne et cela constitue clairement une mise en danger de cette famille.
« Il est impossible d’estimer l’état de santé d’un nourrisson à l’intérieur d’un hélicoptère. Ils auraient dû être emmené·s à l’hôpital ! D’ailleurs ils l’auraient certainement été s’ils n’étaient pas exilé·es » – Justine Wyts, médecin généraliste bénévole maraudeuse pour Médecins du Monde, ayant assisté à la scène.

Ce samedi, cette famille et 18 autres exilé·es sont resté·es une dizaine d’heures dans les locaux de la PAF. Une fois n’est pas coutume, les services de la PAF ont, en pleine nuit, confié à l’association Tous Migrants la charge de mettre à l’abri ces 22 personnes :11 adultes dont 4 personnes âgées et 11 enfants. « Je veux les confier à votre association » a dit un policier à une bénévole de Tous Migrants en l’appelant autour de 1h du matin. C’est seulement le lendemain, dans la presse, que nous apprenons qu’avant de les relâcher, la préfecture leur à délivrer des Obligations de Quitter le Territoire Français, et des Interdictions de Retours sur le Territoire Français.
Un des bénévoles appelé par la PAF cette nuit-là, était convoqué le 18 janvier pour une audition libre au motif d’aide à l’entrée de personnes en situation irrégulière, suite à une interpellation le 11 janvier. Cette audition libre a étrangement été annulée suite aux évènements du 16 janvier.

L’État militarise la frontière, traque les exilé·es et les reconduit quasi systématiquement en Italie sans même vérifier s’ils souhaitent demander l’asile en France. Cela constitue une violation du droit d’asile, des droits fondamentaux des personnes exilées à la frontière et, comme en témoigne la multiplication des secours en montagne et des hospitalisations, poussent ces derniers à prendre de plus en plus de risques pour rentrer en France.

Au lieu d’accueillir, l’État français rejette le problème, ferme les yeux et ose réprimer les citoyennes et citoyens qui appliquent le principe de fraternité et de solidarité. Ces dernières semaines les forces de l’ordre présentes à la frontière italienne ont augmenté la répression contre les Solidaires. Les contrôles arbitraires, notifications d’amendes, auditions libres et autres pressions envers les citoyens et citoyennes qui chaque soir essaient de porter assistance aux exilé.es se sont multipliés.
« La nuit du 8 janvier 2020, j’ai été contrôlé 4 fois par deux équipes de gendarmes alors que je maraudais dans Montgenèvre. Cette même soirée, j’ai été notifié de trois amendes alors que j’étais en possession de mon ordre de mission et de mon attestation dérogatoire de déplacement délivrés par l’association Tous Migrants ». – Un maraudeur

Les maraudeurs et maraudeuses dénoncent cet harcèlement qui n’a pour but que de fragiliser les dynamiques de solidarité qu’elles et ils ont construites depuis 2015. Entre le 8 et le 13 janvier, près d’une trentaine de notifications d’amende pour non-respect du couvre-feu ont été faites à l’encontre des maraudeurs et maraudeuses. Faut-il rappeler que les maraudes citoyennes, ainsi que l’unité mobile de mise à l’abri de Tous Migrants et Médecins du Monde rentre dans le cadre des dispositifs d’aides maintenus pendant le couvre-feu ? Du moins c’est ce que confirme Emmanuelle Wargon dans le communiqué du ministère chargé du logement daté du 17 octobre 2020 : « les maraudes et équipes mobiles auront leur activité maintenue grâce aux attestations que salariés et bénévoles pourront remplir et faire valoir ». La Préfecture des Hautes-Alpes et le Procureur sont informés de ces dispositifs. Les séries de contrôles et d’amende envers les maraudeurs et maraudeuses sont donc totalement abusives et doivent cesser. La solidarité ne peut être criminalisée.

L’unité mobile de mise à l’abri a permis depuis le mois de septembre de porter assistance à 196 personnes dont :
au moins 12 familles
plus d’une cinquantaine d’enfants, dont 9 bébés (un avait 12 jours) et de nombreux enfants en bas âge ;
une dizaine de personnes âgées ;
4 mineurs non-accompagnés

Les pompiers et unités de secours n’arrivent pas toujours à temps. En militarisant la frontière et en criminalisant la solidarité, l’État se rend responsable des drames qui ont lieu aux frontières. Il n’est pas trop tard pour ouvrir les yeux. Le gouvernement français doit prendre ses responsabilités et cesser cette politique illégale, illégitime, dangereuse et barbare. Il en va de vies humaines.

Le Collectif Maraude,
constitué de plus de 200 citoyennes et citoyens
et des associations Tous Migrants, Médecins du Monde

Contacts :
Will, un maraudeur présent le 16 janvier 2021 : 06 26 54 78 26
Agnès, Tous Migrants : 06 37 75 75 77
Pamela Palvadeau, Médecins du Monde : 06 99 23 97 10, pamela.palvadeau@medecinsdumonde.net

Nous mettons à disposition à ce lien des photos (qualité web) des évènements de samedi 16 janvier et plus largement du dispositif policier à la frontière. Nous vous remercions de légender les images avec les faits qu’elles illustrent et de bien créditer les photographes avec les informations indiquées dans les nomenclatures des photos.
Pour obtenir les images en meilleure qualité, merci de contacter : baptiste@collectiflafaille.org

Similar posts
  • Déni démocratique au Parlement et dan... “NOUS AUSSI ON VA PASSER EN FORCE” Dès 18h, place Kléber, on constatait la présence forte de cars de gendarmerie, près de l’Homme de fer, de cars de police, près des Galeries Lafayette, et de gendarmes à pied, surarmés, circulant au milieu des rares personnes présentes 30 minutes avant le départ supposé de la manifestation. [...]
  • Nouvelle tactique policière à Strasbo... Suite à la manifestation réprimée et dispersée par la police nationale selon l’ordre de la préfète Josiane Chevalier (“au fond du Rhin…”), Danielle, une manifestante a été interpellée et mise en GAV. A 8h10, elle y était toujours enfermée. Grosses manœuvres policières ce soir place Kléber. Après avoir coupé le cortège de 300 du côté [...]
  • Chaud devant, la seconde manifestatio... Prise de parole Sud-Solidaires, FO, CFE-CGC https://fb.watch/jluIqtVVOg/ Emmanuel Fernandez député LFI Seconde manifestation sauvage à Strasbourg. De fait il était impossible de respecter le délai de 3 jours francs de la préfecture. Plus d’un millier de personnes se sont élancées vers la place Broglie et la préfecture après les discours de Sud-Solidaires et de FO. [...]
  • “Nous aussi, on passe en force&... Strasbourg. Dès 16 h, un cortège étudiant manifeste sur le campus de l’Esplanade pour mobiliser les amphis réouverts, puis ils-elles tiennent ne Ag au Portique. Vers 17h, le Collectif ” On crèvera pas au boulot” mobile les réseaux pour un rassemblement à 18h30 place Kléber. A partir de 18h, les premiers manifestants se retrouvent au [...]
  • Germain Roesz, peintre et poète, à la... Dimanche dernier, Germain Roesz qui expose en ce moment à l’ex-ferme Bussière, derrière le Parc Pourtalès, à la Robertsau, présentait aussi un récital de poésies de sa composition devant une petite salle bien remplie d’ami.e.s et d’amateurs. De longs poèmes, extraits de ses ouvrages publiés aux Lieux Dits à Zone d’Art, près du Pont du [...]