Le prochain cercle de silence de Strasbourg aura lieu lundi 30 août 2010, Place Kléber à 18 heures, afin de manifester notre refus d’une politique de criminalisation des personnes démunies de papiers.
Il sera dédié à la mémoire des quatre familles roms de Strasbourg expulsées en Hongrie le 14 janvier dernier ainsi qu’aux quatre autres familles roms hongroises toujours présentes à Strasbourg et qui ont désormais peur d’une expulsion imminente suite aux déclarations récentes proférées par le gouvernement à l’encontre de leur communauté.
Rappelons nous, ces huit familles avaient fui ensemble le même village de Hongrie. Tous racontaient la même histoire : ils sont là pour échapper à la terreur exercée par des groupes de nationalistes, tirant sur leurs maisons la nuit et menaçant de tous les exterminer. Au matin, les murs sont marqués par les impacts de balles et des inscriptions haineuses, des croix gammées. Appelée au secours, la police ne semblait ni pouvoir ni vouloir les protéger. Cela ne les avait pas franchement étonnés sachant que le maire du village et un ancien policier avaient fondé l’antenne locale de la Garde Nationale, la branche armée du parti politique extrémiste dont le mot d’ordre est l’extermination des Roms. Après plusieurs mois de soumission à ce régime de terreur, ils ont vu arriver le maire, venu leur fixer un ultimatum : disparaître dans les flammes de leur maison ou la lui vendre et partir pour toujours. La plupart lui ont alors vendu leur maison pour une bouchée de pain et tous sont partis à Strasbourg, capitale des droits de l’homme, pour demander l’asile.
Quatre d’entre elles ne partiront pas pour toujours puisque quelques mois plus tard, la France les renverra de force en Hongrie suite au rejet de leur demande d’asile par l’OFPRA qui n’a même pas pris la peine de les convoquer. De leur devenir, nous ne savions pas grand chose sauf qu’elles s’étaient regroupées dans l’unique maison qui n’avait pas été vendue et qui avait été pillée depuis et qu’ils survivaient là, entassés, sans aucun chauffage durant cet hiver qui fut interminable en Hongrie comme en France.
Quant aux quatre autres familles encore à Strasbourg, elles sont toujours à ce jour en attente d’une réponse à leur demande d’asile, plus d’une année plus tard. Au bord de l’épuisement et épuisant l’aide humanitaire, minés par cette incertitude qui dure, ils sentent bien que ici non plus on ne veut pas vraiment d’eux. Qu’ici non plus leurs enfants n’auront pas d’avenir. Qu’ici aussi, on parle mal d’eux. Ils ont entendu les dernières déclarations du Président de la République. Persécutés depuis la nuit des temps, ils savent reconnaître les signes et ils comprennent que leur communauté n’est plus en sécurité en France.
Certains d’entre eux commençaient à se dire «On peut pas continuer à vivre indéfiniment sans droit à rien dans l’attente d’une réponse, peut-être vaudrait-il mieux rentrer». Puis, la semaine dernière, un coup de téléphone de Hongrie leur donne le sentiment d’être comme des rats pris au piège : parmi leurs compatriotes expulsés, deux adolescents tellement roués de coups qu’ils ont dû être transportés, inconscients, à l’hôpital où ils se trouvent toujours : fractures multiples, hémorragie interne. Et puis, Férenk, le plus fragile d’entre eux, celui qui cumule tous les traits du bouc émissaire, son handicap mental et ses origines roms, a été violemment tabassé déjà trois fois depuis son retour.
Depuis ce coup de téléphone venu de Hongrie, ils ont peur de la réponse de l’OFPRA qu’ils attendent pourtant depuis des mois et des mois. Car, si elle est négative, ils savent bien que la police des frontières françaises les expulsera manu militari comme elle l’a fait pour les autres ce matin glacial de janvier 2010.
Leur besoin de sécurité et de protection est inaudible dès lors que leur communauté est stigmatisée comme une race inférieure et dangereuse. Ils savent d’instinct qu’ils sont parmi les premières victimes, mais pas les dernières, de la violation de l’article 1er de notre constitution qui assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens, sans distinction d’origine, de race ou de religion.
Pour eux et pour tous ceux qui sont pourchassés, criminalisés, enfermés et expulsés pour le seul motif d’être démunis de papiers, nous continuerons à manifester notre protestation, et cela, tant qu’il le faudra.
PS : Grâce à notre ami Christophe, vous pouvez désormais découvrir notre site en devenir, en tapant : humilite.fr Vous y retrouverez, entre autres, la proposition de lettre ainsi que les adresses des parlementaires et sénateurs à qui faire part de nos graves inquiétudes concernant le projet de loi Besson relatif à « l’immigration, l’intégration et la nationalité » qui sera débattu à l’Assemblée Nationale en septembre prochain. Il est encore temps d’écrire pour éviter certaines dispositions qui représentent une véritable violation d’un état de droit. Après, il sera trop tard, la loi s’appliquera et les conséquences en seront dramatiques.
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