D’importantes coupures de courant dans la bande de Gaza perturbent la vie des habitants. Les personnes les plus durement touchées sont les patients des hôpitaux car ils sont tributaires des appareils, tout comme les centaines de personnes dont l’état nécessite régulièrement une dialyse.

Khader Saqr est couché sur son lit, les yeux à moitié fermés. Il pense à tout ce que sa santé ne lui permet plus de faire. Ce qui lui manque le plus, c’est de ne plus pouvoir jouer avec ses petits-enfants.

L’an dernier, la vie de Khader, 63 ans, a basculé lorsque fut diagnostiquée son insuffisance rénale. Et les coupures quotidiennes de courant dans le département d’hémodialyse de l’hôpital Al-Shifa à Gaza ne font qu’aggraver son état de santé.

« Il y a souvent des coupures de courant alors que nous recevons le traitement », explique Khader. « Tous les appareils s’arrêtent tant que le générateur ne se met pas en route. Sans électricité, notre sang ne circule plus. J’ai donc un problème à chaque fois qu’il y a une coupure de courant. »

Mohammed Shatat est à la tête du département de dialyse depuis dix ans. Selon lui, la situation s’est aggravée récemment. « Nous connaissons une crise de l’électricité depuis cinq ans mais les coupures sont devenues plus fréquentes ces derniers mois. Quand il n’y a plus de courant, le sang des patients se coagule et ils risquent facilement de s’anémier. En principe, nous pourrions remédier à cette situation en leur donnant un médicament pour faire monter leur taux d’hémoglobine mais nous ne disposons pas des médicaments voulus. »

Les coupures de courant détériorent le matériel médical

Chaque jour, la bande de Gaza est privée d’électricité durant sept heures en moyenne. Certains jours la coupure dure 12 heures. Lorsque le courant principal est coupé, les générateurs de secours prennent le relais dans les hôpitaux. Certains se mettent en marche automatiquement, mais d’autres doivent être actionnés manuellement et l’alimentation électrique ne démarre qu’au bout de quelques minutes. Lorsqu’un appareil de dialyse s’arrête durant le traitement, une infirmière doit pomper le sang manuellement pour éviter qu’il ne se coagule.

« Les séances de dialyse devraient durer quatre heures mais leur durée varie à cause des coupures de courant, les patients ne sont donc pas convenablement traités. À chaque coupure de courant, les infirmières doivent actionner les machines manuellement mais elles ne sont pas assez nombreuses pour tous les patients au moment où cela se produit, explique Shatat ».

Ces fluctuations de courant ont un impact très négatif sur les appareils eux-mêmes qui se cassent régulièrement. Trouver des pièces détachées pour les réparer prend souvent beaucoup de temps. Il est difficile de trouver des pièces détachées pour le matériel médical à Gaza et il faut parfois attendre plusieurs mois avant de pouvoir obtenir des pièces hors de la bande, » indique M. Shatat. « Entre-temps, nous avons moins d’appareils et traitons donc moins de patients.

Palina Asgeirsdottir est chargée de gérer le programme de santé du CICR à Gaza. Elle explique que plusieurs facteurs ont conduit à cette situation. « Des années de conflit armé et d’occupation font qu’il est extrêmement difficile d’assurer la maintenance et les réparations de routine du matériel de production d’électricité et du réseau électrique, et, à plus forte raison, d’accroître la capacité à répondre aux besoins croissants. »

La seule et unique centrale électrique dans la bande de Gaza a été partiellement détruite par les tirs israéliens en 2006. Du fait du blocus et de l’interdiction d’introduire des matériaux de construction dans la bande, il est généralement impossible d’effectuer des réparations et d’entretenir le réseau électrique. La centrale électrique et les générateurs de secours on besoin de carburant pour fonctionner. Les désaccords entre l’Autorité palestinienne à Ramallah et les autorités du Hamas à Gaza au sujet du paiement des factures de carburant ne font qu’aggraver la situation. En cas de retard dans la livraison du carburant, la centrale doit réduire sa production d’électricité ou tout arrêter.

Les pénuries de médicaments affectent la santé des patients

En plus des problèmes qu’ils doivent endurer avec les appareils de dialyse, les patients souffrant d’insuffisance rénale ne disposent pas des médicaments nécessaires qui ne sont pas disponibles à Gaza. Et ils ne sont pas les seuls, comme l’indique Mme Asgeirdottir. « Les patients souffrant de maladies chroniques ont besoin de certains médicaments. Citons par exemple les patients ayant subi une transplantation rénale, les patients hémophiles qui ont besoin des facteurs VIII et IX, ou les nourrissons et les enfants souffrant d’intolérance alimentaire et de problèmes digestifs qui ont besoin d’une nourriture spéciale. Les personnes atteintes d’un cancer voient leurs protocoles de traitement interrompus. Faute de médicaments, les patients souffrent. Ils peuvent même mourir. »

Pendant quelque temps, Khader Saqr fixe du regard l’appareil de dialyse dans l’espoir qu’il continuera à pomper et à nettoyer son sang. Au bout de quelques minutes, il ferme les yeux et essaye de se détendre. Il s’imagine en train de marcher sur la plage avec tous ses petits-enfants qui courent et rigolent, comme au bon vieux temps, lorsque ses deux reins fonctionnaient normalement.


Coupures de courant à Gaza

Le coupures de courant ont un effet délétère sur l’ensemble du système de santé de Gaza, mettant souvent directement en danger la vie des patients qui sont tributaires de l’équipement hospitalier pour leur traitement. Ce sont les Palestiniens ordinaires qui payent le tribut le plus lourd, notamment les enfants, les personnes âgées et les personnes atteintes de maladies graves. Ils n’ont guère d’autres choix que de s’en remettre à un système qui se détériore rapidement.

Lors d’une coupure de courant, les appareils électroniques utilisés en chirurgie s’arrêtent brusquement de fonctionner et les lumières s’éteignent dans les blocs opératoires. Les coupures de courant peuvent endommager définitivement d’autres appareils, tels les appareils de dialyse, les moniteurs cardiaques, les scanners de tomographie, les analyseurs de laboratoire et le matériel d’imagerie à résonance magnétique. Les machines à laver et les autoclaves utilisés pour stériliser le matériel ne peuvent pas fonctionner sans électricité.

En 2010, le CICR a importé les pièces détachées nécessaires pour réparer les appareils de dialyse.

Le CICR a aussi fourni des commutateurs inverseurs automatiques aux hôpitaux permettant de basculer automatiquement sur les générateurs de secours.


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Département de dialyse de l’hôpital Al-Shifa, Gaza. Khader Saqr (63) en dialyse. Il se rend trois fois par semaine à l’hôpital pour des séances de dialyse de trois heures.
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Département de dialyse de l’hôpital Al-Shifa, Gaza. Mohammed Shatat, chef du département de dialyse.
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Hôpital Al-Shifa Shifa, Gaza. Un des générateurs de secours de Shifa. Chaque jour, le courant s’arrête pendant environ sept heures Et les réserves en carburant pour les générateurs de l’hôpital d’Al-Shifa continuent de tarir.
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Hôpital Al-Shifa, Gaza. Bâtiment principal.

©IC
Source : http://www.cicr.org/web/fre/sitefre0.nsf/htmlall/palestine-feature-030910