(8 juin 2012 – 15:15)

Monsieur le Directeur de la Rédaction de “l’Alsace”,

Depuis belle lurette nous constatons que le journal, dont vous êtes le Rédacteur en Chef, a une approche “particulière” concernant les opinions et les idées qui ne sont pas tout à fait “en conformité” avec la tendance, très droitière de notre belle région. Soit ! Vous en avez tout à fait le droit et cela correspond sans aucun doute à votre engagement politique très personnel et de cette manière, vous ne risquez pas de “froisser” la pensée unique diffusée par le groupe CMDP (M. Lucas, banquier et non pas journaliste, jusqu’à preuve du contraire) qui, à moins d’une énorme erreur de ma part, n’est pas tout à fait neutre, sinon ça se saurait.

La dédiabolisation d’un parti fasciste et xénophobe, comme le F.N., est également très tendance, mais malheureusement pas seulement en Alsace et de ce côté là, le journal que j’ai connu il y a bien longtemps, dirigé par des hommes intègres (Zimmermann, Schlumberger, Durm, Haeffelé …) et honnêtes, quant au respect de la déontologie professionnelle, emboîte malheureusement le pas aux médias nationaux, qui n’ont pas encore intégré que M. Sarkozy n’est plus président de la République.

A quoi sert alors votre texte de 7 pages, concernant les “7 clefs pour bien couvrir la présidentielle et les législatives” ?

On relève au point n° 1 [que] “… La Rédaction de “l’Alsace/Le Pays” assure une couverture pluraliste … […] ” et [que] “Nous ne sommes pas soumis à la comptabilité sourcilleuse […] imposée à l’audiovisuel public qui doit accorder strictement la même place à tous les candidats.” C’est sans doute pour cette raison que mon excellent confrère, Denis Sollier, a photographié les panneaux électoraux du Sundgau, de façon à occulter l’existence du panneau électoral du Front de Gauche ? Ou bien, peut-être est-ce pour des raisons de mise en pages que ce panneau a été enlevé ? Bien entendu, [il n’est] “pas question de [vous] substituer aux électeurs [et] de décider à leur place. [Votre] mission est plus noble et plus difficile […] ” – point n° 2 de votre charte.

Quant au point n° 3, nous frôlons l’apothéose : […] Si un comportement, une déclaration nous paraîssent contraires à ces principes, nous ne nous priverons pas de l’écrire.” C’est sans doute également pour cette raison que vous délivrez un certificat de bonne conduite au F.N., comme d’ailleurs la plupart de vos confrères de la presse nationale. “Plutôt Hitler que le Front Populaire”, c’était la devise de 36. Aujourd’hui serait-ce “plutôt Le Pen que Mélenchon” ? Inquiétante dérive pour le moins … nous le verrons d’ici peu.

Comme dit en préambule, vous avez le droit d’adhérer à ces idées sulfureuses, racistes et xénophobes, comme malheureusement quelques 18 % de nos concitoyens. Mais dans ces conditions, vous ne devriez pas fixer ce cadre déontologique dans lequel vous vous targuez d’une neutralité à toute épreuve et tromper ainsi la plupart de vos lecteurs.

Veuillez croire, cher Monsieur le Directeur de la Rédaction de l’Alsace, à mes meilleurs salutations.

pierre dolivet / photographe indépendant – mulhouse – http://pierre.dolivet.free.fr

Réponse des deux journalistes :

Bonjour M. Dolivet,

Les propos qui suivent n’engagent que moi, mais comme vous m’avez adressé en copie le mail que vous avez cru bon d’écrire à Francis Laffon, je ne vois pas pourquoi je me priverai de vous répondre. Je le vois d’autant moins, d’ailleurs, que vous incriminez toute la rédaction du journal et non pas seulement son directeur.

Vous avez raison au moins sur ce point : au-delà des responsabilités hiérarchiques, les quelque 130 journalistes qui composent la rédaction de « L’Alsace » forment un tout solidaire – pas uniforme ni « caporalisé », mais au contraire riche d’une grande diversité humaine.

Vous faites fausse route sur tout le reste et pour le dire crûment, vous avez perdu une belle occasion de vous taire.

Ainsi donc, vous nous accusez pêle-mêle de sympathies extrémistes rampantes, de partis pris insidieux (avec qui ?), de malhonnêteté intellectuelle… etc. Pour ma part, je me bornerai à constater que vous ne vous embarrassez ni de nuances, ni de doutes. Je vous tenais jusqu’ici en estime, figurez-vous… Mais cette prose est décidément d’une trop grande bassesse. Injurieux, diffamatoire et paranoïaque, le ton que vous employez ressemble de façon troublante à celui que nous réserve parfois certains responsables de l’extrême droite alsacienne – et je parle d’expérience !

Où avez-vous vu que « L’Alsace » dédiabolise l’extrémisme politique ? Ou encore, que nous maltraitons sciemment le Front de gauche ? Citez-moi des exemples précis, concrets et étayés, en évitant de retomber dans le ridicule d’une simple photo recadrée pour les besoins de la mise en page (vous qui êtes photographe, vous devriez connaître ce genre de contrainte).

Je suis vraiment curieux de découvrir – grâce à vous ! – que je travaille pour un « torchon » néo-poujadiste, xénophobe et raciste depuis plus de 12 ans. Ce procès d’intention est tellement outrancier qu’il a un côté comique, mais il est surtout accablant – pour vous, s’entend. Enfin, puisque vous évoquez les mânes de Jean-Marie Haeffelé, figurez-vous qu’il fut mon professeur et que je lui dois aussi mon embauche à « L’Alsace ». Croyez-vous vraiment qu’il aurait recruté un « facho » ?

Sachez-le, la prochaine missive de la même eau ira directement dans mon dossier « Spam ».

Emmanuel Delahaye

Rédaction locale de Mulhouse

Consternation

Monsieur,

Vous instruisez à charge, avec une outrance que j’ai rarement rencontrée dans ma vie professionnelle et en dehors de mon métier.

Pour une telle animosité qui frise la haine, je ne vous adresserai aucun éloge (même si la performance est hors norme), ni propos injurieux en retour, puisque vous les espérez sans doute.

Je ne suis pas sûr que vous attendiez une réponse de ma part. Sachez néanmoins que je suis prêt à vous rencontrer. Je n’ai pas le « plaisir » de vous connaître ou alors j’ai oublié, mais j’aimerais essayer de comprendre ce que vous nous reprochez au juste et sur quelle base précise, au-delà d’un méli-mélo d’accusations que j’ai du mal à récuser tant elles sont contraires à nos valeurs et à notre pratique quotidienne.

Que vous soyez critiques à notre égard, pourquoi pas. L’objection oui, l’abjection très peu pour nous.

L’adresse de notre journal est publique (18 rue de Thann, à Mulhouse) et mon numéro de téléphone portable est le 06 85 13 18 12. Rien à ajouter pour ma part. Sinon que vous serez tout de même le bienvenu.

Je vous laisse le soin de qualifier mes salutations.

Francis Laffon

PDF-Edition-Page-44-sur-44-Sundgau-du-08-06-2012