Arbeit macht freie

La police polonaise a retrouvé les voleurs.

Contrairement à ce que les médias avaient immédiatement clamé urbi et orbi, ce n’était pas des néo-nazis. Peut-être des récupérateurs de métaux? Où des malfrats pour collectionneurs? Ou des gens anti-travail? Allez savoir!

http://www.spiegel.de/politik/ausland/0,1518,668220,00.html

François Maspéro

un bel article de Joël Isselé

Maspero l’affranchi

La médiathèque André-Malraux à Strasbourg accueille, via le festival Strasbourg-Méditerranée, l’exposition François Maspero et les paysages humains, présentée initialement à la Maison des passages à Lyon, à l’occasion du cinquantenaire de la création des éditions Maspero.

Une soixantaine de panneaux composent cette exposition structurée autour d’un parcours composé de trois espaces thématisés autour du livre et de la figure de François Maspero. Libraire et éditeur, il a fait découvrir textes politiques et poèmes du monde entier aux lecteurs des années 60 et 70. Devenu traducteur et écrivain, il a pris lui-même la plume : arpenter le monde en sa compagnie est passionnant.
Longtemps, François Maspero a voyagé en « passager clandestin dans les livres des autres », il le signale avec un certain plaisir dans une note du livre Transit ‘ Cie. Il a servi les auteurs et les causes qui lui importaient, d’abord dans sa librairie, puis à travers sa maison d’édition. Mais lui-même ne s’exprimait que dans des préfaces signées souvent de pseudonymes ou dans des articles. Comme si sa parole était frappée d’illégitimité.

Se libérer de la culpabilité

De l’origine de cet empêchement, il a parlé pour la première fois avec clarté dans Les Abeilles et la Guêpe (Seuil, 2002). Un livre autobiographique dans lequel il tente de dissiper « la neige dans la mémoire » qui est tombée sur le décès de son père, Henri Maspero, mort à Buchenwald en 1945 et sur celui de son frère Jean, de sept ans son aîné, jeune communiste tombé un an plus tôt.
Resté seul à 13 ans avec une mère revenue de Ravensbrück, l’adolescent a dû se libérer de la culpabilité d’être un si jeune survivant et du poids de deux générations de savants : un grand-père égyptologue, un père sinologue, professeur au Collège de France. « Elève exécrable », il rejette toute carrière académique. La peur de ne pas être à la hauteur le paralyse.
En 1954, à 22 ans, il fonde sa première librairie, L’Escalier. Quatre ans plus tard, il ouvre La Joie de lire qui devient un lieu important de la vie politique et intellectuelle, un foyer de résistance pendant la guerre d’Algérie ; et plus tard, dans les milieux gauchistes, un endroit où il est de bon ton de piquer (le savoir est à tous). Les attentats, les procès, les amendes d’un côté, les vols de l’autre, ont eu raison du « bordel incontrôlable » qu’est devenu la librairie. Exsangue, elle ferme en 1975 – François Maspero avait ces années-là ouvert une antenne, aussi, à Mulhouse.
Exercé avec passion, ce métier avait trouvé une suite logique dès 1959 avec les Editions Maspero. Leur catalogue, où voisinent les textes politiques, les manifestes des luttes anticolonialistes, les récits de vie, les ouvrages d’histoire, la poésie du monde entier, est un miroir des années 60 et 70, un trésor dans lequel des générations ont puisé savoir et convictions : des Damnés de la terre de Frantz Fanon à Aden Arabie de Paul Nizan, des socialistes avant Marx à Louis Althusser.
Cette aventure aussi s’est mal terminée. Elle devait être collective. Un film de Chris Marker, Les Mots ont un sens (1972), fait éclater les contradictions : Maspero répugnait à adopter le rôle du patron que ses collaborateurs lui demandaient tout en refusant ce rapport. Il aurait peut-être dû, se dit-il aujourd’hui. Ces éditions étaient son oeuvre, avec le soutien d’amis et d’auteurs fidèles, tel l’historien Pierre Vidal-Naquet. Il a pourtant jeté l’éponge au début des années 80 : la maison qu’il a fondée est devenue, sans lui, La Découverte.
Pendant ces années passées à faire lire les livres des autres, François Maspero voyage beaucoup, en Amérique latine surtout – Cuba est sa « seconde patrie ». Il habite alors sa librairie « comme une halte de passage pour migrateur ». Les conflits et les contradictions qui agitent les deux entreprises, le poids, sans doute aussi, de l’histoire familiale enfouie aboutissent, en 1973, à une tentative de suicide. Il l’évoquera, discrètement, dans une note d’un chapitre des Abeilles et la Guêpe, disant éprouver, presque tous les jours, « la joie d’être vivant ».

Chat-qui-s’en-va-tout-seul

A 50 ans, sans métier, Chat-qui-s’en-va-tout-seul plus que jamais, il entreprend une troisième vie d’auteur et de journaliste. Ce parcours, il l’a évoqué dans plusieurs livres, écrits après ce qui fut vécu comme la défaite d’un beau projet collectif : Le Sourire du chat (1984), Le Figuier (1988), Le Temps des Italiens (1994). Sur la « pacification » de l’Algérie, il a écrit un roman historique qui dénonce la violence coloniale : L’Honneur de Saint-Arnaud (1993).
Pour France Culture et pour Le Monde, il « courut le monde et l’admira » comme don Pedro d’Alfaroubeira avec ses quatre dromadaires. Enfin, fidèle convoyeur des rêves des autres, il a traduit un grand nombre d’auteurs qui lui sont proches : Francesco Biamonti, Alvaro Mutis, John Reed, Augusto Roa Bastos. Une admiration qui n’a rien de béat, tenue à distance par l’ironie, assombrie par la colère, réchauffée par des instants de fraternité ou de beauté. Cette exposition ouvre un chantier aux mille figures, regarde en arrière mais nous parle aussi de demain, et François Maspero est un guide de première importance.

Joël Isselé

Jusqu’au 9 janvier. A la médiathèque André-Malraux, presqu’île Malraux à Strasbourg (la médiathèque est fermée du 24 au 28 décembre). Tél: 03 88 45 10 10. Catalogue : François Maspero et les paysages humains, coédition (A plus d’un titre / La Fosse aux ours).
Édition du Mar 22 déc. 2009

http://www.dna.fr/acces/telechargement.php?file=/file/pdf/REFTE.07.0299.DNA.pdf

Peinture, incendie et stéréotypes.

Le Journal nous apprend que le peintre Deruber (81 ans) , dont il révèle le vrai patronyme, on se demande bien pourquoi, cela n’apportant aucune information supplémentaire, a subi, pour la seconde fois un incendie dans sa maison-atelier, détruisant tout le bazar créatif qu’il y entreposait.

L’exposé du fait divers (et d’hiver) est suivi d’un second papier au titre stéréotypé “Deruber, peintre maudit“…

Strasbourg / L’atelier de Deruber en proie aux flammes
Incendie chez un peintre

Un incendie s’est déclaré hier en début d’après-midi dans l’immeuble du peintre Deruber, au 24 rue du Bain-aux-Plantes à Strasbourg, en plein coeur du quartier touristique de la Petite France.
Les pompiers sont intervenus avec deux grandes échelles qui ont permis notamment de dégager l’une
des victimes. (Photo DNA – Michel Frison)
■ Une vingtaine de pompiers
des casernes Ouest et
Finkwiller sont intervenus à
13h dans cet immeuble de
trois étages, dont une façade
donne sur l’Ill. Le feu s’est
vraisemblablement déclaré
au deuxième, au domicile du
peintre Deruber qui lui sert
aussi d’atelier. Agé de 81 ans,
l’artiste était en compagnie
d’un autre homme âgé de 64
ans. Légèrement intoxiqués
par les fumées, tous deux ont
été transportés au centre hospitalier
universitaire de Hautepierre.
Déjà victime
d’un incendie en 1986
Aucun autre blessé n’est à
déplorer. Le premier étage
− qui fait l’objet de travaux−
et les combles étaient
inoccupés. Mais l’ensemble
des locaux est fortement endommagé,
et en premier lieu
l’appartement et atelier de
Deruber, Désiré Roth de son
vrai nom. L’endroit, souvent
considéré comme un « capharnaüm
», était volontairement
laissé en désordre par
l’artiste qui gardait là toutes
sortes d’objets, notamment
des livres et coupures de
journaux.
Deruber y conservait aussi
de nombreuses toiles. Déjà,
en 1986, vingt ans de son travail
étaient partis en fumée à
la suite d’un incendie dans la
galerie du Puits, à Merkwiller-
Pechelbronn (lire plus
bas).
De nombreux passants et
touristes ont été témoins de
cet incendie et de l’intervention
des pompiers, notamment
depuis le pont du Faisan,
situé à quelques mètres
de l’immeuble.
La police a ouvert une enquête
pour déterminer l’origine
exacte du sinistre, sans
doute accidentelle.
Aurélien Poivret

Deruber, peintre maudit
■ Noir c’est noir. En 1986,
l’oeuvre de Désiré Deruber, truculent
peintre de la Petite-
France, était partie en fumée.
Hier, c’est tout son monde qui a
été dévoré par le feu.
Désiré Deruber, artiste sinistré.
A quelques jours de
Noël, ses affaires calcinées
ont volé par les fenêtres de
son appartement-atelier de la
rue du Bain-aux-Plantes investi
par les pompiers. Une
fois de plus son oeuvre a été
carbonisée, mangée par les
flammes, l’incendie de ce
lundi ravivant la blessure que
le feu avait infligée au peintre
il y a plus de vingt ans.
Par une nuit d’octobre
1986, la galerie du Puits 6, à
Merkwiller-Pechelbronn, est
embrasée. Accrochés là depuis
la veille, 72 tableaux de
Deruber sont pris dans les
flammes. Vingt ans de peinture
anéantis. La « Brûlure » :
c’est ainsi que l’épisode est
répertorié par Désiré Roth,
dont la vie est un roman (il
apparaît sous le nom de Wotan
dans Le Crime de la maison
Grün par Jacquemard et
Sénécal, prix du Quai des Orfèvres
1977).
Voyant dans l’épreuve un
enrichissement, Désiré Deruber
a continué à peindre et à
parler, « envers et contre
tout », donnant toujours dans
le « poétique allusif », se référant
à « la profondeur des dessins
paléontologiques », visant
une « transmission émotionnelle
», une communication
spontanée.
Empilements, entassements,
amoncellements. Le
capharnaüm assumé et revendiqué.
Dans l’appartement
de la Petite-France où il
résidait depuis un demi-siècle,
l’artiste qui a fêté il y a
quelques jours ses 81 ans
collectionnait livres, dessins,
coupures de presse, bricà-
brac, le désordre, les « strates
du vécu» étant considérées
comme une source
d’inspiration et comme un
choix esthétique. Hier, c’est
tout un univers qui a été
consumé par les flammes.
J.-J. B.