Chers collègues, chers amis,
Je me permets d’attirer votre attention sur deux textes que j’ai tout récemment publiés.
1. L’un a paru le 6 janvier sur Rue89, sous le titre : “Juifs, musulmans: nous portons tous les cicatrices de Gaza”. Vous pouvez le lire en cliquant ici .
2. L’autre est une interview accordée à L’Humanité le 5 janvier. Je le reproduis ci-après.
J’attire par ailleurs votre attention sur l’appel à un autre débat (que celui en cours une l’identité nationale), initié par le collectif “Pour un véritable débat” et dont je suis l’une des signataires: “Identité nationale et passé colonial: pour un véritable débat”. Vous pouvez le lire en cliquant ici .
Vous souhaitant une bonne lecture et profitant de l’occasion pour vous présenter mes voeux pour 2010, bien cordialement,
Esther Benbassa
Esther Benbassa « Pour l’avenir, il y a un roman national à réécrire »
Directrice d’études à l’École pratique des hautes études, Esther Benbassa estime nécessaire de débattre de la France telle qu’elle est.L’auteure de Être juif après Gaza (CNRS éditions, 2009) ne rate pas une occasion pour s’impliquer dans des combats qu’elle estime justes. En décembre dernier, elle a décidé de faire partie d’un collectif qui prône l’ouverture d’un « autre débat » que celui lancé par le gouvernement. Les membres de ce collectif, comprenant des intellectuels, des chercheurs, des écrivains, des journalistes travaillant sur le post-colonialisme ou l’immigration rejettent l’initiative d’Éric Besson, dont le but, considèrent-ils, est de manipuler l’opinion. Esther Benbassa la qualifie même de dangereuse car elle lève le tabou du racisme.
Pourquoi demandez-vous l’arrêt du débat sur l’identité nationale, alors qu’Éric Besson s’entête à vouloir le poursuivre?
Esther Benbassa. Nous n’appelons pas à cesser de débattre mais à conduire un autre échange qui ne porte pas sur l’identité nationale et qui serait une sorte de radiographie de la France. Il faut sortir de ce débat stérile sur l’identité nationale rappelant les discussions des années trente lorsque les ligues fascistes criaient : « La France aux Français ! »
Vous dites que ce débat sur l’identité nationale est dangereux…
Esther Benbassa. Il est dangereux d’abord parce qu’il caresse les mauvais instincts des gens et fait sauter le tabou du racisme. Des personnes osent dire à haute voix ce qu’elles écrivaient anonymement. Il n’est qu’un cache-misère pour parler de l’autre, de l’immigré qui ne ferait pas partie de l’identité nationale. De plus, ce débat est tourné contre l’islam comme l’était l’antisémitisme contre les juifs au XIXe siècle. Or on sait à quoi avait abouti l’antisémitisme des années trente.
En quoi consiste précisément l’« autre débat » que vous appelez de vos vœux ?
Esther Benbassa. On veut un débat sur la France telle qu’elle existe aujourd’hui, avec des états généraux, des colloques et bien d’autres initiatives. Il faut réécrire les manuels scolaires, l’histoire, car, dans la saga nationale qu’est l’histoire de France, il y a celle des anciens colonisés et celle des immigrés. La décolonisation n’a toujours pas été digérée. Il faut recentrer la réflexion vers d’autres enjeux et proposer de façon concrète des outils de compréhension pour les populations. Et expliquer que le débat sur l’identité nationale est un débat nationaliste, qui cache le déficit de la France, le chômage et les luttes sociales. C’est un débat typiquement politicien, électoraliste à la veille des régionales.
En prônant un « autre débat », n’est-ce pas d’une certaine manière le fait de rester dans le débat sur l’identité nationale que vous condamnez? ?
Esther Benbassa. Nous n’avons jamais parlé de l’identité nationale et n’avons pas l’intention de le faire. Mais il existe bien une question sur ce qu’est la France aujourd’hui et on ne doit pas éviter d’y répondre. L’identité nationale est un jeu de mots pour désigner le « vrai » Français. Et le « vrai » est celui qui n’est pas immigré, qui n’est pas noir, pas arabe, celui qui n’est pas musulman. Au contraire, notre collectif regarde vers l’avenir et on estime qu’il y a un roman national à réécrire avec les histoires de ceux qui composent ce pays. Qui aujourd’hui peut dire qu’il a une seule identité? La question même est absurde, elle nous dépasse. De plus, un débat, cela se prépare, cela se réfléchit et cela regarde l’avenir. Or le débat lancé par Éric Besson est de nature conjoncturelle.
Entretien réalisé par Mina Kaci. Publié dans L’Humanité le 5 janvier 2010.
Distinguer les termes “juif” et “sioniste” exige que les Juifs de la Diaspora se désengage du soutien à Israël, se définissent autrement que par un lien affectif à Israël.
Tant que Israël apparaît comme un élément central de la vie juive, la distinction entre juif et sioniste ne peut être faite.
rudolf