Le Grand Rabbin de France reconnait avoir plagié plusieurs textes
par Gerard Fredj
L’accusation circulait déjà depuis plusieurs semaines.
Sur le blog Strass de la Philosophie, deux philosophes, Jean-Clet Martin et Pierre Girardet s’interrogeaient sur deux textes en vis-à-vis, très similaires.
Le premier était une partie d’un entretien accordé par le philosophe du post structuralisme Jean-François Lyotard (décédé en 1998 publié dans “Questions au judaïsme” en 1996.
Le deuxième était tiré de “Quarante méditations juives”, publié en 2011 par Gilles Bernheim, Grand Rabbin de France.
Il y a quelques semaines, Gilles Bernheim s’était défendu de l’accusation de plagiat et avait alors évoqué la possibilité que ses cours, dispensés dans les années 1980 (et qui ont été utilisés pour son livre) , auraient pu passer entre les mains de Jean-François Lyotard, qui aurait pu s’en inspirer.
Un examen des deux textes réalisés par des philosophes, dont le résultat a été publié sur Internet(Théoria.fr) vient contredire cette explication.
Plus grave, d’autres plagiats ont été publiés par plusieurs universitaires qui démontreraient que Gilles Bernheim a “emprunté” des textes à Elie Wiesel, à Jean Grosjean (un poète et écrivain décédé en 2006, spécialiste des textes bibliques) ou encore à l’écrivain Jean-Marie Domenach.
Survient hier un coup de théâtre alors que la polémique, quoique discrète, enfle.
Dans un communiqué publié depuis Jérusalem, le Grand Rabbin de France déclare regretter son explication initiale
” Elle a été émotionnelle, précipitée et maladroite. Je l’analyse rétrospectivement comme du déni”.
Reconnaissant les éléments de plagiat, Gilles Bernheim affirme qu’ils seraient le fait d’étudiants chargés d’écrire des textes, autrement dit, des “nègres”, et reconnaît que “d’autres plagiats n’ont pas été identifiés à ce stade”.
Nous reproduisons ci-dessous le communiqué du Grand Rabbin de France.
“Jérusalem, le 2 avril 2013
Pour le livre “Quarante méditations juives”, je me suis appuyé, par manque de temps, sur un étudiant dont je tairai le nom et à qui j’ai confié des travaux de recherche et de rédaction.
C’est la seule et unique fois que je me suis livré à un tel arrangement, dans un contexte, en 2011, où ma charge de travail et mes obligations ne me permettaient pas de porter toute l’attention nécessaire à la rédaction d’un livre.
Ce fut une terrible erreur.
Ma confiance a été trahie. Les plagiats démasqués sur Internet sont avérés. Il y aurait, dans ce livre, d’autres plagiats qui n’ont pas été identifiés à ce stade.
J’ai été trompé. Pour autant, je suis responsable.
Je demande pardon aux auteurs dont des textes ont été copiés, aux personnes qui ont lu ces “méditations”, ainsi qu’à mon éditeur qui n’était pas informé de l’existence d’un tiers.
Le 19 mars 2013, ma réaction devant la première évidence de plagiat a été émotionnelle, précipitée et maladroite. Je l’analyse rétrospectivement comme du déni. Aujourd’hui, je la regrette.
Dès mon retour à Paris, j’écrirai, demain, à Dolores Lyotard et à Elisabeth Weber pour leur présenter mes excuses et leur dire le respect et l’admiration que je porte à Jean-François Lyotard.
Je demande à mon éditeur de retirer “Quarante méditations juives” des librairies et de ma bibliographie”.
Mieux vaut (Lyo)tard que jamais.
On avait déjà pris le sensible Gaillot à ce jeu médiatique et promotionnel.
L’ occasion de redynamiser l’oeuvre de Lyotard ou de passer immédiatement à autre chose?