égypte rfi

Ce vendredi 5 juillet, Acrimed 67 et la Feuille de chou ont observé pour vous la manière dont les Dernières Nouvelles d’Alsace rendent compte des événements récents en Égypte.

Sur la Une, ce titre, avec une photo de chars, qui transpire la trouille occidentale laquelle, comme souvent, n’a rien vu venir:

Une transition hasardeuse“.

La transition en Égypte s’annonce délicate alors que l’armée a lancé une vaste opération contre les Frères musulmans dont est issu l’ex-chef d’État Morsi“.

Déjà, le Journal fait comme si le peuple égyptien qui a pourtant manifesté par dizaines de millions, permettant ainsi à l’armée d’écarter Morsi, n’avait pas joué un rôle majeur dans cette seconde phase du printemps égyptien. Il est vrai que la Journal comme l’ensemble des médias dominants n’en a presque pas rendu compte

En page 3, le lecteur a le choix entre deux interprétations, ce qui traduit sans doute l’embarras du Chournal.

A gauche (de la page…), Ludovic Bassand, journaliste mutualisé du groupe EBRA (m’en tombent), titre ” Quel avenir après le coup d’Etat?” , en dessous de “L’armée quadrille Le Caire tandis que sa marionnette prend la présidence

Là encore, les seuls acteurs semblent être l’armée, opposée aux “islamistes qui appellent à manifester“.

Et le peuple?

Quel peuple?

Le Journal partage manifestement “l’embarras à l’étranger“.
La mise à l’écart d’un président démocratiquement(sic) par un coup d’État militaire a créé un certain embarras“.

Les militaires auraient-ils réalisé leur coup, s’il n’y avait eu des millions de manifestants, hommes, femmes, enfants, musulmans, coptes, ouvriers, employés, commerçants,etc.

Comme le lecteur des DNA n’a pas eu l’information sur ce tsunami populaire inédit qui a vu une population majoritairement musulmane conspuer les Frères musulmans, incapables de changer leur situation économique et sociale, il doit se contenter de l’annonce d’un “vendredi du refus” à l’appel des forces chassées du pouvoir par le peuple, avec l’aide, à la fin, de l’armée et même de la police qu’on a vu danser au milieu des manifestants anti-Morsi!

A droite (de la page) l’éditorial de Jean-Claude Kiefer, avec ce titre bien vu, “Le vide occidental“, qu’on peut étendre aux médias dominants.

Quel avenir en Égypte, quelles répercussions dans le monde arabe, notamment en Tunisie ? Autant consulter un astrologue ou une cartomancienne ! Mais surtout ne pas analyser les événements du Caire dans la seule logique occidentale avec ses « réponses à tout » sur le respect des droits de l’homme ou celui du choix démocratique sorti des urnes. Dénoncer, comme l’a fait le chef de la diplomatie allemande Westerwelle, le renversement du président Morsi élu au suffrage universel est un non-sens. Le chef de l’État n’était pas un démocrate, son élection était entachée de fraude.

La question de l’entame est bien posée, mais pourquoi en appeler à l’irrationnel immédiatement après? Nul besoin d'”astrologue“, l’analyse politique suffit pour décrypter et même faire des prévisions sur les devenirs possibles ouverts à ce jour. Voir le Monde diplo, avec les papiers de Alain Gresh.

Kiefer a raison de ne pas se fier à “la seule logique occidentale” qui voit dans tout ça un conflit entre l’Islam et la laïcité à l’européenne, mais de là à traiter de “non-sens” la critique allemande du “renversement du président Morsi“, il y a un abîme.

Oui, les militaires égyptiens, s’appuyant astucieusement sur le puissant mouvement populaire, ont mis fin, illégalement, au pouvoir du président élu et ils ont interdit des médias islamistes et pourchassent les Frères, toutes actions non démocratiques.

Oui, les militaires n’aucun “rôle vertueux“; ils sont intervenus pour défendre leur propre pouvoir économique et financier.

Mieux vaut regarder la réalité en face : outre-Méditerranée, la situation devient explosive.

En effet, on a affaire à une nouvelle phase, et pas la dernière, de la révolution permanente égyptienne.

Et la conclusion de Kiefer est assez réaliste:

Nombreux sont pourtant les vrais démocrates dans les pays arabes. Ils rêvent tous d’un État moderne, économiquement viable, avec ou sans connotation religieuse dans la tolérance. Mais ils n’ont plus d’interlocuteurs pour les aider. Pas en Europe. Et pas aux États-Unis. Le grand vide de l’Occident…

publiée le 05/07/2013 à 05:00

Mais contrairement à l’éditorialiste, nous avons confiance dans la maturité du peuple égyptien et le soutien du mouvement progressiste mondial.

Il a dégagé Moubarak, il a dégagé Morsi.

Il dégagera, le jour venu, l’armée égyptienne, en la renvoyant dans ses casernes, où elle a de quoi s’occuper de son voisin israélien, en soutenant le peuple palestinien tragiquement seul, une fois dénoncé le “traité de paix” avec l’État-voyou inquiet comme à chaque nouvel épisode la la révolution arabe.

Le point de vue de Gilles Kepel

http://www.huffingtonpost.fr/gilles-kepel/coup-etat-militaire-egypte_b_3545385.html?utm_hp_ref=france