Monsieur le Recteur,
Depuis quelques semaines, l’administration de la Grande Mosquée de Paris a décidé de séparer la prière des hommes des femmes, en assignant ces dernières dans une nouvelle salle aménagée au sous-sol.
Nous avons demandé des explications officielles sur ce nouvel aménagement et l’administrateur général nous a répondu que cette décision avait été prise suite à une demande des fidèles-hommes trop gênés par le comportement bruyant de certaines femmes. Cet argument ne nous a pas étonnées car nous avons également été victimes de ces faits. Nous avions d’ailleurs proposé, pour remédier à ces troubles, que le rideau de séparation entre les femmes et les hommes soit retiré, d’une part, parce qu’il n’a pas de base religieuse et qu’il stigmatise les femmes et d’autre part, supprimer cette isolation visuelle aurait permis aux femmes “dissipées” de mieux se concentrer sur l’activité de prières et de méditation à l’image des hommes.
Au contraire, il a été décidé d’abandonner les femmes assidues à leur sort, dans cette nouvelle salle isolée au sous-sol, devenu un vrai salon de thé et une garderie : aucune possibilité d’être concentrée et de profiter de la beauté architecturale de cette mosquée historique propice au recueillement !
D’ailleurs, il y a des hommes qui ont parfois aussi un comportement perturbant, pourtant personne n’a jamais songé à fermer la salle de prières à tous les hommes ! De plus, ce magnifique espace de prières (en dehors de la prière du vendredi) est totalement sous-exploité puisque vide au 3/4.
Monsieur le Recteur, interdire l’entrée de ce lieu à l’ensemble des femmes pour les raisons évoquées s’apparente bien à une sanction collective injuste et disproportionnée.
C’est pourquoi, le 23 novembre 2013, nous sommes venues prier le Maghreb avec un groupe de femmes. En nous dirigeant vers la salle de prières, nous avons tout de suite été interpelées et pour certaines, bloquées physiquement, par un membre de votre personnel. Face à notre volonté sereine, il n’a eu d’autre choix que de nous laisser entrer pour prier au fond de la salle comme auparavant. (Nous précisons que même en l’absence de rideau nous étions à plus de 10 m du dernier rang des hommes).
À la fin de la prière, un imam est venu nous voir pour nous affirmer qu’il était interdit (« haram ») pour des femmes de prier dans la maison des hommes (« bayt rajol »). Face à nos arguments religieux, (la mosquée est la « maison de Dieu » et le Prophète (SWS) n’a jamais imposé de séparation physique) le calme est revenu, mais nous avons été menacées pour nous dissuader de revenir.
Monsieur le Recteur, face à cette situation, nous vous demandons de prendre vos responsabilités à l’égard des femmes de la communauté musulmane qui souhaitent prier dans la salle de prières principale comme depuis des décennies et sans séparation physique en application du hadith clair et authentique du Prophète (SWS) : « Pour les hommes, le meilleur rang est le premier et le plus mauvais est le dernier. Et concernant les femmes, le meilleur rang est le dernier et le plus mauvais, le premier ».
Monsieur le Recteur, nous souhaitons que vous souteniez vos soeurs déjà souvent discriminées par l’ambiance islamophobe actuelle et qui recherchent simplement des espaces de sérénité et de spiritualité leur permettant de pratiquer leur religion au coeur de Paris. Une pétition en ce sens a d’ores et déjà été lancée. Nous comptons donc sur vous pour prendre d’autres mesures concernant la neutralisation des trouble-fête qu’ils soient hommes ou femmes.
Nous connaissons votre position officielle sur l’égalité hommes-femmes, c’est pourquoi nous avons la certitude que vous réussirez à réparer cette exclusion ne reflétant pas la dimension humaniste de notre Prophète (SWS) qui lui-même, en son temps, a révolutionné le statut de la femme dans une Arabie pourtant particulièrement misogyne.
Le 24 novembre 2013 à Paris.
« Les Femmes dans la Mosquée »
Vous pouvez signer la pétition
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