Ce 18 décembre 2013, dans le cadre de la journée d’action globale pour les droits des migrant.e.s, le réseau euro-africain Migreurop lance un Appel solennel en faveur de la libre circulation des personnes. Recensant les entraves instaurées par les politiques migratoires à la mobilité humaine (politiques discriminatoires de visas, interceptions maritimes, murs, accords politiques pour la réadmission des étranger.e.s en situation irrégulière…), Migreurop rappelle leurs conséquences dramatiques sur le plan du respect des droits humains (détention prolongée, violation du droit d’asile, mortalité migratoire…). Au regard de ces constats, et au nom du principe d’égalité – car la liberté de circulation existe de fait pour une partie des citoyens du monde pouvant franchir aisément les frontières par le hasard du lieu de naissance – Migreurop exige un changement radical dans les politiques migratoires afin de rendre possible la liberté d’aller, de venir et de s’installer pour toutes et tous, liberté qui constitue l’indispensable corollaire de la défense des droits des migrant.e.s.
Depuis sa création, le réseau Migreurop s’attache à mettre en lumière les effets néfastes de la politique de gestion des frontières de l’Union Européenne [1]. La vision sécuritaire des politiques migratoires, qui se traduit par une militarisation accrue de l’Europe forteresse, la multiplication des interceptions maritimes, ou encore le verrouillage des possibilités de migration légale (que traduisent les obstacles mis à la délivrance des visas) est régulièrement dénoncée [2]. Migreurop pointe la démultiplication des contrôles, qui font appel à des méthodes sophistiquées et coûteuses, comme en témoignent la construction de nouveaux murs et la création puis le renforcement de l’agence Frontex – véritable bras armé de l’Union européenne.
De même, Migreurop dénonce le processus d’externalisation du contrôle des migrations qui contraint les pays non membres de l’UE à réadmettre toute personne chassée des pays européens qui serait passée par leur territoire et à renforcer le contrôle et la répression pour empêcher le départ et le transit des migrants. C’est ainsi que se multiplient les accords de réadmission, qui visent à faciliter les expulsions et constituent une des armes pour empêcher la mobilité des migrant-e-s en amont des frontières européennes [3]. L’UE n’hésite pas à instrumentaliser l’Aide Publique au Développement pour faire pression sur les États de transit et d’origine afin qu’ils acceptent de tels accords. Par ces dispositifs, l’Europe se détourne de son devoir de protection des personnes en quête d’asile et ignore les violations des droits humains qui en découlent.
En 2010, Migreurop a pris position pour la fermeture des camps d’étrangers, instruments privilégiés de gestion des populations migrantes [4]. Les migrant-e-s, détenue-e-s ou non, sont considéré-e-s comme des criminels et déclaré-e-s en situation illégale, au seul motif qu’ils/elles n’auraient pas respecté les règles imposées pour le franchissement des frontières et le droit au séjour. La transgression de ces règles – qui sont pourtant parfois contraires au droit international – sert à justifier des politiques de plus en plus fermes de restriction d’aller et venir, dont plus personne ne peut ignorer les conséquences effroyables : depuis 1990, plus de 20 000 personnes sont mortes ou disparues en tentant de rejoindre l’Europe.
A travers ces combats menés par Migreurop sont mis en évidence les méfaits des entraves à la liberté de circulation des personnes. Or cette liberté existe pour une partie des citoyens du monde, qui, par le hasard du lieu de naissance, disposent d’un passeport ou obtiennent sans difficultés les visas qui permettent de franchir aisément les frontières. Accepter que d’autres en soient privés c’est entériner l’existence d’un monde à deux vitesses, porteur de discriminations fondées sur un rapport de domination politico-économique des pays dits industrialisés sur les autres. C’est également ignorer l’existence de droits fondamentaux, tels que le droit à émigrer, reconnu par la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, ou le principe de non refoulement consacré par la convention de Genève de 1951.
Revendiquer, au nom du principe d’égalité, la liberté d’aller, de venir et de s’installer pour tou-te-s, constitue l’indispensable corollaire de la défense des droits des migrant-e-s. C’est pourquoi, dans la continuité de ses activités et de ses combats, Migreurop demande la mise en œuvre effective de la liberté de circulation, outil de changement social au profit d’un modèle de société plus juste et plus équitable.
[3] « Aux bords de l’Europe : l’externalisation des contrôles migratoires » (2011), « Paroles d’expulsé.e.s » (2012)
[4] « Pour la fermeture des camps d’étrangers, en Europe et au-delà » communiqué 2010
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