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Révélations sur les conversations des gendarmes lors de la mort de Rémi Fraisse

Le Monde.fr | 12.11.2014 à 11h07 • Mis à jour le 12.11.2014 à 11h43 | Par Matthieu Suc et Olivier Faye

http://www.lemonde.fr/planete/article/2014/11/12/revelations-sur-les-conversations-des-gendarmes-lors-de-la-mort-de-remi-fraisse_4522207_3244.html/

Le 2 novembre 2014, plusieurs milliers de personnes se sont réunies sur le site du projet de barrage de Sivens pour une marche blanche en hommage à Rémi Fraisse. Photo: Ulrich Lebeuf / M.Y.O.P
L’enquête sur la mort de Rémi Fraisse, le jeune manifestant de 21 ans, tué par une grenade offensive lancée par un gendarme lors des affrontements entre des opposants au projet de barrage de Sivens (Tarn) et des militaires, dans la nuit du 25 au 26 octobre, se révèle de plus en plus embarrassante pour les autorités.

Selon des informations du Monde, les gendarmes ont tout de suite eu conscience de la gravité de la situation face à laquelle ils se trouvaient. C’est ce que révèle un procès-verbal daté du 29 octobre auquel nous avons eu accès, qui retranscrit les conversations des militaires sur place, enregistrées par la caméra d’un gendarme qui filme les affrontements.

Lors de cette nuit, les militaires, équipés de jumelles à vision nocturne, voient un manifestant s’effondrer juste après le jet d’une grenade offensive, entre 1 h 40 et 1 h 50 du matin. A 1 h 53, un militaire ordonne : « Stop pour les F4 ! Il est là-bas le mec. OK, pour l’instant, on le laisse. » Les F4 désignent les grenades lacrymogènes instantanées (GLI), dont l’usage a été aussi suspendu depuis par Beauvau.

« IL EST DÉCÉDÉ LE MEC ! LÀ, C’EST VACHEMENT GRAVE »

Au milieu des cris, un autre gendarme tente de se rassurer : « C’est bon, il va se relever ! Il va se relever, c’est bon ! » Rémi Fraisse ne se relève pas. Sept minutes passent. A 2 heures, « On y va ! », un peloton fait une sortie pour récupérer le blessé. Sur procès-verbal, les enquêteurs de la section de recherches de Toulouse relèvent alors que le chef de l’unité demande à un de ses hommes « de soutenir ceux qui sont allés chercher le manifestant », sans préciser en quoi cela consiste.

Les militaires ramènent le corps inerte de Rémi Fraisse. « Il respire ou quoi ? », s’inquiète le supérieur. L’infirmier de l’escadron tente alors les gestes de premiers secours. A 2 h 03, un gendarme s’écrie : « Il est décédé, le mec ! Là, c’est vachement grave… Faut pas qu’ils le sachent ! »

Cette dernière phrase prononcée dans le feu de l’action vise les manifestants, selon la thèse avancée par le service de communication de la gendarmerie, contacté mardi 11 novembre. « Il fallait éviter que ceux qui agressaient les gendarmes ne redoublent d’ardeurs en apprenant la mort de Rémi Fraisse. » En aucun cas, affirme-t-on, il ne s’agirait d’une volonté d’étouffer l’affaire, la gendarmerie avançant pour preuve que le parquet a été avisé dans les minutes suivantes et une enquête judiciaire diligentée dans l’heure.

Les rentranscriptions des conversations des gendarmes au moment du décès de Rémi Fraisse jettent cependant une nouvelle ombre dans un dossier où les autorités ont – au minimum – failli dans leur communication. Le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, a notamment été critiqué pour être resté silencieux pendant plus de quarante-huit heures.

Mort de Rémi Fraisse : ce que révèlent les conversations des gendarmes
LIBERATION 12 novembre 2014 à 12:43 (Mis à jour : 12 novembre 2014 à 13:22)

http://www.liberation.fr/societe/2014/11/12/mort-de-remi-fraisse-ce-que-revelent-les-conversations-des-gendarmes_1141346

Un homme brandissant la une de «Libération» lors d’une manifestation contre les violences policières, à Nantes, le 1er novembre.Un homme brandissant la une de «Libération» lors d’une manifestation contre les violences policières, à Nantes, le 1er novembre. (Photo Georges Gobet. AFP)
«Le Monde» divulgue le contenu d’un procès-verbal, en date du 29 octobre, qui montre que les gendarmes ont tout de suite pris conscience de la gravité de la situation, et que le décès du jeune militant a été constaté presque aussitôt.

Les juges d’instruction en charge de l’enquête sur la mort de Rémi Fraisse sur le barrage de Sivens, dans le Tarn, le 26 octobre, disposent désormais d’un nouvel élément, plutôt embarrassant pour les autorités : un procès-verbal (PV) en date du 29 octobre relate les conversations des gendarmes sur le site de Sivens le soir du drame. Révélé par le Monde, le document montre notamment que les forces de l’ordre ont rapidement pris conscience de la gravité de la situation.

Le PV est la retranscription, par des militaires de la section de recherches de Toulouse, des conversations enregistrées sur les films de l’unité des gendarmes mobiles. Ainsi, dans la nuit du 25 au 26 octobre, comme c’est le cas lors des opérations de maintien de l’ordre, un cadreur filme les activités de l’escadron présent. Entre 1h40 et 1h50 du matin, une grenade offensive est lancée en l’air en direction d’un petit groupe, dont fait partie Rémi Fraisse, qui jette des cailloux et des mottes de terre en direction des policiers. Voyant le jeune homme tomber à terre, l’un des gendarmes ordonne de cesser l’utilisation de grenades lacrymogènes instantanées. Un autre tente de le rassurer ainsi : «C’est bon, il va se relever ! Il va se relever, c’est bon !»

A 2 heures, voyant que Rémi Fraisse ne se relève pas, les gendarmes décident d’approcher. Le corps inerte du jeune homme est isolé. «Il respire ou quoi ?» demande le supérieur, tandis que l’infirmier de l’escadron prodigue les gestes de premier secours. En vain. A 2h03, les gendarmes réalisent la mort du jeune homme. «Il est décédé, le mec… Là, c’est vachement grave… Faut pas qu’ils le sachent…» lance un gendarme. Contacté par le Monde, le service de communication de la gendarmerie assure qu’il ne s’agissait pas d’étouffer l’affaire, mais que ce «ils» faisait référence aux autres manifestants, qu’il s’agissait, en somme, d’éviter toute intensification des affrontements. Les autorités soulignent par ailleurs que les forces de l’ordre ont été face à d’intenses violences à Sivens.

Quarante-huit heures plus tard

La publication de ces conversations révèle que les équipes sur place ont vite réalisé le décès de Rémi Fraisse. Or, celui-ci ne sera annoncé que le dimanche 26 octobre via un communiqué de la préfecture du Tarn, qui stipule que «le corps d’un homme a été découvert par les gendarmes», donnant l’impression que la dépouille venait d’être trouvée. La préfecture explique au Monde avoir écrit ce communiqué en fonction des éléments fournis par les gendarmes sur place : «D’après le récit qu’ils nous en ont fait, lors d’un moment d’accalmie entre des affrontements qu’ils qualifiaient de sporadiques, ils avaient passé le terrain en revue avec leurs lumières et trouvé un corps», disent-ils.

Le ministre de l’Intérieur et le directeur de la gendarmerie nationale, eux, n’ont réagi que 48 heures plus tard, alors même qu’ils affirmaient être informés de la situation en temps réel.

Le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, a pour sa part promis ce mercredi «la transparence» sur le décès de Rémi Fraisse.
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cip-idf est la liste de débat de la Coordination des Intermittents et Précaires d’ile de france.
http://www.cip-idf.org