L’antiracisme ne se réduit pas à un combat contre le racisme individuel à l’occasion de « dérapages » qui se multiplient effectivement. Ce serait minimiser la réalité du racisme systémique, c’est-à-dire, au-delà des idéologies racistes, des discriminations au quotidien, mais aussi occulter le rôle du racisme institutionnel.
Le traitement étatique et municipal des populations rroms en est l’illustration la plus brutale. Nous sommes bien en présence d’une « politique de la race » : on assigne les Rroms à une différence supposément culturelle pour justifier en retour de les traiter de manière discriminatoire.
Mais les politiques de racialisation concernent pareillement d’autres catégories de la population. C’est le cas depuis longtemps avec l’injonction d’intégration adressée aux descendants de l’immigration postcoloniale, comme si certains Français devaient éternellement faire la preuve de leur « identité nationale ». C’est aussi le cas avec le déchaînement d’islamophobie qui s’autorise de la laïcité pour jeter une suspicion a priori sur les musulmans tout en récusant le terme même d’islamophobie.
La politique de la race qui vise les Rroms est donc le révélateur de politiques de racialisation qui font écho à une histoire marquée par l’esclavage, le colonialisme et le nazisme. Mais ce passé rencontre l’actualité d’une France et d’une Europe néolibérales où s’accroissent les inégalités de classes : ces politiques de stigmatisation servent ainsi à en distraire.
Il ne suffit plus de dénoncer les racistes, ni même les partis racistes. Il faut s’en prendre aux politiques de racialisation. Nous refusons d’accepter l’inacceptable, et d’être les complices ou même les témoins de l’organisation politique de la concurrence généralisée entre les victimes d’un même système inégalitaire. Les signataires appellent à une reprise collective de l’initiative.
Il est encore temps, mais il est déjà grand temps.
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