Si certains s’attendaient à un débat chaud, ou le craignaient, ils en ont été pour leurs frais. C’est plutôt l’ennui qui flottait au dessus de la salle de l’Aubette comble lors du débat de lundi soir.

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Wolfermann , de la librairie Kléber, qui souhaitait de l’animation, a dû être déçu.

Après son introduction très littéraro-littéraire, c’est le sénateur-maire Roland Ries qui, se souvenant qu’il avait été jadis professeur de lettres, nous a infligé son pensum. Il n’a pas manqué d’étaler à nouveau son caractère très consensuel, très éloigné de toute guerre civile, serait-elle littéraire.

D’ailleurs, comme pour le confirmer, il était assis à côté de l’ex-président de la CUS, Robert Grossmann, qui avait eu l’initiative autrefois de cette Bibliothèque idéale.

Ces prémices consommés, on eu droit à l’image de Philippe Murray, impertinent clope fumant aux lèvres, et à son poème Sans moi, mis en musique probablement par Burgalat.

Les intervenants prirent place à l’invitation de François Miclo, du Causeur, qui lança le débat.

Alain Finkielkraut, fidèle à sa caricature, pensait fortement, en live, évoquant Sartre, Camus (Albert), Kundera, Flaubert, Barthes, Goethe et quelques autres. Il rappela le rôle de la littérature et de l’art dans les conditions extrêmes du camp de Theresienstadt.

Nul ne le suivit à ces hauteurs là. Il se préoccupa surtout du sens, contrairement à Renaud Camus, plus porté sur le signe et la lettre, selon lequel “ l’oeil est bête“.

En réponse à la question du pouvoir de la littérature, il remarqua que “quand la littérature pouvait, on ne se posait pas la question.

Une façon de ne pas être là“, voilà la littérature.

Elisabeth Lévy, sourire aux lèvres, la seule femme, de la tribune, parla peu; elle joua le rôle de l’élève dissipée, susurrant à l’oreille de Finkielkraut, faisant passer des petits papiers à Miclo. La littérature livrait selon ses dires la vérité du monde au dessus du “brouhaha médiatique“, auquel cette journaliste contribue quelque peu cependant…

Elle se fit l’écho de Gombrowicz selon lequel “la littérature manque de pantalons et de téléphones“. On comprend pourquoi elle fait l’éloge de Houellebecq qui ne nous épargne ni les catalogues de vacances ni les notices de fonctionnement des machines.

Renaud Camus rappela avec humour, mais dans la salle, seuls les lecteurs de Tricks pouvaient saisir, qu’il avait touché beaucoup de pantalons

Il exprima non moins humoristiquement “ un léger désaccord profond” avec Finkielkraut. Il cita deux vers de Yves Bonnefoy qu’il aimait, en prétendant qu’il ne les comprenait pas et, pour le même motif, la sentence de Héraclite “ le temps est un enfant qui joue au tric-trac“. La “jouissance fétichiste“, voilà le sens de la littérature.

On se demande, en le voyant et l’écoutant, comment le même homme, créateur d’un Parti de l’in-nocence, peut traiter de l’islam comme d’une nuisance dans le paysage français.

Finkielkraut, s’appuyant sur Flaubert et ses phrases qui devaient être toutes belles, finit par concéder que “la passion de comprendre n’est pas tout.” Très classique, il défendit l’alliance du vrai et du beau.

On entendit peu les deux autres compères, Jérome Leroy et Basile de Koch-qu’il faut prononcer comme coq-, n’est ce pas Roland Ries, qui était déjà parti.

Le Coq en question fut le seul, avec Ries, à évoquer comme en passant la polémique qui avait entouré ce débat. Il qualifia, par antiphrase, d'”applaudissements réactionnaires”, les fréquents battements de mains venus d’une salle captive, peu avide de questions, à l’exception de quelques habitués de la Salle Blanche.

Dans la salle, Laurent Husser, de la droite strasbourgeoise, après avoir animé un débat avec Claro et Mathieu Enard, s’était assis à côté de Bourhis, ex d’Alsace d’Abord, désormais recentré.

Avec plusieurs de la tribune, cela ajoutait au poids d’une droite très à droite, pour ne pas dire plus.