Modifié le 1er février
Alors que vers la fin du débat sur L’homme réparé/augmenté, Israël Nisand venait, du fond de la salle, de dire que les moratoires sont inefficaces, je suis intervenu pour prolonger juste un peu son idée, en un sens moins fataliste, en disant que c’est à cause de la loi du marché, donc de la course au profit et que par conséquent si on veut en finir avec l’aveuglement du marché qui rebondit de crise en crise, il fallait en finir avec le système marchand mondialisé. Au lieu de laisser la tribune répondre, Nisand a coupé court en déclarant : “ça c’est un vœu pieux” ! Pour un partisan du marché, bien sûr. JCM
Tout est dit dans ces extraits d’un entretien du Pr Israël Nisand avec les DNA
Pour le fondateur du Forum européen de bioéthique, le Pr Israël Nisand, les tentatives d’amélioration du corps humain sont inéluctables, surtout si cela crée une opportunité économique. DNA
On parle de tuer la mort, d’augmenter l’homme, de rendre les organes interchangeables : de la folie ?
– Je pense que les hommes ont toujours été comme ça.
Vous pouvez me croire : tout ce qui est faisable va être tenté !
– Nous pouvons rêver de devenir des Mathusalem ?
Si les allongements de vie obtenus en fin de XXIe siècle sont également qualitatifs, l’humanité les achètera.
J’ai des réticences morales : lorsque l’on sera capable de ces modifications, on ne les ouvrira pas à toute l’humanité. On créera plusieurs humanités, ce que je tiens pour une catastrophe. Il y aura ceux qui ont les moyens de s’améliorer, et les autres. Mais je ne trouve pas dramatique de pouvoir toucher au génome.
L’accumulation de données scientifiques sur les êtres humains n’a pas qu’un intérêt financier.
Si des entreprises accumulent des données sur nos ADN au travers des analyses et des diagnostics de plus en plus poussés, qui regardera dans leurs ordinateurs si tout a été jeté ?
– Même avec un tel risque, qui refusera la promesse d’un corps amélioré ?
Je pense en effet que la mécanique est lancée, qu’on est tous embarqués dans un voyage à grande vitesse, sans pilote dans la locomotive. Mais je ne vois pas de progrès que l’on puisse maintenir sous le boisseau. L’argent est un médiateur qui ne se préoccupe pas du sens.
– Ce sera le seul régulateur ?
Je pense que oui. Les comités d’éthique entérineront plus ou moins rapidement, comme ils l’ont toujours fait. L’argent est la seule énergie, avec la curiosité des humains.
– Et la puissance publique ?
Cela ne me rassurerait pas, au vu des événements dans le monde. Des interdits mondiaux nous conduiraient à Orwell, à un fascisme planétaire. (sic!)
– Il faut donc donner mandat aux chefs d’entreprise pour décider de notre avenir ?
Il n’y a pas de choix. Personne ne donnerait crédit à qui que ce soit pour des questions aussi importantes. Nous n’avons pas encore été envahis en France par les prises de sang pour connaître le sexe du bébé à un mois de retard de règles, mais dès qu’une entreprise attaquera le marché, ça aura lieu, peu importe la charge morale que l’on y met. La seule parade que je voie (sic) est de nature éducative. En France, il y a une allergie à utiliser le corps de l’autre comme un moyen commercialisable, qu’il s’agisse de don du sang, de reins, etc.
– Mais les tenants du technoprogrès surfent sur cette vague du « tout est techniquement faisable » ?
il est évident que le progrès ne fait pas de sentiment.
Épicure contre Nisand
L’idée absurde de vaincre la mort a déjà été réfutée par Épicure [- 342 – 241 a.c] à partir de “Habitue-toi…” in Lettre à Ménécée
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