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Michel Butor, (84 ans, était cet après-midi à la salle Blanche de la Librairie Kléber à Strasbourg. salle archi bondée, avec beaucoup de jeunes.

Les éditions de La différence ont courageusement publié les deux derniers volumes de son œuvre (presque) complète. Douze volumes comme de blancs pavés de 12 00 pages chacun! Et Butor d’expliquer qu’il ne s’agit que des “livres normaux” c’est à dire publiés auparavant. Il manque encore un grand nombre de textes parus dans des revues.

L’écrivain a bénéficié d’un silence quasi religieux pendant l’heure et demi de son intervention. Il a expliqué son goût des nombres avec force exemples, comme celui du chiffre sept, les Muses, les planètes connues des Grecs, les jours de la semaine, etc.

Contrairement à ce qu’on pouvait penser,la question a été posée, il n’a pas été membre (à vie) de l’OULIPO, car, comme il l’a raconté avec cet humour discret qui est sa marque, la seule réunion où il s’est rendu, chez le mathématicien François le Lionnais, s’est déroulé en plein mai 68, et, après avoir surmonté les difficultés des transports parisiens de banlieue à banlieue, quand il est arrivé, il était le seul, les autres n’ayant pu rejoindre l’assemblée. Il faudra rechercher le passage de l’oeuvre de Jacques Roubaud, cet oulipien distingué, où il raconte peut-être la même réunion avortée.

Butor a beaucoup amusé la salle en racontant les problèmes d’organisation de ses œuvres dans son domicile, ou ses classifications sur son ordinateur. Il a expliqué comment il lui fallait reprendre des textes pour l’établissement de l’édition complète qui pourtant n’a pris que quatre années.

Ses considérations de critique géographique ont aussi passionné. Il a remarqué que son œuvre ne correspondait d’abord qu’à la zone de l’Empire romain. Il a élargi aux Amériques, à l’Asie. Puis constatant qu’il n’était jamais passé dans l’hémisphère sud, il est allé en Australie, etc. Mais, il lui restait encore des terrae incognitae, comme notre planète, sous nos pieds aussi inconnue que la face cachée de la lune photographiée par les Soviétiques.

Il a raconté comment il composait de la poésie très jeune, puis pourquoi il a écrit des romans (quatre) puis des critiques, et aussi des textes pour des artistes, puis comment la poésie s’est imposée. Par contre le théâtre a donné lieu à des expériences plutôt problématiques. Ainsi, a-t-il fait rire toute la salle en racontant comment un de ses textes devait être mis en scène dans un théâtre en forme d’œuf à Grenoble. Il détailla le jaune et le blanc de l’œuf architectural qui normalement étaient mobiles, puis la scène dans la pointe de l’œuf. mais malgré les acteurs, les décors, la mise en scène foira du fait que l’ingénieux mécanisme du théâtre ne fonctionna pas, sinon avec un bruit de Boeing!

On regretta que son faire valoir ait oublié de reposer la question suggérée au début concernant le titre Improvisations de l’un des volumes publiés.

En tout cas, pour ceux qui le connaissent un peu comme pour les autres, l’envie leur a été donnée de ne pas réserver ces ouvrages aux rayonnages des bibliothèques publiques. A nous tous, amis du monde et du langage, qui en fait d’ailleurs partie, de plonger dans l’océan Butor.

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