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Taser : un homme meurt après avoir reçu deux décharges

(Actualisé à 14h27).- Un Malien de 38 ans en situation irrégulière est décédé dans la nuit de lundi à mardi à Colombes (Hauts-de-Seine) après avoir reçu deux décharges du pistolet à impulsions électriques Taser pendant son interpellation par la police, a indiqué mardi une source policière.

L’Inspection générale des services (IGS, «police des polices») a été saisie d’une enquête par le parquet de Nanterre, a annoncé la préfecture de police de Paris (PP). «Au cours de l’interpellation, il y a eu usage de Taser par deux fois. A l’issue de l’intervention, la personne est décédée d’un malaise dont l’origine reste à déterminer», a expliqué à l’AFP une porte-parole de la police. Le directeur de Taser France, Antoine di Zazzo, a déclaré à l’AFP que «seule l’autopsie de cet homme permettra de dire si notre pistolet est responsable du décès». «A ce jour, dans le monde, le Taser n’a jamais tué quelqu’un», a-t-il assuré. Vers 23h30, selon la PP, des effectifs de la direction territoriale de la police de proximité (DTSP) des Hauts-de-Seine ont été appelés pour un différend rue Gabriel-Péri, à Colombes, entre l’homme et son ami qui l’hébergeait. Au moment du contrôle d’identité, l’homme, en situation irrégulière, toujours selon la préfecture de police, a tenté de frapper les policiers à l’aide d’un marteau. Il a «pété les plombs» et est allé chercher un gros marteau pour frapper l’un des policiers au niveau de l’arme accrochée à la ceinture, a dit la source policière. Selon la PP, les policiers intervenant ont fait usage de gaz lacrymogènes et d’un bâton de défense afin de le neutraliser «sans succès». L’homme, décrit comme violent et de forte corpulence par une source policière, s’est enfui dans les étages de l’immeuble. Il a à nouveau utilisé son marteau contre huit policiers dont quatre ont été légèrement blessés, selon la PP. La police a alors fait usage d’un pistolet à impulsion électrique car il était «très difficilement maîtrisable», selon la PP. Selon la source policière, les policiers ont tiré deux fois mais les décharges ne semblent pas avoir eu d’effet sur lui. Une fois maîtrisé, l’homme a été interpellé pour être emmené au commissariat mais il a fait un «malaise cardiaque» dans l’ascenseur, a encore dit la PP. Les sapeurs-pompiers qui étaient sur place pour soigner les policiers blessés ont porté assistance à la victime. Malgré l’aide du Samu, l’homme n’a pas pu être réanimé et est décédé vers 01h30, selon la PP. L’homme avait une autorisation provisoire de séjour datant de 1993, selon une autre source policière, donc non valable depuis des années. Le directeur du cabinet du préfet de police de Paris, Jean-Louis Fiamenghi, s’est rendu sur les lieux peu après les faits, a indiqué la PP.

ENCADRE : Le pistolet à impulsions électriques Taser
Le pistolet à impulsions électriques (PIE) Taser, est une arme de 4e catégorie comme un revolver ou un pistolet, et fait l’objet de critiques répétées, relancées après la mort d’un Malien dans la nuit de lundi à mardi à Colombes (Hauts-de-Seine). D’une portée inférieure à dix mètres, le Taser X26, modèle utilisé en France par la police nationale, la gendarmerie et l’administration pénitentiaire, propulse à la vitesse de 50 mètres/seconde deux électrodes reliées à un fil isolé. Au contact de sa cible, le PIE libère une onde électrique de 2 milliampères pour 50.000 volts qui bloque le système nerveux, tétanisant la personne visée durant quelques secondes. D’un coût de 1.500 euros, le Taser X26 est équipé d’une caméra intégrée filmant chaque utilisation et d’une puce enregistrant l’heure, la date, la durée de chaque tir et le nombre de tirs. Lors de leur formation obligatoire, les membres des forces de l’ordre doivent en recevoir une décharge. Quelque 5.000 Taser sont en service dans la gendarmerie, la police et l’administration pénitentiaire et l’usage de cette arme a été étendu à la police municipale au printemps. Selon la gendarmerie, l’usage du Taser a permis de réduire de 15% celui des armes à feu. En octobre, le Comité pour la prévention de la torture (CPT) avait jugé dans un rapport du Conseil de l’Europe que les PIE donnent lieu à une «utilisation abusive» et qu’ils ne devraient être utilisés que lorsqu’elles sont «la seule alternative possible à l’utilisation d’une méthode présentant un plus grand risque de blessures ou de décès». Selon la commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH), cet usage peut «s’avérer dangereux et constituer un traitement inhumain et dégradant contraire à la Convention». Après la mort d’un voyageur polonais en 2007, une enquête officielle canadienne a conclu en juin que l’utilisation du pistolet avait «contribué» au décès, une conclusion que le fabricant conteste en justice. Amnesty international France réclame «un moratoire» sur son utilisation et une «enquête approfondie et impartiale». Selon Amnesty international, plus de 290 personnes sont décédées aux Etats-Unis depuis 2001 après avoir été touchées par ces armes. Mais, selon Taser France, ces chiffres ne portent pas sur le même type de produit que celui utilisé en France. Selon une étude publiée en septembre 2007 par la revue des Samu de France, l’innocuité du Taser paraît confirmée «lorsque les précautions d’utilisation sont strictement respectées».

ENCADRE : Les policiers «contraints d’utiliser» le Taser
Le ministre de l’Intérieur Brice Hortefeux a justifié mardi l’utilisation du Taser à Colombes (Hauts-de-Seine) contre un Malien mort après avoir reçu deux décharges, affirmant que «les policiers ont été contraints» d’en faire usage. «D’après les premiers éléments, il apparaît que, face à l’agressivité et à la violence de cette personne (…), les policiers ont été contraints d’utiliser le pistolet à impulsion électrique», a déclaré le ministre de l’Intérieur lors d’un point presse. Il s’agit du premier décès en France coïncidant avec une utilisation du Taser. L’Inspection générale des services (IGS, la police des police) a été saisie par le parquet de Nanterre et par le ministère de l’Intérieur, a précisé Brice Hortefeux. «Les enquêtes sont en cours. Vous comprendrez que j’attends leurs conclusions pour prendre toutes les mesures qui s’imposent», a expliqué le ministre. «L’alternative au Taser dans le monde entier, c’est l’arme à feu, et là précisément il n’y a pas eu d’utilisation d’arme à feu. Il n’y a pas d’autre alternative au Taser», a assuré le ministre de l’Intérieur. Brice Hortefeux a par ailleurs indiqué qu’en 2009 le Taser avait été utilisé «à 822 reprises», sur «plusieurs millions d’interventions», par la police et la gendarmerie.