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Permettez-moi quelques commentaires à chaud sur la situation libanaise. Conformément à la constitution de ce pays, le gvt libanais est donc tombé suite à la démission de 11 ministres, soit plus d’un 1/3 de l’ensemble des ministres.
– Contrairement aux lectures qui ne vont pas tarder à s’imposer dans les principaux médias en France notamment, la décision de “l’opposition” est parfaitement légitime et ne s’apparente en aucun cas à un “coup d’État” dans la mesure où elle utilise les possibilités conférées par les règles du jeu politiques en vigueur. C’est aussi légitime que dans n’importe quel autre pays démocratique lorsque, par exemple, la démission d’une partie d’une coalition a pour effet de faire chuter le parti majoritaire en le privant du soutien nécessaire.
– De même, il est inexact de présenter la décision comme relevant du seul Hezbollah, cette perspective révèle une méconnaissance marquée du jeu politique libanais et des dynamiques propres à la coalition que constitue “l’opposition”. Le mouvement Amal dont le leader tient le troisième poste de l’Etat et plus encore le parti du général Aoun CPL constitue des mouvements importants et autonomes. L’assise électorale de Amal, l’autre grand parti chiite, partenaire-rival du Hezbollah, est au moins aussi importante que celle du Hezbollah. Si les intérêts des deux organisations coïncident, ils ne se superposent pas totalement. Surtout, il n’y a aucun doute sur le fait que le parti aouniste, à base essentiellement chrétienne, suit un agenda qui lui est propre essentiellement fondé sur une opposition ancienne et virulente au pouvoir économique et politique de la famille Hariri, beaucoup plus profonde que celle qui caractérise Amal et le Hezbollah.
– En troisième lieu précisément, “l’opposition” n’est plus l’opposition. Tout indique en effet que Joumblat (Parti socialiste) va prochainement concrétiser sur le plan parlementaire revirement politique entamé il y a deux ans et plaçant son parti et ses élus dans la coalition formée par l’ancienne opposition, formant ainsi une nouvelle coalition majoritaire susceptible de former le prochain gouvernement et à tous le moins, de forcer le courant du futur de se défaire de ses éléments les plus extrémistes et en premier lieu des Forces Libanaises voire des Kataëb (extrême droite maronite). Là encore, rien d’exceptionnel sur la forme, c’est le lieu commun de nombreux régimes parlementaires que de voir des coalitions politiques se former et se déformer en fonction de l’évolution du contexte politique ou autre.
– Enfin, reconstitué sur cette base, la majorité et le gvt sera susceptible de revenir sur les actes en revanche inconstitutionnels sur la base desquelles les décisions relatives au TSL ont été prises en toute impunité et avec le soutien occidental : décidé par un gvt illégitime puisque les ministres chiites l’avaient quitté et alors que le poste de président demeurait vacant après le départ du Président en poste, à l’issu de son mandat légal.
Aussi, la situation est-elle très critique pour les US et leurs alliés sur le point de perdre, en toute légalité, le pouvoir que l’opposition leur avait jusqu’alors permis de conserver en maintenant Joumblat dans la coalition formée autour du courant du futur malgré son revirement politique.
Si crise politique il y a, il ne s’agit pas pour le moment d’une crise constitutionnelle, les actions et décisions de l’ex-opposition restent parfaitement légales et légitimes.
Si le 14 mars et les pays occidentaux refusent la nouvelle donne politique au Liban comme cela semble se dessiner, ce sont eux qui se placeront en contradiction avec la légalité et le respect des institutions libanaises et porteront en fait la responsabilité des troubles qui en résulteront.
On appréciera de ce point de vue toute la subtilité de la position française étonnamment considérée dans la presse proche de l’opposition au Liban comme beaucoup plus nuancée que celle des USA et autres et apparemment pas complètement déterminée sur les positions qu’elle prendra.
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