Les Dernières Nouvelles d’Alsace ont publié ce mercredi ma réponse au pamphlet de Robert Grossmann qui tirait à la Grosse Bertha sur la Constitution de 1911…

La version ci-dessous est légèrement différente de celle des DNA, qui n’avaient pas tenu compte de quelques modifications et corrections de bourdes qui m’avaient échappé.

mon grand-père maternel Alsacien soldat allemand du second Reich

Antibochisme primaire

Et maintenant, tous en chœur, avec Robert Grossmann, « Nos ancêtres, les Gaulois... »

Sacré Robert!

Il n’a rien perdu de son style d’à-peu-près flamboyant. Il cause, long comme un jour sans Marseillaise, dans le Journal, les Dernières Nouvelles d’Alsace,ce mardi matin, 17 mai 2011, ça nous change du feuilleton DSK.

« Déployons les rétroviseurs, marche arrière toute! » s’exclame-t-il , tout en nuance, en titre de son pamphlet dans les DNA qui nous avertissent de la colère de l’ex UJP: « …cette célébration, notamment dans l’hémicycle du conseil régional, est inappropriée. » Et vlan pour Philippe Richert!

Dans le genre cocorico (et pas kireriki) le Robe’s est imbattable.

« En ce mois de mai, on va donc célébrer la Constitution…Pas la nôtre! Un constitution enfouie dans l’histoire dont, disons les choses franchement, tout le monde se fout…sauf quelques édiles, quelques universitaires et…des officines! Il s’agit de la constitution du Reich du Kaiser Wilhelm, un texte de 1911! ». Weh, il a oublié Hansi!

Vous avez compris? Il n’y a de Constitution que celle de la Ve République, de notre héros national, le général de Gaulle. Quoi, on célèbrerait une Constitution étrangère? Celle d’un pays ennemi, là, juste de l’autre côté du Rhin? Et vous voudriez que Robert Grossmann se tût? C’est ne pas le connaître! Déroulède, au secours!

Et cette Constitution, étrangère,« enfouie dans l’histoire », d’aucuns voudraient la déterrer, la dégager de l’oubli? « …un texte de 1911 »

Und was noch? Prenant le parti populiste et antiparlementaire de l’ignorance, Robert Grossmann part au galop sur le cheval de l’anti-intellectualisme: (« tout le monde se fout…sauf quelques édiles, quelques universitaires…», les élus, le président de l’Université de Strasbourg apprécieront!

L’instituteur Robert Grossmann nous fait ensuite une leçon d’histoire assaisonnée à sa sauce patriotique franco-française. Il est cependant obligé de reconnaître, après les destructions et l’exode de nombreux Alsaciens francophiles, que « le Reich bismarckien va reconstruire et agrandir Strasbourg pour en faire une ville emblématique de sa culture… ».
Mais le négatif l’emporterait:

« Pendant les longues années d’annexion (bien entendu Louis XIV, lui, n’a pas annexé l’Alsace…), une main de fer a germanisé nos régions… » .

Ah, bon? Les Alsaciens parlaient donc tous le français en 1870? Foutaises! Même les Français de l’intérieur, dans les autres provinces, n’ont été linguistiquement francisés qu’avec la première guerre mondiale!

Robert Grossmann révise l’histoire. Il passe sous silence le fait que l’Alsace appartenait à l’aire germanique dont elle était le cap occidental jusqu’en 1648, et que, malgré les efforts des amis de Robert, de droite comme de gauche, notre région est, pour une part encore, de culture et de langue allemandes avec les dialectes qui y sont encore parlés.

Ce n’est pas pour rien que le quartier allemand de la ville sert souvent de décor à des films qui se passent à Berlin dans les années 1910 d’avant la révolution allemande qui a aussi eu lieu ici avec les conseils de soldats et d’ouvriers en 1918.

On laisse aux historiens le soin de débattre ces prochains jours de cette Constitution et du degré plus ou moins grand d’autonomie qu’elle laissait aux Alsaciens à la veille de la grande guerre. Robert Grossmann ne semble pas le mieux placé pour un jugement objectif.

On voit bien sa cible : « Ceux qui en appelaient à une Alsace autonome en furent pour leurs frais. ». Il faut croire que le spectre de cette autonomie effraye encore Robert! Vade retro Satanas!

Ce qui énerve plus notre conseiller municipal c’est le lieu choisi pour le colloque, la salle du conseil régional. Et un direct du droit sur Philippe Richert! La « majorité alsacienne » est bien mal en point.

Ce qui domine cependant c’est l’antibochisme primaire.

« Que compte-t-on nous apprendre avec cette constitution, que certains veulent se réapproprier? Les grandeurs du Reich et de la germanité? Les bonheurs d’une Alsace autonome comme elle ne le fut pas avec la constitution de 1911? ».

Qu’à l’heure de l’Europe, et de la déjà vieille réconciliation franco-allemande, on en soit encore là, signe son bonhomme!

Qui, sinon, lui, parle de « modéliser cette période, de la vanter », confondant le travail de l’histoire et les leçons politiques qu’on peut en tirer, avec le domaine de la propagande qui est manifestement le sien?

« Il s’est passé des choses de 1911 à 1945 …», menace-t-il. Comme si on ne le savait pas! Mais de là à assimiler tout ce qui est allemand à la trique impériale du Kaiser (et Napoléon III?) et au nazisme?

Notre pamphlétaire voir le Teufel partout: un « appel à la fête nationale alsacienne », « des lectures publiques » (on croyait que Grossmann aimait lire?), « une manifestation autonomiste place Kléber », « d’autres événements inattendus »…Et une dernière dose d’anti-germanisme: « Bref certains vont ressusciter (il ne dit pas commémorer) le 30 mai 1911, l’esprit nimbé de nostalgie (forcément, la nostalgie) et les regards embués tournés par-delà le Rhin» – Le Rhin Français, ou la Gallia, ex-Germania!- lui ne regarde, depuis la Robert-sau que vers l’ouest…

Ce ne sont que des « actes militants rétrogrades et obscurantistes ». Fermez le ban. Section, en avant, avec le caporal-chef Grossmann, drapeau tricolore en tête, (au fait tu changes quand ton patronyme germanique? ) pour reconquérir la rive gauche du Rhin, ce fleuve si français qu’il arrête les particules radioactives venus de l’est…

Jean-Claude Meyer
17 mai 2011

Documents

http://mjp.univ-perp.fr/constit/de1911alsacelor.htm

http://www.lalsace.fr/actualite/2011/05/11/la-constitution-de-1911-des-cles-pour-aujourd-hui