L’intégrale…avec les commentaires.
Soit il a été censuré par le Journal, soit il a un peu modifié son texte par la suite…
Voici ce qu’on peut lire sur son blog :
Ah le Reich de Wilhelm! Déployons nos rétroviseurs, marche arrière toute!
Par Robert Grossmann le mardi, 10 mai 2011, 16:17 – Lien permanent
Alors que jadis j’allais à la Maï Andacht – Maïdel Jagt, (1), aujourd’hui on me parle de célébrer de toute autres déités, moins envoûtantes.
Ce mois de mai 2011 sera celui des commémorations et des petites opérations de « révision ». Après Mitterrand et Bob Marley on va célébrer la Constitution… Pas la nôtre ! Une constitution enfouie dans les accessoires de l’histoire dont, disons les choses franchement, tout le monde se fout…sauf quelques édiles, quelques universitaires et … des officines ! Il s’agit de la constitution du Reich du Kaiser Wilhelm de 1911 !
Quelques éléments de contexte : En aout 1870 Strasbourg tombe sous un feu de bombes et d’obus lancés depuis la rive Kehloise du Rhin, tuant plus de 300 strasbourgeois et détruisant une grande partie de notre ville dont, entre autres, le choeur de la cathédrale, l’orphelinat, la bibliothèque et son précieux Hortus Déliciarum. C’est le général prussien Von Werder qui est à la manœuvre. Les strasbourgeois vont le surnommer von moerder, (le meurtrier), c’est dire avec quelle joie Strasbourg est devenue allemande.
Certes le Reich bismarkien va reconstruire et agrandir Strasbourg pour en faire une ville emblématique de sa culture, pensant la garder à tout jamais comme « limes » occidental.
Signe des temps cette partie de ville très réussie est aujourd’hui de plus en plus célébrée sous l’appellation « Ville d’Empire ». C’est tellement gratifiant, pour un maire par exemple, de se sentir un peu en terre d’empire, maire d’empire, et ça vous rehausse la silhouette, et ça vous grandit le discours !
Donc ce régime prussien idyllique que l’on s’apprête à fêter au cours de notre joli mois de mai a commencé par pousser hors d’Alsace Lorraine quelque 159.740 optants qui, par fidélité à la France, ont été contraints de s’expatrier.(2) Une grande partie de l’élite, nombre d’intellectuels, d’artistes, de chef d’entreprise refusant le Reich prussien ont ainsi quitté l’Alsace pour Paris, l’Algérie, les Etats Unis et d’autres pays du monde.
Le maire de Strasbourg, Emile Kuss, s’en est allé mourir à Bordeaux, de chagrin, dit-on aussi. Les députés emmenés par Keller et Kablé ont adressé de solennelles protestations au gouvernement de la France vaincue, d’avoir accepté de lâcher l’Alsace-Moselle qui ne voulait pas devenir allemande. Hélas en vain.
Pendant les longues années d’annexion c’est une main de fer qui a germanisé nos régions. Ce fut une dictature, tout le monde s’accorde à le dire. Alors qu’une vague massive de 400.000 immigrés allemands d’autres régions du Reich était venue repeupler l’Alsace Lorraine, le sentiment français n’a jamais pu être définitivement éradiqué.
le mythe de l’autonomie, une réalité en trompe l’oeil.
Si, au bout de 40 années d’ordre prussien mâtiné de tentatives de libéralisation, le Kaiser fut contraint d’accorder une constitution plus ouverte à l’Alsace en supprimant les paragraphes concernant la dictature, celle ci ne fut qu’un faux semblant de cette autonomie qui était alors revendiquée. (à laquelle certains rêvaient (2)
En effet que dit-elle?
Art. 1 Le pouvoir d’État en Alsace-Lorraine est exercé par l’Empereur.
Art. 2 À la tête du gouvernement se trouve un Statthalter, nommé et révoqué par l’Empereur avec contre-signature du chancelier impérial.
Elle énumère la composition des deux chambres formant le Lantag, elle évoque les élections au suffrage universel direct et, en 28 articles au total, elle met en place la gestion administrative des trois départements. On prend soin d’intituler à l’article 5 des « Landes Gesetze » (lois du Land, que d’aucuns appellent nation ou état !) proclamées par l’empereur avec l’accord du Landtag.
Il n’est pas question ici de procéder à une analyse juridique de cette constitution, simplement d’en évoquer quelques traits dont l’art 25 qui parle de l’égalité de traitement des confessions. Un thuriféraire commente : l ‘égalité de traitement des confessions est un concept supérieur à celui de la laïcité française, qui néglige de s’en préoccuper en les évinçant de la sphère publique (3)
Par ailleurs, ce qui n’est pas un détail, le Kaiser détenait un droit de veto sur les délibérations du Landtag et, naturellement, la langue officielle était l’allemand.
Cette constitution fut jugée « passablement décevante » et on se demanda même si l’empereur avait réellement l’intention de l’appliquer, tant il était vexé de constater que les alsaciens lui étaient présentés comme « décidément hostiles » (5). Quoi qu’il en soit, ceux qui en appelaient à une Alsace autonome en furent pour leurs frais.
D’ailleurs c’est après la mise en place de ces textes que les incidents les plus marquants contre le Reich se développèrent: vote par le Landtag d’un blâme au sous secrétaire d’Etat à l’intérieur Mandel ; affaire de Saverne. La population supportait de moins en moins la raideur, les insultes et l’ordre prussiens.
Il y eut des exceptions, des prussiens à visage humain, Von Wedel le Stathalter et son admirable épouse Stéphanie en furent.
Trois ans après cette constitution, en 1914, Friedrich Curtius, collaborateur du Stathalter Hohenlohe est obligé de constater que la germanisation n’a pas réussi. Il n’est pas le seul. (4)
Plus qu’un faux pas
Bien que cela incommode au dernier degré les actuels militants du Reich et d’un freies Elsass, qui cherchent à instaurer une pensée officielle unique et magnifiante sur ce pan de l’histoire de notre région, Hansi a bel et bien existé, dessiné et écrit . L’on pourrait aussi convoquer l’abbé Wetterlé, le docteur Bucher, ou Rodolphe Reuss parti s’installer à Paris tout comme Gustave Doré ou Jean Jacques Henner, mais les insultes se mettraient à pleuvoir et tous les discrédits de la terre viendraient les ensevelir.
Nous sommes aujourd’hui en 2011. Certes il est normal que des amateurs étudient cette partie de l’histoire de l’Alsace et donc qu’ils relèvent aussi ses aspects positifs. L’université en est le lieu. Célébrer cette période dans l’hémicycle officiel du Conseil régional d’Alsace constitue plus qu’un faux pas…
Au fond que compte-t-on donc nous apprendre avec cette constitution et dans quel but ?
Qu’y a-t-il de si exceptionnel qui soutire toutes ces nostalgies et que la France n’aurait pas réussi à mettre en œuvre?
Réinstaurer un Kaiser serait inédit et redevenir Reichsland pittoresque.
Si ce n’est dans l’idée de personne, alors quoi ? Une Alsace autonome comme elle ne le fut pas avec la constitution de 1911 ?
Lorsque j’ai appris que l’on allait célébrer cette constitution « de manière pédagogique » (sic) je suis resté coi. Mais si déjà certains s’y lancent, il est impossible de ne pas la contextualiser ni d’oublier l’évolution de l’histoire. Il s’est passé des choses de 1911 à 1945, puis à la période contemporaine…
Mais, aux manifestations dites scientifiques ou pédagogiques que le Conseil Régional actuel a décidé de patronner et de cautionner pour inscrire son projet de conseil d’Alsace de 2011 dans le sillage de celui de 1911, (on ne comprend pas la logique tellement tout cela est anachronique) sont venus se greffer des manifestations qui ont une toute autre connotation.
Voici un Appel à la « fête nationale alsacienne » (sic) organisé par des officines dont on connaît la ténacité et les orientations.
Voici des « lectures publiques » sous le haut patronage des éminences les plus officielles, état, région, département du Bas-Rhin.
D’autres événements inattendus sont encore susceptibles de surgir…
Bref une vraie fête avec des célébrations nimbées de nostalgies où, les regards embués vont tous suivre la même direction pour s’éclairer aux lumières alémaniques, à la Heimat de jadis.
Cet appel à venir célébrer la constitution d’Alsace Lorraine à l’occasion d’une fête nationale alsacienne, (re sic) adossée aux manifestations qui se veulent scientifiques et officielles ( ?!), n’est rien d’autre qu’un acte militant rétrograde et obscurantiste.
Mais hélas, la confusion va règner entre ce qui se voudrait pédagogique et instructif, (on se demande toujours de quoi) et ce qui est militant. Chacun est prié de faire le tri et Dieu reconnaîtra les siens.
Que de grands élus et l’Etat déploient ainsi le rétroviseur, qu’ils ouvrent de manière officielle une boite de Pandore et cautionnent indirectement (à l’insu de leur plein gré) ces démarches arriérées est consternant et en dit long sur les « visions de l’Alsace » à venir.
(1) mois de Marie – chasse aux filles)
(2) F. L’Huillier, L’Alsace dans le Reichsland, in Philippe Dollinger Histoire de l’Alsace 1970(3)
(3)La constitution d’Alsace Moselle de 1911 sur internet https://mail.google.com/mail/?hl=fr&shva=1#inbox
L’introduction met les pendules à l’heure du révisionnisme et commente :
• Respect des minorités ;
• Traitement des questions religieuses ;
• Décentralisation des décisions et principe de subsidiarité ;
• Représentation du pays légal et de la société civile
• A bien des égards, la république française d’aujourd’hui est en retard par rapport à l’empire allemand de 1911.
•(4)R. von Thadden ,« Elsass Lothringen und das Kaiserreich » dans das Vergangene und die Geschichte (P.79-104)
(5) F. L’Huillier, ibidem
P. S. Puisque le Conseil Régional est désireux de s’instruire et de rechercher des exemples pédagogiques dans le passé, on pourrait demander officiellement qu’un colloque soit organisé sur le Conseil souverain d’Alsace de Louis XIV qui, lui, et quelles que soient toutes autres considérations, fut le véritable inventeur d’une Alsace unifiée
Puis un colloque sur la politique de la Révolution en matière de traitement des régions
Enfin un colloque sur l’apport de Napoléon 1er à l’organisation administrative de la France
Des commentaires :
Le mardi, 17 mai 2011, 08:54 par Elsasser
Je partage votre étonnement Monsieur Grossmann.
“Enfin un colloque sur l’apport de Napoléon 1er à l’organisation administrative de la France”
et sur la modernisation de l’Alsace jusqu’en 1870 par Napoléon III et de la France en général.
2. Le mardi, 17 mai 2011, 15:22 par Helms Paul
Bravo, je partage votre avis, pour toutes les raisons que vous indiquez, mais aussi parce que je suis favorable au Conseil unique. Ce débat ambigu sur 1911 pollue singulièrement celui sur l’avenir institutionnel de l’Alsace. Certaines nostalgies me semblent bien présentes.
Bien fidèlement, Paul Helms
3. Le mardi, 17 mai 2011, 16:50 par Sosthène
Merci M Grossmann pour votre ” point de vue” du 17 mai dans les DNA, c’est une réaction salutaire.
Malheureusement, l’avenir que vous décrivez, je le vois poindre depuis un bon moment et cette histoire de “conseil d’Alsace” n’en n’est qu’une (grossière) étape.
Est-ce là la finalité de l’Europe ?
Il est clair que “les Alsace d’abord” tiendront, de plus en plus, le haut du pavé !
D’autant plus lamentable que conseil régional et conseils généraux etc… marchent à fond dans la combine!
Que dois-je faire, moi qui ne suis pas alsacien, dois-je préparer mes valises ?
Salutations
4. Le mardi, 17 mai 2011, 17:47 par Elsasser
Complément à mon message du 17 mai à 8h54.
Avec la commémoration que vous déplorez ci-dessus Monsieur Grossmann, nos concitoyens de l’intérieur, enfin, certains, vont encore dire : “Voyez, les Alsaciens sont quand même des “Boches” ! Et il va nous falloir une fois de plus leur expliquer notre francitude !!!!
5. Le jeudi, 19 mai 2011, 11:44 par jimili
Il est possible de voir le problème franco-français de plusieurs angles. Le centralisme que l’on pense être fort reste ce qui nous affaiblit tout, tous.
Vous avez raison de relever qu’il s’en est passé des choses, surtout depuis 1918 où le Traité de Versailles a eu comme conséquence le nationalisme partout en Europe, et souvent les dictatures ont pris comme référence et modèle notre Etat et son administration centralisés! Le franquisme a d’ailleurs eu les mêmes pratiques envers ses régions et populations qui perdurent chez nous, et en Alsace. Qui voudrait en Europe le franquisme et ses pratiques? Personne, et je veux croire que vous non plus. (je n’aborde même pas une autre…) Je rappelle aussi que les principes d’autodétermination sont directement issus de la Première Guerre Mondiale, mais pourquoi donc la France les a-t-elle voulu pour toute région européenne, et ne les a-t-elle jamais mis en pratique pour ses propres territoires?
6. Le jeudi, 19 mai 2011, 16:27 par Robert Grossmann
Remes je ne publie pas les insultes sauf les miennes : du besch a ganz dawwer Seckel
7. Le vendredi, 20 mai 2011, 10:36 par Elsasser
Monsieur Grossmann vous avez raison et ça sent si bon le terroir.
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