Le gouvernement français a lancé un débat sur « l’identité nationale », en y consacrant les moyens publics importants. Les préfectures, les établissements scolaires sont mis à contribution pour l’organiser. Les internautes sont invités à s’exprimer sur un site dédié. Malgré des précautions oratoires, la problématique du débat lie défense de l’identité et migrations internationales : « Comment mieux faire partager les valeurs de l’identité nationale auprès des ressortissants étrangers qui entrent et séjournent sur le territoire national ? ».
Dans un pays qui connait une crise sociale, économique, financière grave, choisir de lancer un débat sur ce thème et dans ces conditions conduit à préférer désigner un bouc émissaire que chercher à la résoudre.
Le souci de fidéliser au profit de l’UMP et de ses alliés l’électorat du Front national n’a pas échappé non plus à la plupart des commentateurs.
Pour le MRAP, l’identité d’un pays, la France ou un autre, à un moment déterminé de son histoire ou dans son évolution, peut être un sujet de recherches ou de débats pour les historiens, les géographes, les sociologues, mais pas un projet politique. Elle est le fruit de l’histoire, d’influences multiples et n’est jamais figée dans le temps. Ce ne peut être qu’un constat, sans aucune valeur normative.
Vouloir fixer des normes pour une « identité nationale » présente plusieurs dangers :
– chercher un modèle de société dans un passé plus ou moins lointain, qui de toute façon ne reviendra pas et dans lequel peu de gens voudraient effectivement vivre est complètement illusoire;
– définir une norme « identitaire », fondée sur une origine ou des racines, qu’elles soient « raciales », ethniques, religieuses, etc.. conduit immanquablement à exclure celles et ceux qui sont jugés moins conformes à cette norme;
– elle bloque enfin toute évolution d’une société, la nouveauté étant par essence ce qui n’est pas dans la norme, ce qui n’est pas conforme à « l’identité » du moment.
C’est pourquoi un tel débat, dans ses intentions et dans ses objectifs, n’est pas acceptable pour le MRAP.
La vie ensemble, l’exercice de la démocratie par le peuple souverain, doivent s’organiser non pas sur une origine commune plus ou moins mythique, mais sur un vouloir vivre ensemble, un projet citoyen commun.
Ce qui ronge notre pays, ce n’est pas un crise « identitaire », mais une crise de citoyenneté, un déficit de démocratie, de solidarité sociale.
Les causes en sont nombreuses, multiformes, elles s’interpénètrent et concernent à des degrés divers tous les habitants de notre pays. Citons, de manière non exhaustive :
– la destruction de services publiques au nom de la libre concurrence
– la mondialisation libérale et le dumping social
– la crise de la démocratie représentative qui éloigne de plus en plus le citoyen des centres de décision.
Au lieu de se crisper sur une « identité » qui est forcément passée et dépassée, il faut réfléchir et agir pour définir des projets citoyens communs pour le monde de demain :
– citoyen dans son quartier, sa commune, etc..
– citoyen dans son entreprise
– citoyen dans son pays
– citoyen d’une Union européenne qui doit elle aussi définir un projet de société pour le bien de tous et non se replier sur des « racines »
– citoyen pour un monde en paix, solidaire et responsable devant les générations futures.
Le MRAP, avec ses comités locaux, ses commissions, ses instances, souhaite donc engager en son sein un grand débat sur la construction des citoyennetés de demain.
Il invite les associations, syndicats, mouvements et partis qui partagent les mêmes valeurs à lancer à leur tour de tels débats dans leur domaine d’action.
De la convergence et la synthèse de toutes les propositions, nous ferons naître ensemble une alternative citoyenne et porteuse d’avenir aux projets mortifères du gouvernement.
Paris, le 13 novembre 2009.
Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples
43 bd Magenta – 75010 Paris – Tél. : 01 53 38 99 99
Site web : http://www.mrap.fr
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