Monsieur Luc CHATEL ,

Ministre de l’Education nationale,                       Colmar, 20 juin 2011

Rue de Grenelle

75 015 PARIS

Monsieur le Ministre,

Après plus de 30 ans d’enseignement dans le service public, j’ai l’honneur de solliciter une réponse personnelle  à la question que se posent parents et enseignants depuis que la presse a enquêté sur le « Coup de canif dans le paritarisme » (DNA du jeudi 16 juin) et « Bilinguisme : le recteur relance les hostilités » (1ère page de L’ALSACE » du samedi 18 juin) : la politique  restrictive que tente de nous imposer la nouvelle rectrice de l’Académie de Strasbourg, Mme M-L P, suit-elle des directives ministérielles ou agit-elle de sa propre autorité (voir articles de la presse régionale , que je  joins, ce qui évitera des redites inutiles!)

Au moment où votre  ministère supprime des classes (tant monolingues que bilingues) et des postes d’auxiliaires de vie scolaire, cette initiative risque de relancer une guerre scolaire dont nous nous serions passés à un an d’élections à la fois cruciales et incertaines intéressant l’avenir du pays tout entier.

Cette « sortie » tombe au moment où M. KLOTZ, président du MEDEF 67 vient de demander à l’académie de “RELANCER  un bilinguisme volontaire”  (voir article DNA du mardi 14 juin 2011, joint). Il y affirme que “la perte du bilinguisme naturel, accessible par la pratique de l’alsacien, contribue très largement au déclin de l’activité en Alsace, et donc à la croissance du chômage”

-au moment où 2 éventuels candidats aux Présidentielles sont à Strasbourg (dans le cadre des « 100 idées pour la France” voir  DNA du jeudi 16 juin, jour de l’interview du recteur !)

-au moment où les« 62èmes journées d’études » réunissent  en congrès1500 avocats français et allemands à Strasbourg pour parler des relations juridiques franco-allemandes  (voir photo des ministres  Michel MERCIER et Frau LEUTHEUSSER-SCHNARRENBERGER dans « L’ami du Peuple » du 10 juin )

Comme rien dans la carrière de Mme le recteur ne semblait la prédisposer à des compétences en matière d’enseignement des langues, nous sommes nombreux à nous demander si elle n’a pas été mal conseillée par des I.P.R. d’allemand ( pourtant  auteurs de manuels d’allemand pour classes bilingues paritaires ou s’il ne s’agit pas simplement d’obtenir des économies budgétaires et de toucher ainsi cette fameuse prime de 22. 000 euros !

Après  le « Rapport de l’Inspection Générale  de l’Education nationale et de l’I.G.A.E.N.R. sur l’ “Evaluation de l’enseignement dans l’académie de Strasbourg » (n° 2006-060 d’octobre 2006) qui dit par exemple (2.3.4.) que : ” le sentiment prévaut que l’allemand est enseigné de la même façon à Strasbourg qu’à Lille ou à Limoges, même lorsque le public scolaire est composé en partie d’élèves dialectophones… ( et que) le potentiel linguistique est sous-exploité , notamment par une progression exagérément ralentie… “, nous pensions que la politique de votre ministère allait évoluer dans le bon sens !

Or c’est le contraire qui se produit : malgré les lettres des présidents des 3 Collectivités Territoriales d’Alsace, toujours pas de CAPES bivalents, ni de véritable formation professionnelle  (et même suppression du C.F.E.B.°°  de Guebwiller), toujours pas d’aménagement des conditions de passation des concours nationaux qui permettraient enfin d’embaucher les meilleurs enseignants germanophones et de les nommer là où ils sont nécessaires, etc…

Si  le  véritable but de cette manœuvre  était  d’économiser de l’argent public ou de suppléer le manque criant d’enseignants bilingues, le calcul  de Mme le recteur serait complètement faux et bancal. En effet, si l’on veut que le même enseignant parle tantôt français , tantôt allemand pendant ses cours, il faudrait 100 enseignants bilingues (pour 100 classes primaires), alors qu’aujourd’hui il n’en faut que 50, enseignant en  allemand, (et 50, enseignant en français) dans  les 100 mêmes classes , sans parler de la non-prise en compte du principe de Ronjat-Grammont (« un enseignant/une langue »), appliquée dans l’ensemble de la Francophonie !

On dirait plutôt que le vrai but est de casser une pédagogie qui, partie de zéro après des décennies d’interdiction, progresse depuis 20 ans (et  permet  aujourd’hui à 19 000 enfants -de toute origine sociale-  de devenir bilingues à partir de l’école maternelle )

Nous sommes très inquiets de ce retour en arrière de 30 ans et de cette rupture de toutes les conventions signées par nos 3 collectivités alsaciennes et vous prions de manifester clairement que  cette tentative de « coup de canif » ne vient pas de vous et sera annulée.!

Dans l’attente d’être rassurés, nous prions, Monsieur le ministre, de bien vouloir comprendre notre inquiétude et notre souci de l’école publique !..

Richard WEISS, Professeur Certifié de Lettres Classiques

30, rue de Wettolsheim  68 000 Colmar

°° C.F.E.B. : Centre de formation à l’Enseignement Bilingue, créé dans les locaux de l’ancienne Ecole Normale puis I.U.F.M. de  Guebwiller 68400,  sur des fonds des Collectivités Territoriales alsaciennes et fermé à la dernière rentrée !

COPIE à :

-M.Henri GOETSCHY, sénateur et Président honoraire du conseil Général du Haut-Rhin,

-M. Gérard CRONENBERGER, maire d’Ingersheim et Président de l’AEPLAL et du Comité Fédéral des associations pour le bilinguisme en Alsace et Moselle,

-M. Yves RUDIO, Président de LEHRER,

-M. Claude FROEHLICHER, Président de l’association de parents d’élèves ELTERN,

-M. Thierry LOTH, Président de l’association de parents d’élèves APEPA,

-M. Jean-Marie WOEHRLING, Président de la « René-Schickele-Gesellschaft », 6, boulevard de la Victoire 67 000 Strasbourg,

-M. Henri SCHERB, Président de l’association HEIMETSPROCH und TRADITION, Rue de la Grotte 68230 Walbach,

-SGEN-C.F.D.T. rue de Provence 68 200 Mulhouse

-Mmes et MM  les députés et sénateurs des 2 départements du Rhin,

-la presse

ci-joint : coupures de presse des 2 quotidiens régionaux L’ALSACE  et les « Dernières nouvelles d’alsace » (du mardi 14 au dimanche 19 juin 2011),

de l’hebdomadaire « L’AMI du PEUPLE »