Tandis que la loi réformant l’hospitalisation d’office est entrée en vigueur le 1er août, des psychiatres et défenseurs des droits de l’homme appellent la profession à une « résistance éthique » contre ce texte jugé liberticide.
Avec la promulgation de la loi du 5 juillet 2011 sur les soins psychiatriques sans consentement, les psychiatres ont peut-être perdu une bataille contre ce texte décrié mais peut-être pas encore la guerre. Le 1er août, jour de l’entrée en vigueur de la nouvelle législation qui réforme l’hospitalisation d’office, les organisations signataires du collectif Mais c’est un homme, dont l’Union syndicale de la psychiatrie (USP), ont publié une « déclaration d’entrée en résistance » contre ce texte. « Nous ne devons respecter les lois que si elles-mêmes respectent le droit, en l’occurrence les libertés individuelles et l’intimité privée », considèrent les signataires, qui proposent « un plan d’action et de résistance éthique ».
Le collectif appelle notamment les psychiatres et soignants à refuser « tout programme de soins contraint à domicile », tel que le prévoient la loi du 5 juillet et ses décrets d’application du 18 juillet. « De même, il faut opposer un refus de tout avis médical sans avoir pu examiner le patient » comme cela est envisagé dans les textes. Le collectif encourage également à saisir systématiquement le juge des libertés et de la détention tout en s’opposant au recours d’audience judiciaire par visioconférence. Moyen pourtant privilégié par le législateur au regard des problèmes structurels de la Justice. Il est également important pour les psychiatres, poursuivent les signataires, d’informer suffisamment le patient dans les 72 premières heures de son hospitalisation d’office durant lesquelles doit s’élaborer le programme de soins sans consentement. Le collectif souhaite également mettre en place un pôle d’avocats et de juristes pour soutenir les recours et défenses des patients soumis à des soins sans consentement. Ce plan d’action passe enfin par « la construction d’un observatoire national de suivi de l’application de cette loi » assurant « le recueil de données, l’alerte aux droits des personnes soumises aux soins sans consentement » et rapportant aux autorités compétentes en matière de respect des libertés individuelles, indique le collectif.

Le sort des patients.

À ce jour, près de 1 500 personnes de tous horizons ont paraphé cette déclaration d’entrée en résistance vis-à-vis d’une nouvelle législation qui peine déjà à se mettre en place en cette période estivale. L’initiative du collectif Mais c’est un homme semble cependant être considérée avec une certaine distance de la part d’une grande partie des syndicats de psychiatres, à l’image du Comité d’action syndicale de la psychiatrie (CASP), qui réunit les principales organisations représentatives de la profession. « Aucune organisation professionnelle ne devrait donner comme consigne de ne pas appliquer la loi », estime le Dr Alain Vaissermann, président du CASP. « Ce qui nous importe au quotidien, c’est le sort des patients. Si, par exemple, avec la nouvelle loi, les professionnels ne peuvent plus faire de sorties d’essai, ils seront bien obligés de faire des programmes de soins. On ne va pas laisser moisir un patient à l’hôpital par refus d’appliquer la législation. » Pour le Dr Vaissermann, « l’application concrète de la loi va poser suffisamment de problèmes pour que le législateur revienne dessus ».
› DAVID BILHAUT
 du 24/08/2011