par Gérard Deneux
A contrecourant
Ce que l’on veut nous faire croire, en brandissant le manque de compétitivité dont souffrirait l’économie française face à ses concurrents, consiste à faire admettre le besoin d’allègement massif des «charges» sociales (voir encart «Rappel») que subirait le patronat ainsi que la nécessaire suppression des contraintes réglementaires qui l’empêcheraient de s’adapter à la concurrence : la flexibilité des salariés serait donc requise pour mieux s’ajuster à la demande. Derrière cette novlangue il y a la réalité d’une stratégie dite de croissance partagée par les gouvernants. De Sarko à Hollande rien de changé fondamentalement. Quand l’un jurait qu’il allait «chercher la croissance avec les dents» le suivant promet qu’il «va redonner des chances à la croissance». Tous les deux brandissent les mêmes recettes : réduction des dépenses de l’Etat, donc des services publics et diminution des charges et contraintes qui pèseraient sur le capital. Sauf que la majorité dite de gauche entend aller plus loin et taper plus fort que Sarko sous la pression de Merkel, de la Troïka et la menace des marchés. Pour démontrer la supercherie de cette construction rhétorique, il convient d’abord de saisir la réalité qui réside derrière les mots compétitivité, flexibilité afin d’en souligner la logique antisociale.
Compétitivité : de quoi parle-t-on ?
Restons d’abord dans la logique du système capitaliste : il y a lieu de différencier la compétitivité «coût», de la compétitivité «hors prix».
Si l’on envisage le premier terme (le coût), faire baisser le prix des produits signifie : baisse des coûts des matières premières, des revenus distribués aux actionnaires, dont on ne parle pas, pour insister sur la seule variable qui reste la baisse de la masse salariale, en allégeant massivement les cotisations sociales patronales afin de les transférer sur la TVA et (ou) sur la CSG. Les contribuables salariés sont donc mobilisés pour accroître la compétitivité.
La compétitivité «hors prix» renvoie à la nature des stratégies patronales qui misent (ou non) sur les innovations techniques et sur la qualité des produits qu’elles entendent mettre sur le marché. Or, force est de constater qu’en France, secteurs privé et public confondus, la Recherche et Développement ne représente que 2.1% du PIB alors qu’elle est de 2.8% en Allemagne. Si l’on s’en tient au secteur privé, l’écart est encore plus significatif : 15 milliards à comparer aux 31 milliards allemands. La différence ne réside pas seulement dans le choix de la rente pour le capitalisme français (dividendes aux actionnaires) mais également sur la politique d’externalisation des grandes firmes du CAC 40 qui sous-traitent aux PME françaises. Les donneurs d’ordre les pressurent par la concurrence, entre sous-traitants, pour accroître leurs profits et les localiser dans des pays à faible fiscalité, voire dans les paradis fiscaux. En Allemagne, la sous-traitance est internationale (pays de l’Est surtout) pour la production, l’assemblage se réalise en Allemagne. En outre la précarisation, et donc la baisse de la masse salariale, est beaucoup plus avancée depuis les contre-réformes du « socialiste » Schroeder (voir annexe).
Une autre dimension de la compétitivité (en fait, la supériorité concurrentielle) n’est guère évoquée : l’euro, de 2002 à 2008, s’est réévalué de 78% par rapport au dollar, freinant les exportations hors de l’Europe, sauf pour les produits haut de gamme. La Banque Centrale Européenne –BCE- (bien que prétendument indépendante !), n’envisage pas de se heurter, dans une guerre commerciale, aux Etats-Unis, de se confronter à cette puissance par une dévaluation de l’euro.
Plus fondamentalement, le choix a été fait dès la fin des années 70, de pratiquer une politique de désindustrialisation qui s’est accélérée à partir des années 80 : la part de la «valeur ajoutée» (de la richesse sociale produite) de l’industrie a fortement chuté de 19.2 à 15.5% dans la zone euro, de 17 à 13% en France. D’après la Direction du Trésor, les salariés dans l’industrie française représentaient 5.3 millions d’emplois en 1980 et seulement 3.4 millions en 2007 (de 24 à 13% du total). Deux phénomènes expliquent cette baisse : d’une part, l’externalisation de certaines tâches exécutées auparavant par les usines (transport, logistique, informatique) a permis de transférer ces emplois (moins bien rémunérés) dans des entreprises dites de service. D’autre part, la délocalisation des secteurs productifs est censée procurer un avantage compétitif par recours à une main d’œuvre à bas coût (Allemagne dans les PECO : la Logan en Roumanie…).
Reste, pour finir, la partie immergée de l’iceberg du capitalisme financiarisé : l’utilisation de sociétés, de filiales d’un même groupe et la pratique de «prix transferts (commerce intra-groupes) qui permet de localiser les «bénéfices» dans un pays à fiscalité avantageuse, voire dans les paradis fiscaux (dont on ne parle plus !!!).
Tous ces éléments sont évidemment absents du débat public. Et pour cause, le choc de compétitivité ou le pacte «hollandiste» vise essentiellement à faire supporter le «manque» de compétitivité aux salariés et aux contribuables.
Toujours les mêmes solutions
Avant même l’élection de Hollande et la mise en place de sa politique, celle de son prédécesseur concernant les exonérations et allègements de cotisations patronales dégressives jusqu’à 1.6 SMIC n’a pas été remise en cause. Ces décisions représentent, pour 2012, 30.6 milliards d’euros soit 12.5% des cotisations, et par conséquent 3% de la masse salariale dont ne s’acquitte pas le patronat. L’Etat, donc les contribuables, compense avec retard, et encore ( !), à 95 %. Or, les cotisations sociales, qu’elles soient ouvrières ou patronales, constituent le salaire socialisé qui sert à payer les retraites, la protection sociale et le chômage. Cette baisse de la part socialisée du salaire transférée sur les ménages (fiscalité, TVA ou CSG) non seulement met en danger la Sécurité Sociale mais, plus fondamentalement, consiste à faire payer aux salariés et aux ménages le «manque de compétitivité» des entreprises. Quant à enrichir la croissance en emplois (par des «facilités» d’embauche), ce n’est que propagande. D’ailleurs, la Cour des Comptes dans son rapport de 2009, avec son langage euphémisé ne s’y est pas trompée : c’est une politique «à l’efficacité incertaine» dont il faut «reconsidérer l’ampleur voire la pérennité». Tout au plus peut-on convenir qu’elle a procuré un effet d’aubaine : se débarrasser des mieux payés pour embaucher à un salaire inférieur à 1.6 fois le SMIC. La composition de la file des chômeurs en a peut-être été altérée, mais non son ampleur.
De même, Hollande n’a nullement remis en cause les crédits «recherche octroyés qui profitent essentiellement aux grandes entreprises, bien que l’UMP (par Gilbert Carrez) ait déclaré en son temps que «ce n’est pas efficace et (de plus) très coûteux…», 1.5 milliard en 2008, 4 milliards en 2009. Encore faut-il préciser que, pendant cette période, les crédits dépensés par le secteur privé en matière de recherche et développement n’ont progressé que de 200 millions !!! Il est avéré que ces «cadeaux», sur lesquels aucun contrôle n’est effectué, sont utilisés comme outil d’optimisation fiscale.
Malgré ses promesses de campagne, le contorsionniste matois en reniements a abandonné ses velléités de réforme de l’impôt sur les sociétés, parfaitement injuste : 28% sur les petites entreprises, 13% sur les grandes et pour les firmes du CAC 40, de 8 à 0% comme Total !
Mais, là où il fait fort et mieux que Sarko, tout en continuant la baisse des effectifs dans les services publics (sauf pour l’école, la police et la justice), c’est ce qu’il appelle les crédits d’impôt aux entreprises sur cotisations sociales qui représentent un cadeau de 20 milliards sur 3 ans (!). Comme il s’interdit (et tous les plumitifs socialos avec lui ?) tout droit de regard sur leur utilisation «compétitive», il s’agit là d’un chèque en blanc. Il y a fort à parier que les contribuables salariés ne verront guère danser les étiquettes des produits à la baisse, encore moins diminuer la rémunération des actionnaires. En revanche, pour financer ces largesses, ils constateront l’augmentation des taux de TVA (10 milliards) et la baisse des dépenses publiques (10 milliards).
Cette généreuse politique qui nous fait les poches entend être approuvée (par «consensus participatif» !) par les syndicats dont certains membres intégreront les comités d’entreprises et Conseils de surveillance… S’ils élevaient trop la voix en dehors de ces cénacles fermés, Hollande pourrait leur rappeler qu’au seul cri des pigeons, il a cédé 800 millions d’euros.
Et encore plus
La flexibilité du travail, réclamée à cors et à cris par le MEDEF, ce que Sarko n’a pu accomplir, lui qui vantait le modèle allemand, Hollande peut-il le faire avec l’appui de certaines centrales syndicales ? Pour faire passer la pilule, avec Ayrault, il faut désormais parler de flexisécurité. De quoi s’agit-il ? Patrons, ouvriers unis pour affronter la compétitivité ! C’est, de fait, l’accentuation d’une politique de rentabilisation à outrance de l’exploitation du travail qui doit suivre les fluctuations du marché, la variation de la demande, la conquête ou la perte des parts de marchés face aux concurrents. Dans la langue de bois néolibérale on appelle cela le nouveau management : zéro stock, juste à temps, pour le client, qui s’accompagnent d’un «contrôle par objectif». Les rapports au travail en sont «modifiés» : chasse aux temps morts, suppression des pauses, annualisation du temps de travail, travail en équipes pour rentabilisation des équipements avant obsolescence, recours au travail de nuit, le dimanche… Toutes ces méthodes consistant à adapter les heures travaillées au niveau d’activité des entreprises concurrentes provoquent stress, mobilité forcée et se conjuguent avec la remise en cause des statuts et des conventions collectives. Le recours à l’intérim, aux CDD, aux contrats «aidés», précaires, ne suffit pas.
L’enjeu de la Conférence Sociale Paritaire prochaine vise toujours et encore à faire baisser la masse salariale en brandissant la menace des suppressions d’emplois. Déjà, le coût des licenciements économiques a été réduit par la possibilité (trompeuse) pour les salariés de négocier (préventivement, dit-on !) leur départ (rupture conventionnelle du contrat de travail). Reste le rempart des conventions collectives par branches à faire sauter, pour permettre ainsi, sous la férule d’une menace, des «négociations» par entreprise avec diminution et des salaires et de la durée du travail. Dans les petites et moyennes entreprises, là où les syndicats sont faibles, celles qui sont tout particulièrement pressurées par les donneurs d’ordre, il sera dès lors aisé de faire varier la masse salariale en fonction des résultats de l’entreprise, quand bien même celles-ci ne seraient que des (quasi) filiales de l’entreprise mère. Il s’agit, ni plus ni moins, de casser les droits sociaux collectifs et les identités de métiers. Mutations, reclassements ou stages bidons s’opèreront sans tenir compte des qualifications acquises (comme à France Télécom) car seule comptera l’employabilité requise (pour ne pas dire sujétion).
Dans la novlangue néolibérale, il ne s’agira en définitive que d’imposer aux syndicats des «clauses (dites) d’ouverture» par lesquelles ils accepteraient, pour sauver l’emploi ( !) des modifications de la durée du travail, de «travailler plus pour le même salaire», de «travailler autant pour un salaire inférieur» ou des périodes de chômage (dit) technique.
Une politique mortifère
Dans le cadre dit de libre échange, cette stratégie repose sur la croyance que la «croissance» ne peut venir que des exportations, sur le gain de parts de marchés à conquérir au détriment des concurrents, sur la recherche du profit pour seul critère. La seule variable d’ajustement est, par conséquent, dans cette logique, de comprimer la masse salariale ce qui revient à réduire le pouvoir d’achat et donc la demande interne. La régression sociale qui s’en suit, aggravée par la diminution des dépenses publiques visant essentiellement à rassurer les créanciers de l’Etat sur ses capacités de remboursement, conduit inéluctablement à la récession et au chômage de masse. Restent, pour soutenir la consommation intérieure, l’incitation au crédit et, par conséquent, les dépenses de publicité1. L’apparition de bulles d’endettement privé est dés lors inéluctable comme ce fut le cas en Espagne, notamment. Cette guerre économique entre Etats et groupes capitalistes, provoque l’endettement et la sujétion des pays les plus faibles, l’élimination des entreprises les moins «compétitives» et donc, la concentration-restructuration des secteurs les plus rentables. La croissance des uns c’est la dépendance ou l’élimination des autres. La «fameuse» croissance prônée ne peut qu’être inégalitaire et chaotique.
De cette logique mortifère, il faut sortir pour faire prévaloir la coopération et la complémentarité entre les productions des différents pays européens, tout en harmonisant par le haut les systèmes sociaux. Cette évidence, nullement partagée par les forces politiques dominantes doit d’autant plus s’imposer que la «croissance», telle qu’elle résulte du système capitaliste en crise, est derrière nous. Et ce, pour plusieurs raisons :
L’endettement de la plupart des pays européens, qui résulte de la baisse des impôts en faveur des plus riches et du sauvetage des banquiers et des spéculateurs, est intenable. Tout comme le sont l’accroissement des inégalités, du chômage de masse, le ralentissement du niveau éducatif, la réduction des périmètres des services publics en voie de délabrement. La reproduction de la force de travail peut, dans ces conditions, être compromise ; on parle déjà, en ce qui concerne les jeunes, de «génération sacrifiée» (sur l’autel du capital transnational).
Quant aux salariés soumis à la logique de la compétitivité, la précarisation généralisée les guette. Le nouveau management compétitif incite à «l’intensification» du travail, à la concurrence «interne» entre les chômeurs, les précaires et les travailleurs à statuts et à la concurrence «externe» avec les ouvriers et employés d’autres pays. Cette guerre entre tous est intenable. La multiplication des suicides, dépressions, accidents du travail, la dégradation de la santé, les troubles musculo-squelettiques, en sont les principaux symptômes, tout comme le délabrement moral d’une grande partie de la jeunesse sans perspectives.
Le rebond du système capitaliste en l’absence d’innovations majeures dans les pays occidentaux est des plus aléatoires à moins de considérer la guerre entre tous comme une «destruction créatrice» permettant un nouveau sursaut. En effet, pour l’heure, aucune «révolution technologique» majeure, tel le passage successif de l’industrie charbonnière à l’industrie pétrolière n’est envisageable. La course à la «compétitivité», à l’octroi d’avantages dits «comparatifs» implique une marche forcée vers la folie énergétique. L’extraction forcenée du gaz de schiste aux USA, provoquant des dégâts irréversibles, en est le dernier exemple en date.
Plus fondamentalement, la raréfaction des ressources naturelles non renouvelables annonce de véritables pénuries si la logique mortifère de la compétitivité est poursuivie. La hausse tendancielle du prix des matières premières ne ferait qu’exacerber la guerre économique. Pour ne citer que quelques exemples moins connus que ceux du pétrole et du gaz, signalons que les gisements de plomb, utilisé notamment pour les batteries, seront épuisés vers 2030. A un coût admissible donc exploitable, il en est de même pour l’argent (entre 2021 et 2027), pour le cuivre (2040) et pour le nickel (2050).
Il apparaît donc évident, outre la nécessité de réduire les émanations de CO2 et de gaz à effet de serre, que les innovations doivent être fondées sur la sobriété énergétique et la durabilité des produits et non leur obsolescence sur laquelle repose le productivisme capitaliste.
Un cul de sac et quelques pistes
La politique menée depuis des années par l’OMC, incitant notamment à la réduction voire à la suppression des droits de douanes, et par conséquent au libre échangisme généralisé, a accéléré l’exacerbation de la concurrence mondiale. Il pourrait paraître légitime de ré-instituer des protections douanières vis-à-vis des produits importés, tout particulièrement ceux provenant de pays à bas salaires ou aux comportements sociaux et écologiques suscitant la réprobation. Ces mesures, outre qu’elles pénaliseraient certaines transnationales françaises ou européennes qui ont délocalisé en partie ou en totalité leur production, auraient immédiatement des effets d’enchaînement ; des mesures de rétorsion seraient prises par les Etats prétendument lésés dans leur commerce extérieur, les grands groupes et les banques «cosmopolites» s’y opposeraient et, par réflexe, l’exaltation nationaliste s’en suivrait. Cette voie sans issue, prônée par l’Extrême Droite, de protection du capitalisme national opèrerait donc le passage de la guerre économique à la guerre comportementale, xénophobe contre l’étranger. Au sein des pays européens qui réalisent leurs échanges à 60/70% entre eux, elle n’est qu’un cul de sac si l’on ne modifie pas, pour le moins, le modèle économique qui y prévaut.
Pour en sortir, la socialisation des banques interdites de spéculation, débarrassées de leurs filiales résidant dans les paradis fiscaux, soumises aux financements de projets utiles à la collectivité fondés sur leurs qualités sociales et environnementales, serait la première mesure phare permettant d’instituer une autre politique. Elle pose immédiatement la question de la nature du pouvoir politique qui, dans un ou plusieurs pays, oserait rompre avec la logique du capitalisme financiarisé. La planification démocratique que suppose cette rupture, implique l’émergence d’une ou de forces politiques reposant sur une mobilisation sociale d’ampleur. Il n’est pas d’autres pistes possibles pour le bien être des peuples que celles visant, en Europe au moins, la relocalisation d’activités et de productions de proximité, l’harmonisation par le haut des systèmes sociaux différents et l’instauration, par conséquent, de la démocratie sociale supposant l’irruption politique des peuples sur la scène politique et ramenant à la portion congrue les oligarchies qui nous dominent.
Malgré les obstacles à surmonter pour faire advenir une telle perspective, depuis 1995 les lignes ont bougé. De la défensive, les peuples passent de l’indignation à la révolte. En France, tout particulièrement, le parti dominant à Droite se déchire, le parti Solférino fait la démonstration jour après jour que les reniements sont inscrits dans ses gênes. Un espace politique est en train de s’ouvrir. Encore faut-il élargir la brèche en suscitant la confiance, l’espoir dans les regroupements favorisant l’émancipation sociale et les unions pour faire vivre, ici et maintenant, l’union pour la démocratie sociale.
Gérard Deneux
Le 6.12.2012
Rappel
Les cotisations ouvrières et patronales (dites «charges» dans la novlangue libérale) constituent un salaire indirect ou salaire socialisé (dit encore différé), mis en quelque sorte en réserve afin que les salariés puissent faire face «aux accidents ou aléas de la vie» (maladie, retraite…). Ainsi, en cas d’arrêt de travail, les salariés continuent de percevoir une rémunération et d’accéder aux soins et aux remboursements subséquents. Le principe de solidarité mis en œuvre et géré par la Sécurité Sociale (du moins à l’origine) qui prévaut, consiste à cotiser selon ses moyens (en pourcentage du salaire perçu) et d’avoir accès aux prestations sociales selon ses besoins, quelle que soit l’importance des frais occasionnés. Cette règle est à l’exact opposé de l’assurance individuelle : plus il y a de risques, plus la cotisation est élevée. Dans cette optique, les personnes âgées gravement atteintes, les malades dont les soins nécessitent des interventions onéreuses, ne peuvent se soigner que s’ils disposent de revenus importants.
La baisse des cotisations patronales procure un «gain» pour les entreprises dispensées, ainsi, de rémunérer le salaire socialisé. C’est donc une baisse du salaire socialisé à laquelle on assiste qui semble compensée par la hausse d’impôt ou des taxes (CSG ou TVA dite sociale). Le contribuable, dans ces conditions, participe financièrement à la place des employeurs.
La baisse des cotisations ouvrières (évoquée par le MEDEF) pour faciliter la mise en place d’une baisse des «charges» patronales se présente, en apparence, comme un gain pour les salariés. Leur salaire net augmente du fait de la baisse des cotisations ouvrières. En fait, comme pour la baisse des cotisations patronales, c’est le salaire socialisé qui est réduit et compensé ( ? partiellement ?) par l’impôt et les taxes.
Ces contre-réformes visent au delà des «cadeaux» consentis au patron à fragiliser la Sécurité Sociale, à inciter les salariés à recourir aux mutuelles et assurances privées et, par conséquent, à détruire à petits pas le système de solidarité.
Annexe
Le modèle allemand de régression sociale
Celui-ci, tant vanté par Sarko, a certes pris de l’avance sur celui de la France. Il a été mis en place par la «Gauche» de 2003 à 2005, sous le gouvernement Schroeder. Ce sont tout particulièrement les lois Hartz, du nom du DRH de Volkswagen qui les a élaborées. Elles ont produit les effets les plus «compétitifs» donc les plus dévastateurs pour nombre de salariés allemands. Elles s’inscrivent dans une particularité qu’il faut avoir en tête : il n’existe pas de salaire minimum réglementaire (SMIC) dans ce pays. Les mesures appliquées peuvent se résumer comme suit :
Les chômeurs doivent accepter et s’adapter (flexibilité et «employabilité» l’exigent) à n’importe quel emploi proposé, même si le salaire est inférieur à leur indemnité chômage. En cas de refus, les indemnités chômage sont supprimées
La durée d’indemnisation est limitée à un an pour les travailleurs âgés
Les allocations de longue durée ont été fusionnées avec l’aide sociale et plafonnées à 345€ par mois
L’âge légal de la retraite est reculé pour atteindre progressivement 67 ans en 2017
Des mini-jobs payés 400€ ont été institués, ils sont exemptés de cotisations sociales donc sans aucune assurance sociale pour les « mini » salariés qui «bénéficient» ( !) de ces mesures
Des jobs à 1€ de l’heure, pour l’essentiel des travaux d’intérêt public, sont instaurés
Les conventions collectives ont été abrogées dans nombre d’entreprises dites «en difficulté». Celles qui demeurent ne concernent plus que 40% des entreprises. La dégradation a été rapide. 76% des salariés en 2002 bénéficiaient de conventions collectives. Ils n’étaient plus que 62% en 2012. Cohabitent désormais deux sortes de salariés : ceux des industries exportatrices et les autres, ceux qui travaillent dans les services, les précaires, les retraités pauvres… Il en a résulté une baisse globale du pouvoir d’achat avec des différences inégalitaires notables. Par rapport à l’inflation, de 2003 à 2010, les mieux payés ont perdu 4%, les salaires les plus bas 12%… 23% des salariés gagnent moins de 9.15€ de l’heure.
Le taux de chômage officiel (6.1% en juillet 2011) est trompeur. Des millions de chômeurs et précaires radiés, dépendant de l’aide sociale ne sont pas pris en compte… tout comme la montée du travail précaire qui concerne près de 2 millions d’actifs (CDD, mini-jobs, temps partiels, intérim…), dont 40% sont des femmes. La comparaison entre le nombre de chômeurs indemnisés en 1995 et en 2008 est plus que significative. Ils étaient 80%, ils ne sont plus que 35% ; ceux qui ne le sont plus dépendent de l’aide sociale dérisoire (345€/mois).
Ce pays, vanté, connaît une quasi stagnation de la demande de son marché intérieur, sa population vieillissante régresse : 82 millions en 2003, 81.8 en 2011.
Le coût du capital en France
Dans les sociétés non financières donc dans l’industrie et les services, les revenus distribués par rapport à la valeur ajoutée (la richesse produite) ont connu une très nette progression. Ils représentaient 5.6% en 1999 et 9% en 2012. Le capital rentier se porte de mieux en mieux…
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