RIA Novosti –
Agence russe
14 janvier 2010
http://fr.rian.ru/discussion/20100113/185812892.html

Par Andreï Mourtazine, RIA Novosti

Le premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a approuvé dimanche
dernier le projet de construction d’un mur de protection le long de la
frontière avec l’Egypte d’un coût approximatif de 300 à 400 millions de
dollars.

Il s’agit, en fait, d’un nouveau mur frontalier en béton, doté de
systèmes électroniques modernes de surveillance à l’instar de celui
qu’Israël a construit en Cisjordanie la dernière décennie. Le nouveau
“mur de protection” passera à proximité de la bande de Gaza ainsi que
dans la région de la ville balnéaire israélienne d’Eilat située sur la
mer Rouge.

L’idée de Benjamin Netanyahou de construire un nouveau mur en béton à la
frontière avec l’Egypte « en vue de préserver le pays des terroristes et
des clandestins » n’a rien de nouveau. En 2002, le premier ministre
étant alors Ehoud Barak, suivi d’Ariel Sharon, Israël avait commencé à
ériger un “mur de sécurité”, en isolant plusieurs villes et villages
palestiniens de Cisjordanie du territoire de l’Etat hébreu. Les
militaires israéliens reconnaissent eux-mêmes que le “mur de sécurité”
n’a réglé que partiellement le problème de la sécurité. Seuls les
Palestiniens et les étrangers dont les noms figurent sur les “listes
noires” des services de sécurité israéliens se voient interdire l’accès
légal en Israël. Les autres Arabes, qui peuvent être des terroristes
potentiels, ayant des papiers en bonne et due forme passent facilement
les postes de contrôle et pénètrent en Israël.

Selon Benjamin Netanyahou, le nouveau mur devrait protéger le pays des
contrebandiers et des clandestins, surtout en provenance des pays d’Afrique.

La frontière égypto-israélienne couvre une distance de plus de 250 km.
C’est, pour l’essentiel, le désert du Sinaï qui est devenu, selon la
police israélienne, le point de passage illégal préféré sur la
frontière, là où passent des centaines de clandestins, non seulement en
provenance d’Afrique, mais même des pays de la Communauté des Etats
indépendants (CEI) ; or beaucoup d’entre eux ont un passé criminel. En
outre, c’est de l’Egypte que peuvent pénétrer les “bombes vivantes” du
Hamas en faisant un détour par Eilat. En 2007, un kamikaze avait pénétré
en Israël par cette voie et commis un attentat.

Certes, les appréhensions des autorités israéliennes sont justifiées.
Mais la question est de savoir quelle sera l’efficacité du nouveau mur
et s’il est capable de “verrouiller” les 200 km du désert où se
déplacent jusqu’à présent pratiquement sans entrave des nomades locaux,
les Bédouins égyptiens et israéliens, qui servent, en règle générale, de
guides aux illégaux.

Notons qu’un mur de protection est en train d’être érigé contre les
terroristes, les contrebandiers et autres intrus non seulement par
Israël, mais aussi par son voisin arabe l’Egypte. A vrai dire, le “mur
égyptien” sera non pas terrestre, mais souterrain, et non pas en béton,
mais en métal. Le but poursuivi est de se protéger des contrebandiers
palestiniens qui ont particulièrement redoublé d’activité après le
blocus imposé par Israël autour de l’enclave palestinienne rebelle
contrôlée par le Hamas. Le mur souterrain passera le long de la
frontière entre l’Egypte et la bande de Gaza et sa longueur sera
d’environ 10 km.

Selon la BBC, les autorités égyptiennes, avec l’appui du génie militaire
américain, enfoncent dans le sol à une profondeur d’environ 30 mètres
des boucliers blindés en acier qui devront bloquer les nombreux tunnels
des contrebandiers existant ou projetés.

La question du terrorisme est aussi actuelle pour le Caire que pour
Tel-Aviv, c’est pourquoi la réaction égyptienne à la décision de
Benjamin Netanyahou a été plus que réservée. C’est “une affaire
intérieure d’Israël”, a déclaré le ministère égyptien des Affaires
étrangères. Les médiateurs égyptiens essaient en vain, depuis trois ans,
de réconcilier les mouvements palestiniens opposés, le Fatah et le
Hamas, et, parallèlement, de ranimer le dialogue palestino-israélien.
Cela étant, la construction du “mur souterrain” est aussi une action
politique, un signal lancé par l’Egypte aux dirigeants du Hamas le
prévenant que la patience du Caire a ses limites, tout comme le champ de
manœuvres politique des dirigeants islamistes, et comme aussi,
d’ailleurs, les actions militaires, ainsi que l’a éloquemment montré la
guerre menée l’année dernière dans la bande de Gaza (l’opération
antiterroriste israélienne “Plomb durci”).

Il est peu probable que de nouveaux ouvrages militaires, que ce soit un
nouveau mur frontalier ou un “rideau de fer” souterrain, puissent
protéger Israël et l’Egypte du terrorisme et de l’extrémisme. Ce
problème est avant tout politique, mais le gouvernement de Benjamin
Netanyahou n’est enclin à faire des compromis ni au Hamas, ni au Fatah,
le mouvement modéré de Mahmoud Abbas. La construction de colonies de
peuplement qui se poursuit dans les territoires palestiniens de
Cisjordanie contrairement à la volonté de la communauté mondiale et le
blocus de la bande de Gaza ne feront qu’envenimer la confrontation.
Quant au “processus de paix au Proche-Orient”, on peut l’oublier, du
moins avec le cabinet israélien actuel.