RESF, Réseau éducation sans frontières
Manuel Valls a annoncé, le 5 novembre 2013, 16 600 régularisations en application de sa circulaire de novembre 2012, dont 81 % de parents d’enfants scolarisés, soit 13 446. Les travailleurs et les lycéens se partagent les 3 154 régularisations restantes. Cette annonce, faite dans le contexte des manifestations lycéens provoquées par l’expulsion de Khatchik et de la famille de Léonarda était peut-être une tentative de donner du ministre un visage moins inhumain. C’est raté. Pour mémoire, la circulaire Sarkozy de 2006 avait permis la régularisation de 22 018 parents d’enfants scolarisés, soit 8 500 de plus que Valls.
Même si elles sont loin d’être généreuses, les conditions mises à la régularisation des familles offrent un horizon : 5 ans de présence, 3 ans de scolarisation, ce peut être éloigné, très difficile. Mais c’est une échéance, un espoir, ce qui est loin d’être le cas pour les autres catégories. En effet, comme il était prévisible, seule une toute petite fraction des salariés a pu fournir les preuves d’activité exigées (8 mois au cours des deux années précédentes) alors qu’évidemment, la quasi-totalité d’entre eux travaille d’une façon ou d’une autre.
Quant aux jeunes majeurs scolarisés seule une toute petite minorité remplit les conditions très restrictives de la circulaire : avoir été scolarisé avant son seizième anniversaire et présence en France de l’un des parents. Les jeunes récemment arrêtés (puis expulsés ou relâchés) en sont l’illustration, en plus de tous ceux qui, faute d’être dans les clous n’ont même pas déposé de demande. Au total, à peine plus de 3 000 travailleurs et jeunes scolarisés ont été régularisés.
Présentée comme une réponse humaine et ferme destinée à clarifier et à uniformiser les conditions de régularisation des familles sans papiers, des travailleurs et des jeunes majeurs scolarisés, la circulaire Valls de novembre 2012 a, dans les faits, manqué quasiment tous ses objectifs officiellement proclamés.
Passons sur la prétention à l’humanité du ministre de l’Intérieur : la poursuite du placement en rétention des enfants, l’assignation à résidence de familles obligées de se cacher pour échapper à la police, les menaces d’expulsion d’enfants malades, le démembrement des familles, les expulsions d’Ahmed Sohail, de Léonarda, de Khatchik et de tant d’autres, hélas, disent ce que valent ses propos.
La « clarification » annoncée s’est, elle aussi, révélée une tromperie : il suffit de parcourir les douze pages de jargon technocratique prétentieux de la circulaire pour le mesurer.
La circulaire visait aussi, officiellement, à « l’uniformisation » des conditions de régularisation entre les diverses préfectures. Un an plus tard, l’arbitraire complet continue de régner, chacune des préfectures continuant à exiger, selon sa fantaisie, voire selon celle du guichetier, une diversité et une quantité variable de documents, toujours plus, toujours autre chose, toujours des suspicions, des humiliations.
La circulaire Valls est à l’image de la politique migratoire du gouvernement, sans vision, sans rupture avec la politique précédente, souvent mesquine, inhumaine, arbitraire… L’exact opposé de ce que réclament la jeunesse et les lycéens qui n’acceptent pas que le destin de leurs camarades dépende de lois injustes, condamnées hier, et du « discernement » plus ou moins grand de policiers ou de préfets. La loi doit changer, l’interdiction de l’expulsion des scolaires imposée dans les faits par les manifestations lycéennes doit entrer dans les textes et entraîner la régularisation de droit des scolaires et de leurs familles.
Grosjean comme devant.
Le pouvoir nous ballade par Monts et par Valls