Action collective
Quand l’Aide Sociale à l’Enfance et France Terre d’Asile expulsent des mineurs isolés en plein hiver
La dégradation de la situation des mineur·e·s isolé·e·s et des jeunes majeur·e·s étrangers, dans de plus en plus de départements de France, a été maintes et maintes fois dénoncée par le Gisti. Les motifs de refus pour que ces jeunes soient pris en charge par les services de l’Aide sociale à l’enfance ne cessent de se multiplier : contestation de leur minorité, de leurs documents d’état civil, de leur isolement effectif… Rien d’étonnant dans ce contexte à ce que naissent des mouvements à l’initiative de ces jeunes dont on dénie le droit à la protection qui leur est due.
Vendredi 20 décembre, 6 mineurs isolés étrangers, hébergés jusqu’alors par le dispositif de mise à l’abri du 5 rue Stendhal (DMA Stendhal) dans le 20e arrondissement de Paris, se sont vu signifier, sans doute en guise de cadeau de Noël, leur exclusion de ce foyer. Cette décision revient à jeter ces jeunes isolés à la rue, sous 48 heures, mettant ainsi leur santé et leur vie en danger. En pleines fêtes de fin d’année, la trêve hivernale ne semble pas devoir s’appliquer pour ces “présumés majeurs”. Cette mesure inhumaine ne fait que donner un coup de projecteur sur les conditions d’accueil inacceptables et dramatiques que réserve notre pays à ce public particulièrement vulnérable et méconnu.
A l’appel de la CGT et d’associatifs, un rassemblement a été organisé le jour même à 14 h, regroupant jeunes du foyer, membres d’associations, d’organisations politiques et syndicales, travailleurs sociaux, professeurs de ces jeunes et citoyens de l’arrondissement. Le Directeur Général de France Terre d’asile, association responsable de la gestion de ce dispositif dépendant de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE), s’est adressé aux personnes rassemblées et s’est engagé :
- à ce que les jeunes concernés ne soient pas mis à la rue d’ici les 15 prochains jours ;
- à demander à l’ASE d’organiser durant ce sursis une rencontre réunissant l’ASE, l’association France Terre d’asile, des représentants des jeunes du DMA , ainsi que les associations, syndicats, organisations, partis engagés dans la défense des droits des jeunes étrangers – et en premier lieu dans la défense de leur droit au logement.
Les jeunes menacés aujourd’hui d’expulsion sont en fait depuis des mois dans ce centre d’hébergement qui ne devrait en principe les accueillir que pour la brève période nécessaire à l’organisation de leur prise en charge effective et pérenne. Or les jeunes placés au centre Stendhal y restent bien souvent des mois durant, sans que soient prévues pour eux ni scolarisation ni activités sportives ou éducatives, ni sorties, ni autre soutien psychologique que celui que peuvent apporter des travailleurs sociaux en grave sous-nombre.
Un représentant syndical s’est exprimé pour dénoncer les conditions de travail et d’accueil au sein du DMA Stendhal, soulignant les 15 démissions enregistrées depuis 6 mois, dénonçant les moyens humains inadaptés – 2 travailleurs sociaux pour 75 jeunes, et les conditions d’hygiène et de sécurité déplorables. Les salariés réclament des moyens pour mener à bien la mission éducative qui leur est confiée ; ils souhaitent que la Ville de Paris, financeur de ce foyer, mette en place un audit de fonctionnement ; enfin, ils demandent que l’ASE cesse ses pressions sur les jeunes scolarisés, et lève l’interdiction qui leur est faite d’aller à l’école.
Les organisations et les citoyens, désormais engagés dans cette démarche, affirment leur volonté de continuer à exercer leur devoir de vigilance, non seulement pour que soient tenues les promesses faites à l’issue du rassemblement du 20 décembre, dont la prolongation de l’hébergement des six jeunes aujourd’hui en danger, mais au-delà, pour une véritable remise à plat des conditions d’accueil, de protection et de respect des droits des jeunes isolés étrangers.
24 décembre 2013
Signataires : CGT action sociale, ADMIE, FASTI, GISTI, MRAP, RESF, Syndicat de la magistrature, bénévoles de l’ADJIE
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