La Feuille de Chou pratique

Accès aux Allocations Familiales pour les enfants étrangers entrés en France
en dehors de la procédure de regroupement familial

Législation :

Cadre général : loi du 29 décembre 1986 complétée par ses décrets d’application,

Documents ouvrant droit :

– Carte de séjour temporaire d’un an renouvelable

– ou un récépissé de demande de renouvellement de titre temporaire

– ou une autorisation provisoire de séjour de plus de 3 mois

Cependant l’article D512-2 du Code de la Sécurité Sociale modifié stipule que, pour bénéficier des Allocations Familiales, les enfants nés à l’étranger doivent être entrés en France au titre du regroupement familial, ou entrés en France en même temps que l’un de leurs parents, à condition qu’une attestation dans ce sens leur soit délivrée par l’autorité préfectorale.

Ces différentes conditions sont très contraignantes de sorte qu’un grand nombre de familles ne peuvent les remplir, situation jugée discriminatoire par une jurisprudence de la Cour de Cassation du 6 décembre 2006 qui considère que le refus des allocations familiales, au motif que les enfants ne sont pas entrés en France selon la procédure du regroupement familial « porte une atteinte disproportionnée au principe de non-discrimination et au droit à la protection de la vie familiale. » Cette jurisprudence s’appuie sur les articles 8 et 14 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, tout comme divers avis de la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Egalité, notamment celui du 1er octobre 2007. Un avis de la Défenseure des Enfants du 9 juin 2004, qui s’appuie sur l’article 3 de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant va dans le même sens.

Dans la pratique :

Les Caisses d’Allocations Familiales appliquent cette règlementation de façon très différente selon les départements. Ainsi la Caisse d’Allocations Familiales de Touraine (CAF) refuse systématiquement, lors d’une première demande, le bénéfice des allocations familiales si les enfants de la famille étrangère ne sont pas rentrés sur le territoire selon la procédure du regroupement familial.

Cependant, la Commission des Recours Amiables de la CAF Touraine (CRA), saisie en deuxième instance, accorde le droit aux prestations familiales aux familles qui remplissent les conditions de titre de séjour. A ce jour, aucune des familles épaulées par le Réseau Education Sans Frontières et l’Association Chrétiens-Migrants n’a été obligée de recourir au Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale (TASS) pour faire valoir ses droits.

Marche à suivre :

Les formulaires de Déclaration de situation familiale proposés aux guichets de la CAF et à ses permanences ne sont pas adaptés à la situation de ces familles, il est donc inutile de les renseigner. Cela peut même considérablement ralentir l’obtention des prestations.

Première étape :

Faire une lettre de demande d’allocations familiales à la Direction de la CAF Touraine, 1 rue Alexander Fleming, 37045 TOURS cedex 9, et l’envoyer en Recommandé avec Accusé de Réception (voir modèle n°1). Joindre à cette demande :

– photocopie du titre de séjour en cours de validité,

– photocopie du livret de famille ou des extraits d’actes de naissance des enfants,

– photocopie du certificat de scolarité de tout enfant âgé de plus de 6 ans,

– Et préciser, sous l’adresse du demandeur, son numéro d’allocataire s’il bénéficie déjà de certaines prestations (APL, RSA, allocations familiales pour les enfants nés en France…).

Au bout de 4 à 6 semaines la personne demandeuse reçoit une lettre de la Direction de la CAF l’informant que l’attribution des allocations familiales est impossible ou ne sera possible que sur présentation :

– soit du certificat médical de l’OFII (Office Français d’Immigration et d’Intégration, ex-OMI, ex-ANAEM).

– soit de l’attestation préfectorale précisant que les enfants sont entrés sur le territoire français en même temps que leurs parents.

Aucun de ces documents ne peut être fourni par le demandeur puisque :

a) Le certificat de l’OFII n’est délivré qu’aux enfants entrés dans le cadre du regroupement familial.

b) La Préfecture refuse systématiquement de délivrer les attestations d’entrée en France des enfants.

Il est alors indispensable de procéder à la :

Deuxième étape :

La personne fait un recours contre cette décision de refus, auprès de la Présidence de la Commission des Recours Amiables de la CAF Touraine (voir modèle n°2) (et non au service contentieux de la CAF). Joindre à ce recours :

a) La photocopie du premier courrier adressé à la Direction de la CAF,

b) La photocopie de la réponse de la CAF.

Expliquer dans ce recours que la Préfecture refuse de convoquer les enfants à l’OFII et refuse également de délivrer l’attestation d’entrée des enfants sur le territoire français. Qu’en conséquence le demandeur se retrouve dans une situation de non-droit qui n’est pas de son fait.

Ce courrier doit également être adressé en recommandé avec accusé de réception.

La CRA étudie ce recours et prend une décision ; nous avons de nombreux exemples d’attribution des allocations familiales avec versement des arriérés à compter de la date d’obtention du titre de séjour temporaire.

Dans le cas où le titre de séjour serait une carte de séjour « salarié » la procédure est la même que pour un titre de séjour « vie privée et familiale ». Faire une demande de regroupement familial quand les enfants sont déjà en France représente une perte de temps et n’a pratiquement aucune chance d’aboutir.

On peut trouver une analyse plus détaillée des textes et de la jurisprudence dans la revue du GISTI Plein droit n°77 de juin 2008.

Modèle n°1 : lettre de demande à la Direction de la CAF

<Nom et adresse de la famille> <lieu, date>

n° allocataire : ————-

R/AR

Madame la Directrice de la

Caisse d’allocations

familiales de Touraine

1 rue Alexander Fleming

37045 TOURS Cedex 9

Objet : demande du bénéfice des

allocations familiales

Madame la Directrice,

Titulaire d’une carte de séjour temporaire <type> valable jusqu’au ——– 20–, renouvelable, délivrée par la Préfecture de —- (pièce jointe n°1), j’ai à ma charge — enfants, présents sur le territoire français depuis mon arrivée en France le — Ces —– enfants sont :

– <pour chaque enfant préciser : prénom NOM, date et lieu de naissance, (copie de l’extrait d’acte de naissance, p.j. n° 2), scolarisation (p.j. n° 3), titulaire du document de circulation pour étranger mineur (DCEM) valable jusqu’ en —— (p.j. n° 4). > N.B. Ce document n’est pas indispensable, mais peut être utile.

– —————————-

Si une demande de regroupement familial a été faite et rejetée, le préciser ainsi :

Le ———— 20—, j’ai fait auprès de la Préfecture de ————- une demande de regroupement familial, pour mes trois enfants. Cette demande a été rejetée par la Préfecture le —————-, aux motifs suivants :

– enfants déjà présents en France,

– <voir sur le document de la Préfecture.>

S’il n’a pas été fait de demande de regroupement familial, il est inutile de l’indiquer. Poursuivre la lettre comme suit :

Il existe une jurisprudence de la Cour de Cassation qui considère que le refus du regroupement familial ne fait pas obstacle au versement des allocations familiales pour les enfants présents sur le sol français. Au contraire, le refus des allocations familiales, écrit la Cour, « porte une atteinte disproportionnée au principe de non discrimination et au droit à la protection de la vie familiale » (Cour de Cassation, 2ème civ. 6 décembre 2006). Cette jurisprudence s’appuie sur les articles 8 et 14 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme, tout comme divers avis de la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Egalité. L’avis de la Défenseure des Enfants, qui s’appuie sur l’article 3 de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant, va dans le même sens,

Compte tenu de ces éléments de jurisprudence, je vous serais très obligée, Madame la Directrice, de bien vouloir examiner favorablement ma demande d’allocations familiales pour mes enfants <liste>.

Dans l’attente d’une réponse positive de votre part, je vous prie de croire, Madame la Directrice, à l’expression de mes salutations distinguées,

<Signature du demandeur>

Modèle n°2 : lettre de recours à la CRA

<coordonnées famille> <lieu, date>

n° allocataire : ————-

R/AR

Madame la Présidente de la

Commission des Recours

Amiables de la Caisse

d’allocations familiales de

Touraine

1 rue Alexander Fleming

37045 TOURS Cedex 9

Objet : recours contre un refus

d’allocations familiales

Madame la Présidente,

Suite à ma demande d’allocations familiales du……… (pièce jointe n°1), les services de la Caisse d’allocations familiales de Touraine ont rejeté cette demande par courrier du……… (p.j. n°2) pour mes enfants ………………………………………………. Les causes de ce refus sont les suivantes :

– Je ne suis pas en mesure de fournir le certificat médical délivré par l’ANAEM ;

– A défaut, je ne suis pas en mesure de fournir l’attestation préfectorale indiquant que mes enfants sont entrés en France en même temps que moi-même.

S’il m’est impossible de fournir les pièces demandées, c’est uniquement en raison du refus mis par la Préfecture d’Indre-et-Loire à la convocation de mes enfants pour la visite médicale de l’OFII, et de son refus de me délivrer les attestations requises. Je me trouve donc dans une situation de non-droit indépendante de ma volonté. C’est pourquoi je forme ce jour un recours auprès de vous, et vous prie de bien vouloir réexaminer ma demande au regard de ces éléments.

Dans l’attente d’une réponse favorable, je vous prie de croire, Madame la Présidente, à l’expression de mes salutations distinguées,

<signature du demandeur>

Exemple n°1 de réponse favorable de la CRA

CRA ———— du —-/09/2009

Date du recours : —-/07/2009

INFORMATIONS SITUATION ALLOCATAIRE

Matricule : —– Adresse :
Nom : ——– —– Rue ———
Prénom : —— 37 100 TOURS
Date de naissance : —— Situation familiale : ——-
Nombre d’enfants : —- Le : ———-
Détail PF payées :

MOTIFS:

Les enfants de parents étrangers titulaires d’un titre de séjour “vie privée et familiale” doivent pour bénéficier des prestations familiales, être détenteurs d’une attestation préfectorale précisant qu’ils sont rentrés sur le territoire français au plus tard en même temps que leurs parents.

SOURCE DU DROIT:

Article D512-2 du Code de la Sécurité Sociale.

EXPOSE DU RECOURS:

L’allocataire sollicite le versement des prestations familiales pour son enfant entré en France en ——- 2009 et scolarisée depuis le ——— 2009. Elle ne peut fournir le certificat de l’ANAEM puisque l’enfant n’est rentrée en France qu’environ 1 an après sa mère et les services de la Préfecture refusent de délivrer le document de circulation, l’enfant ayant moins de 6 ans de présence sur le territoire français.

DECISION :

Considérant que l’enfant est entré en France en ——- 2009,

Considérant que l’allocataire est titulaire d’un titre de séjour “vie privée et familiale” qui devrait permettre l’obtention de l’attestation préfectorale mentionnée au 5° alinéa de l’article D512-2 du code de la Sécurité Sociale,

Considérant que les services de la préfecture d’Indre et Loire refusent de délivrer la dite attestation,

Considérant que l’allocataire se trouve dans une situation de non droit indépendante de sa volonté,

La présente Commission accorde le droit aux prestations pour l’enfant sous réserve des autres conditions administratives.

OBJET DU RECOURS

Nature PF demandées :

Date refus des P. F. :

Exemple n°2 de réponse favorable de la CRA

CRA CORALI du —–/12/2009

Date du recours : —-/11/2009

INFORMATIONS SITUATION ALLOCATAIRE

Matricule : —– Adresse :
Nom : ——– —– Rue ———
Prénom : —— 37 300 JOUE-lès-TOURS
Date de naissance : —— Situation familiale : ——-
Nombre d’enfants : —- Le : ———-
Détail PF payées :

MOTIFS:

Les enfants de parents étrangers titulaires d’un titre de séjour “vie privée et familiale” doivent pour être éligibles aux prestations familiales, être détenteurs d’une attestation préfectorale précisant qu’ils sont entrés sur le territoire français au plus tard en même temps que leurs parents.

SOURCE DU DROIT:

Article L512-2 et D512-2 du Code de la Sécurité Sociale.

EXPOSE DU RECOURS:

Monsieur et Madame sont arrivés en France avec leurs trois enfants en ——– 2006. Après avoir obtenu des autorisations provisoires de séjour puis des récépissés de demandes de titre de séjour, Monsieur et Madame sont chacun en possession d’un titre de séjour “vie privée et familiale” valable du —- —— 2009 au ————- 2010. Ils sont dans l’impossibilité d’obtenir l’attestation préfectorale précisant que les trois enfants sont entrés en France en même temps que leurs parents. De ce fait, ils sollicitent auprès de la Commission de Recours Amiable, le paiement des prestations familiales en faveur des trois enfants.

DECISION :

Considérant que les enfants sont entrés en France en —-/2006, soit en même temps que leurs parents,

Considérant que l’allocataire et son conjoint sont titulaires d’un titre de séjour “vie privée et familiale”

qui devrait permettre l’obtention de l’attestation préfectorale mentionnée au 5° alinéa de l’article D512-2

du code de la Sécurité Sociale,

Considérant que les services de la Préfecture refusent de délivrer la dite attestation,

Considérant que l’allocataire se trouve dans une situation de non droit indépendante de sa volonté,

La présente Commission accorde le droit aux prestations pour chacun des enfants sous réserve des

autres conditions administratives.

OBJET DU RECOURS

Nature PF demandées :

Date refus des P. F. :

guide_juridique_allocations_familiales_resf37_17fev10.odt guide_juridique_allocations_familiales_resf37_17fev10.odt
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