C’est le meurtre de la Sécurité sociale que le locataire de Matignon prémédite
Par Michel Etievent (1)
Valls veut prolonger et accentuer le travail en cours du patronat pour détruire le concept édicté à la Libération d’une Sécurité sociale solidaire et par répartition. C’est le meurtre de la Sécurité sociale que le locataire de Matignon prémédite.
Nous savions déjà que le social-libéralisme considérait que la Sécurité sociale était un coût exorbitant pour la compétitivité et qu’il fallait en finir avec « l’état providence » comme disent les libéraux.
Pourtant, dans un pays détruit par la guerre, des hommes et des femmes de la Résistance n’ont pas hésité à mettre en place cette grande conquête sociale et lui ont donné les moyens de son existence. Ils l’ont mesuré à l’aune de la solidarité entre tous et toutes. Ils n’ont pas hésité à faire appel à autre chose que l’impôt en décidant que la cotisation représentait celle directe du salarié calculée sur son salaire brut et celle socialisée de l’entreprise chiffrée à partir de l’assiette salariale et prise sur la plus-value réalisée par le travail salarié.
Le patronat n’a jamais avalé cette décision, la considérant comme un coût venant grever ses profits.
Cette Sécurité sociale, sous prétexte de son financement, a été l’objet de toutes les attaques : celle de retirer aux travailleurs le soin de diriger et de gérer leur Sécurité sociale solidaire par la non-élection des administrateurs, par les remises en cause des remboursements, par l’allongement de l’âge de la retraite, par des modifications importantes dernièrement concernant les allocations familiales.
Puis, surtout, par le fait que les gouvernements successifs depuis une vingtaine d’années ont considéré que la cotisation sociale était contradictoire avec le libéralisme, et nous avons vu la droite remettre en cause le versement de la part dite patronale pour les salariés au Smic, puis jusqu’à 1,6 Smic ; le Parti socialiste a poursuivi la même trajectoire : création de la CSG, acceptation de la baisse des prestations sociales en matière de santé par toutes sortes de franchises, de participation forfaitaire, de forfait hospitalier.
Des centaines de milliards ont été ainsi détournées des caisses de la Sécurité sociale pour soi-disant permettre aux entreprises de créer de l’emploi.
Le doigt, la main, le bras, le corps tout était mis dans l’engrenage : ainsi l’ennemie était la cotisation sociale.
Dans plusieurs écrits parus dans l’Humanité, j’ai dénoncé cette farce, la cotisation sociale n’est pas l’ennemi de l’économie, elle est d’une puissance telle qu’elle fait vivre l’économie, la vraie, celle qui répond aux besoins, celle qui crée de l’emploi, celle qui est justice et solidarité face au pillage du capital.
C’est ce que le CNR avait considéré en 1945 : le financement solidaire, celui du salarié et de l’entreprise, pris sur la valeur ajoutée fruit du travail salarié, créait les conditions du développement, de la croissance, de l’emploi, notamment de ceux au service de la population et de créations de richesses nécessaires pour répondre à ces besoins sociaux.
Le gouvernement vient de prendre la plus mauvaise décision en confirmant les exigences du Medef de toucher aux cotisations sociales, y compris celles du salarié qui sont issues de cette grande idée de la solidarité. Ce serait la porte ouverte toute grande à l’assurantiel, comme au temps des assurances sociales d’avant-guerre et de toutes les injustices sociales qui les caractérisaient.
Le gouvernement Valls pourrait ainsi, selon certaines informations qui ont filtré, exonérer de cotisations sociales jusqu’à 1,6 Smic le financement des retraites, dont on sait qu’il avait déjà invoqué le manque de financement pour allonger l’âge de la retraite à soixante-six ans dès son retour au pouvoir.
Quand Valls dit aux organisations syndicales qu’elles ne doivent pas s’inquiéter et que le financement des retraites sera assuré, on peut craindre le pire, notamment : poursuivre la réduction des coûts en matière de retraites par un nouvel allongement de l’âge de la retraite et déjà le patronat veut tout de suite soixante-cinq ans comme âge légal de départ à la retraite et pendant qu’on y est le passer à soixante-dix ans.
Il y a quelques jours, le président de la République rendait hommage à ce programme du Conseil national de la Résistance qui portait comme titre « les Jours heureux » ; quelle hypocrisie, puisqu’il savait que le programme du CNR est totalement à l’opposé de celui que son gouvernement défend, celui de la cupidité contre la solidarité.
Oui, comme Croizat, ne croyons qu’à nos luttes pour empêcher la désintégration de la Sécurité sociale. « La Sécurité sociale est la seule création de richesse sans capital. La seule qui ne va pas dans la poche des actionnaires mais est directement investie pour le bien-être de nos citoyens. Faire appel au budget des contribuables pour la financer serait subordonner l’efficacité de la politique sociale à des considérations purement financières. Ce que nous refusons. »
Ainsi Ambroise Croizat définissait-il la Sécurité sociale lors de sa création en juin 1946. Fidèle au message du CNR qui revendiquait « un plan complet de Sécurité sociale visant à donner des moyens d’existence à tous ceux qui ne pouvaient se les procurer par le travail avec gestion par les intéressés », il ouvrait une ère de dignité en bâtissant avec le peuple de France, et essentiellement la CGT, un système solidaire financé uniquement par les richesses créées dans l’entreprise, autrement dit par la cotisation sociale, le salaire socialisé.
« La Sécurité sociale, ajoutait-il, sera un véritable îlot de socialisme dans une France libérée des féodalités financières. »
Formule reprise plus tard, de façon plus méprisante mais tout aussi explicite, par Michel Rocard, insistant sur le décalage entre le capital et le caractère socialiste de l’institution lorsqu’il affirmait : « En France, il y a le capitalisme et la Sécurité sociale ! » Il était urgent, dès la mise en place des nouvelles institutions solidaires de la Libération, de détruire ce modèle social. Détricotant l’oeuvre du « ministre des travailleurs », il s’empressa de créer la CSG, ouvrant ainsi une Sécurité sociale fiscalisée basée sur un impôt inégalitaire.
Mais Michel Rocard ne fut qu’un simple maillon de ce long détricotage entamé sous de Gaulle lorsque celui-ci, dès 1958, arguant d’un retour aux « anciennes assurances sociales » basées sur la capitalisation, promulgua la nomination des directeurs de caisse et le contrôle préalable des budgets. Pierre Laroque sentit très vite le vent des attaques et la volonté d’effacer l’édifice solidaire.
Reprenant les mots d’Ambroise Croizat, il déclarait en 1951 : « Le plan de Sécurité sociale dans ce qu’il pouvait avoir de révolutionnaire par sa volonté de détruire les inégalités et d’affirmer une solidarité effective a vite buté sur l’obstacle des structures existantes qui se sont affirmées plus puissantes que les forces de renouvellement.
Les éléments conservateurs qui aujourd’hui encore n’osent pas se dire contre la Sécurité sociale recherchent toutes les raisons d’en casser les institutions satisfaisant leur opposition inavouée. »
Aiguillonnées par le CNPF (devenu Medef) qui, en 1960, affirmait : « La Sécurité sociale met l’économie du pays au bord du gouffre ; les salariés profitent sans cesse d’un traitement dont ils n’ont pas besoin, la maladie étant le moindre prétexte de repos », ces premières tentatives de déstructuration trouveront leur point d’orgue en 1967 avec les ordonnances Jeanneney.
Elles cassent l’édifice en trois branches, suppriment les élections et établissent un paritarisme qui offre sur un plateau la gestion de l’institution aux patrons. Viendront ensuite l’avalanche des plans Barre (1974), Veil (1976), Dufoix (1985), Balladur, Rocard, Juppé, Raffarin (1995), qui multiplient déremboursements, franchises, baisse des prestations et des pensions, recours à l’impôt à coup de CSG ou de CRDS.
L’objectif déjà annoncé par Yvon Chottard (vice-président du CNPF) en octobre 1977 est constant : « Abolir, disait-il, cette machine anonyme qui fait s’effondrer l’économie sous les charges et rendre rapidement l’édifice à une assurance privée efficace. » Autrement dit fiscaliser les recettes, effacer la cotisation patronale, livrer l’édifice au privé.
Ainsi à l’orée du XXIe siècle se dirige-t-on vers ce que la Confédération syndicale des médecins français et le Syndicat des médecins libéraux avouaient vouloir inaugurer avec impatience : « Le grand tournant libéral, une ère nouvelle qui annoncera la fin de la Sécurité sociale en partenariat avec AXA. »
Les dernières attaques (plan Mattéi et surtout ANI) confirment l’objectif et se doublent d’un ressassement de l’argument du coût du travail, justification des délocalisations, de la mort industrielle et surtout de la disparition de la cotisation jugée « charge sociale ».
out ce qui ne va pas à la finance sera considéré comme une charge. Exit le coût du capital qui saigne à blanc l’entreprise, déplaçant l’investissement vers les marchés financiers. En 2012, 85 % des profits sont reversés sous forme de dividendes !
En 1981, le travailleur français travaillait quatorze jours pour les actionnaires, quarante-six jours aujourd’hui !
Les mesures Valls vont dans le même sens : poursuivre à marche forcée la disparition de la cotisation avec un objectif, le plan Chadelat : une Sécurité sociale minimale qui frôle l’aumône pour nécessiteux, le reste aux complémentaires et surcomplémentaires pour riches.
Il est vrai que le gâteau fait saliver le privé : 539 milliards d’euros à la clé Pas question de toucher aux 312 milliards d’euros de revenus financiers non soumis à la cotisation, aux 50 milliards d’exonérations de cotisations patronales (370 000 patrons sont aujourd’hui en défaut de paiement de cotisations !), aux 100 milliards d’évasion fiscale, qui s’ajoutent au « don » des récents 50 milliards de cotisations familiales et aux 20 milliards du crédit d’impôt. Le choix est politique. D’une exceptionnelle gravité.
Sans doute la plus violente attaque depuis 1945.
Parce qu’elle vise à saper le coeur même de l’édifice solidaire : la cotisation sociale A la clé, un retour de soixante-dix ans en arrière. Présenter aux salariés la réduction de leurs cotisations sociales comme un moyen d’augmenter leur salaire net relève du mensonge éhonté. En effet, ces cotisations représentent une partie du salaire, « socialisé », justement ce qui ne va pas grossir les dividendes mais est directement investi dans l’enveloppe de la Sécurité sociale, pour permettre à tous dans le cadre de la solidarité de prendre sa retraite, de se soigner, soi et sa famille, d’élever ses enfants. Dans la dignité
La création de la Sécurité sociale en 1945 répondait à une grande ambition : organiser la société sur des bases justes et solidaires, favoriser l’émancipation citoyenne. En cela elle fut subversive et audacieusement visionnaire d’une autre façon d’asseoir le développement de la société. Dès sa mise en oeuvre, le projet initial fut altéré par les conservatismes et des résistances fortes.
Le principe d’unité s’est peu à peu effacé devant la segmentation du système, l’approche gestionnaire a pris le pas sur l’enjeu sociétal. La solidarité nationale s’est progressivement estompée face aux mesures sectorielles et à la segmentation des droits.
La transformation du capitalisme, la mondialisation et l’idéologie néolibérale ont signé la fin des synergies entre développement économique et protection sociale voulues par les créateurs de la Sécurité sociale et dont on a pu mesurer les bienfaits durant toute la période de reconstruction économique de la France. Traitée malheureusement comme une charge et non plus comme une chance pour le pays et ses habitants, la Sécurité sociale d’aujourd’hui a conservé son nom, mais on lui a fait perdre progressivement de son âme.
L’exemple de l’assurance maladie est éloquent : cette branche de la Sécurité sociale a été rendue déficitaire sans discontinuité depuis 1989. Elle ne rembourse plus aujourd’hui que la moitié des soins courants pour les personnes qui ne sont pas en affection de longue durée et ses prestations se sont progressivement déconnectées de la réalité des dépenses supportées par les ménages. Les conseils des caisses n’administrent plus, l’essentiel des pouvoirs étant confié aux seuls directeurs.
La politique conventionnelle, qui laisse libre cours aux vieux principes de la médecine libérale, s’avère incapable de faire évoluer un système de soins inadapté face à l’explosion des maladies chroniques et des affections de longue durée. Alors oui, la Sécurité sociale doit être défendue. Contre un pacte dit de responsabilité qui veut la priver des ressources essentielles et réduire ses prestations. Contre des évolutions de la complémentaire santé qui tendent à limiter sa place et son rôle.
Mais défendre la Sécurité sociale implique aussi de la repenser, à l’aune des besoins actuels, à travers un plan d’ensemble explicité et débattu démocratiquement,
comme le fut celui qui présida à sa création. Posons-nous quelques questions fondamentales. Sur le financement, pourquoi ne pas asseoir les cotisations sur toutes les richesses créées dans l’entreprise, de manière neutre vis-à-vis des facteurs de production, le capital et le travail ? Ne peut-on aussi imaginer une fiscalité qui protège à la fois l’environnement et la santé des personnes ? Sur les prestations, ne faut-il pas encourager la prévention des risques sanitaires et sociaux plutôt que leur réparation ?
Ne faut-il pas considérer la protection sociale comme un investissement susceptible de réduire les inégalités et de contribuer au développement économique et humain ? Sur la gestion, ne peut-on faire émerger une démocratie sociale, participative et représentative, tirant enseignement des expériences du paritarisme et des impasses de l’étatisme ? Sur le partenariat avec la mutualité, celui-ci n’est-il pas une voie à privilégier ?
Car la solidarité nationale ne peut répondre à tout, alors ne nous interdisons pas de faire barrage ensemble à la marchandisation de la santé, encourageons les actions visant à mieux réguler et mieux organiser le système de santé, cherchons les voies nous permettant de conjuguer nos compétences et nos savoirs au service des personnes comme à la création de la Sécurité sociale, sur les critères de responsabilité, de démocratie, de solidarité, de mouvement social et citoyen.
Le fatalisme n’est pas de mise, pas plus que les contraintes de la construction européenne. La Sécurité sociale doit redevenir une perspective qui réenchante, mobilise et soutient les progrès sociaux et sociétaux.
Michel Etievent (Tribune Idées – L’Humanité 24 avril 2014)
(1) Auteur d’Ambroise Croizat ou l’invention sociale. ■
EN FRANCE IL Y A LE CAPITALISME ET LA SECURITE SOCIALE
Par Michel Etievent dans l’Humanité du 24 avril
« La sécurité sociale est la seule création de richesse sans capital. La seule qui ne va pas dans la poche des actionnaires mais est directement investie pour le bien être de nos citoyens. Faire appel au budget des contribuables pour la financer serait subordonner l’efficacité de la politique sociale à des considérations purement financières. Ce que nous refusons »
Ainsi Ambroise Croizat définissait-il la sécurité sociale lors de sa création en juin 1946. Fidèle au message du CNR qui revendiquait « un plan complet de sécurité sociale visant à donner des moyens d’existence à tous ceux qui ne pouvaient se les procurer par le travail avec gestion par les intéressés », il ouvrait une ère de dignité en bâtissant avec le peuple de France et essentiellement la CGT un système solidaire financé uniquement par les richesses créées dans l’entreprise, autrement dit par la cotisation sociale, le salaire socialisé. «La sécurité sociale, ajoutait-il, sera un véritable ilot de socialisme dans une France libérée des féodalités financières ». Formule reprise plus tard, de façon plus méprisante mais tout aussi explicite par Michel Rocard, insistant sur le décalage entre le capital et le caractère socialiste de l‘institution lorsqu’il affirmait: « En France, il y a le capitalisme et la sécurité sociale ! ».
Il était urgent, dès la mise en place des nouvelles institutions solidaires de la libération, de détruire ce modèle social. Détricotant l’œuvre du « ministre de travailleurs », il s’empressa de créer la CSG ouvrant ainsi une sécurité sociale fiscalisée basée sur un impôt inégalitaire. Mais Michel Rocard ne fut qu’un simple maillon de ce long détricotage entamé sous De Gaulle lorsque celui-ci, dès 1958, arguant d’un retour aux « anciennes assurances sociales » basées sur la capitalisation, promulgua la nomination des directeurs de caisses et le contrôle préalable des budgets. Pierre Laroque sentit très vite le vent des attaques et la volonté d’effacer l’édifice solidaire. Reprenant les mots d’Ambroise Croizat, au fil de propos prémonitoires, il déclarait en 1951: « Le plan de sécurité sociale dans ce qu’il pouvait avoir de révolutionnaire par sa volonté de détruire les inégalités et d’affirmer une solidarité effective a vite buté sur l’obstacle des structures existantes qui se sont affirmées plus puissantes que les forces de renouvellement. Les éléments conservateurs qui aujourd’hui encore n’osent pas se dire contre la sécurité sociale, recherchent toutes les raisons d’en casser les institutions satisfaisant leur opposition inavouée ». Aiguillonnées par le CNPF qui, en 1960, affirmait : « La sécurité sociale met l’économie du pays au bord du gouffre ; les salariés profitent sans cesse d’un traitement dont ils n’ont pas besoin, la maladie étant le moindre prétexte de repos », ces premières tentatives de déstructurations trouveront leur point d’orgue en 1967 avec les ordonnances Jeanneney. Elles cassent l’édifice en trois branches, suppriment les élections et établit un paritarisme qui offre sur un plateau la gestion de l’institution aux patrons. Viendront ensuite l’avalanche des plans Barre (1974) Veil (1976), Dufoix (1985) Balladur, Rocard, Juppé, Raffarin (1995) qui multiplient déremboursements, franchises, baisse des prestations et des pensions, recours à l’impôt à coup de CSG ou de CRDS. L’objectif déjà annoncé par Yvon Chottard en octobre 1977 est constant : « Abolir, disait-il, cette machine anonyme qui fait s’effondrer l’économie sous les charges et rendre rapidement l’édifice à une assurance privée efficace ». Autrement dit fiscaliser les recettes, effacer la cotisation patronale, livrer l’édifice au privé.
Ainsi à l’orée du 21ème siècle se dirige-t-on vers ce que la Confédération syndicale des médecins français et le syndicat des médecins libéraux avouaient vouloir inaugurer avec impatience : « Le grand tournant libéral, une ère nouvelle qui annoncera la fin de la sécurité sociale en partenariat avec AXA ». Les dernières attaques (Plan Mattéi et surtout l’ ANI…) confirment l’objectif et se double d’un ressassement de l’argument du coût du travail, justification des délocalisations, de la mort industrielle et surtout de la disparition de la cotisation jugée « charge sociale ». Tout ce qui ne va pas à la finance sera considéré comme une charge. Exit le cout du capital qui saigne à blanc l’entreprise déplaçant l’investissement vers les marchés financiers. En 2012, 85 % des profits sont reversés sous forme de dividendes !. En 1981, le travailleur français travaillait 14 jours pour les actionnaires, 46 jours aujourd’hui !
Les mesures Valls vont dans le même sens : poursuivre à marche forcée la disparition de la cotisation avec un objectif, le plan Chadelat : une sécurité sociale minimum qui frôle l’aumône pour nécessiteux, le reste aux complémentaires et sur-complémentaires pour riches. Il est vrai que le gâteau fait saliver le privé : 539 milliards d’euros à la clé…. Pas question de toucher aux 312 milliards d’euros de revenus financiers non soumis à la cotisation, au 50 milliards d’exonérations de cotisations patronales (370 000 patrons sont aujourd’hui en défaut de paiement de cotisations !), aux 100 milliards d’évasion fiscale, qui s’ajoutent au « don » des récents 50 milliards de cotisations familiales et au 20 milliards du crédit d’impôt. Le choix est politique. D’une exceptionnelle gravité. Sans doute la plus violente attaque depuis 1945. Parce qu’elle vise à saper le cœur même de l’édifice solidaire : la cotisation sociale…
A la clé, un retour de 70 ans en arrière. Présenter aux salariés la réduction de leurs cotisations sociales comme un moyen d’augmenter leur salaire net relève du mensonge éhonté. En effet, ces cotisations représentent une partie du salaire, « socialisé », justement ce qui ne va pas grossir les dividendes mais est directement investi dans l’enveloppe de la sécurité sociale, pour permettre à tous dans le cadre de la solidarité de prendre sa retraite, de se soigner lui et sa famille, d’élever ses enfants. Dans la dignité…
Michel ETIEVENT
Ces positions sont sur la ligne de Bernard Friot : 8 ème lauréat du Prix Véronique Dutriez.
“Ils n’ont pas hésité à faire appel à autre chose que l’impôt en décidant que la cotisation représentait celle directe du salarié calculée sur son salaire brut et celle socialisée de l’entreprise chiffrée à partir de l’assiette salariale et prise sur la plus-value réalisée par le travail salarié.
Le patronat n’a jamais avalé cette décision, la considérant comme un coût venant grever ses profits.
Cette Sécurité sociale, sous prétexte de son financement, a été l’objet de toutes les attaques : celle de retirer aux travailleurs le soin de diriger et de gérer leur Sécurité sociale solidaire par la non-élection des administrateurs, par les remises en cause des remboursements, par l’allongement de l’âge de la retraite, par des modifications importantes dernièrement concernant les allocations familiales.
Puis, surtout, par le fait que les gouvernements successifs depuis une vingtaine d’années ont considéré que la cotisation sociale était contradictoire avec le libéralisme, et nous avons vu la droite remettre en cause le versement de la part dite patronale pour les salariés au Smic, puis jusqu’à 1,6 Smic ; le Parti socialiste a poursuivi la même trajectoire : création de la CSG, acceptation de la baisse des prestations sociales en matière de santé par toutes sortes de franchises, de participation forfaitaire, de forfait hospitalier.