La campagne des Régionales sort de sa léthargie très alsacienne. On le doit à l’écart ric-rac qui selon le dernier sondage séparerait le rose-vert du bleu, mais encore plus au très jacobin Conseil d’État qui vient de donner, intempestivement, entre les deux tours (de roues?) son feu vert au Grand Con-tournement Ouest, aspirateur à bagnoles, tueur des riches terres agricoles du Kochersberg.

On sait l’engagement ancien du sénateur-maire de Strasbourg, Roland Ries contre ce projet, et hier soir, au Palais des Fêtes, Jacques Bigot a enfoncé le clou, avec ses amis écolos: pas ça, chez nous! Et un schéma régional de transports collectifs à la place.

Les DNA ont fait le choix de mettre en avant le débat qu’elles organisaient elles-mêmes en fin d’après-midi, au Tanzmatten de Sélestat, confirmant une fois de plus leur hold-up habituel sur le débat politique. Elles ne rendent pas compte du meeting d’hier soir au Palais des Fêtes.

Il a justement été question du manque de débats politiques et de démocratie sous le règne quasi sempiternel de la prétendue “majorité alsacienne”, celle qu’on peut chasser au profit d’une “nouvelle majorité”.

On ne sait si les abstentionnistes du 1er tour se sentiront concernés par ces jeux politicards, on en doute, même si Zoubida Naïli nous assurait à la sortie de la réunion, que le porte à porte dans les quartiers populaires abstentionnistes lui donnait espoir.

Chaque voix comptera dimanche prochain.

Le Palais des Fêtes, certes, était plein, au parterre et il a fallu ouvrir l’arrière. Mais l’enthousiasme semblait un peu commandé et quelque peu tiède.

Organisation à l’américaine, drapeaux, écrans, entrée des artistes sous les spots des caméras, fanfare, du réchauffé.Bien qu’ ait été rappelé, en hommage à Jean Ferrat que “la femme est l’avenir de l’homme”, il y a encore du chemin à faire en Alsace où aucune d’elle n’est tête de liste.

C’est dire si en Alsace, il va falloir en dégager quelques uns.

Se sont succédés trois pantalons qui n’avaient hélas rien de ” poupées en pantalon”.

Chacun dans son idiosyncrasie propre.

Waechter en pro des élections présidentielles, calme, lent, réfléchi imposa d’emblée un silence d’écoute total, où se mêlaient la curiosité et la crainte. Froid au début, le public se dégela comme l’Alsace enfin printanière,et l’Antoine du “ni droite ni gauche”se fit enfin applaudir.

Fernique seul intervint dans le style enflammé et plein de convictions qu’on lui connaît, combattif, il chauffa la salle avec ses espérances écolos-durables.

Bigot, enfin, s’exprima, plus comme l’avocat qu’il est, long, mal placé devant les micros, avec des tas d’incises chuchotées comme autant de confidences qui se voulaient proches des citoyens électeurs. Il décocha quelques flèches bien ciblées contre Richert et la “majorité alsacienne” autoproclamée.

Le moins qu’on puisse dire, au-delà du “c’est possible”, partagé avec Fernique, c’est que ça manquait de punch (dans les deux prononciations du mot: le bar du Palais des Fêtes était fermé!).

Le pire vint au moment de l’appel en direction de ceux et celles qui n’avaient pas voté pour eux ou pas voté du tout.

Il se tourna vers les “centristes” du MoDem, dirigés ici par l’ex Vert, Yann Wehrling, afin qu’ils ajoutent leurs voix au centristes déjà représentés sur la liste par la fille Hoeffel de Handschuheim.

On l’entendit aussi en appeler aux “régionalistes”,sans préciser lesquels, sachant qu’il y en avait sur toutes les listes jusqu’à l’extrême-droite.

Et il n’eut pas un mot pour les 5 à 6 % d’électeurs-trices qui ont voté à gauche du PS bien qu’ à l’exception de LO, elles aient toutes, du NPA, à Écologie sociale, solidaire et décroissante, en passant par Ensemble pour une Alsace à gauche appelé à voter Bigot-Fernique !

S’il manque quelques milliers ou centaines de voix dimanche prochain, Jaques Bigot n’aura qu’à s’en prendre à son “oubli” selon l’un peu court commentaire que Philippe Bies nous fit à la sortie. Lapsus révélateur comme on dit chez les freudiens!

Ma voisine qui, comme moi, avait voté Front de gauche, plutôt que NPA, pour une fois, se demanda, un instant, si elle allait donner sa voix à ce Bigot là- surtout en ces terres si peu laïques.

Ce soir, à la Lanterne, dans la rue du même nom, au centre ville de Strasbourg,les jeunes vous donnent rendez-vous pour un “speed-dating”, comme ils disent dans leur alsacien à eux. Et là, au moins, on est sûr qu’il y aura de la mousse à boire! Allez les djeuns!