Publié le 26-03-2010
“Ma reaction a la loi interdisant la commemoration de la Nakba : Je prendrai le deuil pour la Nakba”
“Je prendrai le deuil pour la Nakba. Je prendrai le deuil pour la Palestine disparue que, dans sa plus grande partie je ne connaîtrai jamais. Je prendrai le deuil pour la terre sainte qui perd son humanité, son paysage, sa beauté et ses enfants sur l’autel du racisme et du mal. Je prendrai le deuil pour les jeunes Juifs qui envahissent et profanent les maisons de familles à Sheikh Jarrah , jettent les habitants dans la rue et dansent et chantent en mémoire de Baruch Goldstein, le meurtrier infâme d’enfants Palestiniens , pendant que les propriétaires expulsés des maisons avec leurs enfants et leurs vieillards dorment sous la pluie, dans la rue, en face de leurs propres habitations. Je prendrai le deuil pour les soldats et les policiers qui protègent ces méchants envahisseurs Juifs Orthodoxes sans aucun remord.
Je prendrai le deuil pour les terres de Bil’in et de Nil’in et pour les héros de Bil’in et de Nil’in, beaucoup d’entre eux sont des enfants de 10-12 ans, qui sans peur se dressent pour leur droit de vivre dans la dignité sur la terre de leurs pères. Je prendrai le deuil pour les Droits Humains qui ont été enterrés depuis longtemps dans ce pays , pour le sang impunément répandu, pour les meurtres commis avec la bénédiction des rabbins, pour le mythe Sioniste fallacieux dans lequel j’ai été éduquée et pour l’histoire Palestinienne dont le récit est interdit mais dont la vérité est de retour et dont les rameaux verts pointent parmi les graines des lois racistes.
Je prendrai le deuil pour l’ancien ministre de l’Education, Livnat qui a défendu la loi contre la commémoration du jour de la Nakba en déclarant que « S’il n’y a rien pour qu’ ils puissent prendre le deuil, ils n’auront pas de raisons de se révolter. » paroles pires que les pires paroles de nos adversaires et que celles des plus méchants colonialistes.
Je prendrai le deuil pour nous tous qui ne savons pas quoi faire face à une loi qui est pure cruauté, une parmi les douzaines d’autres qui sont destinées à nous assurer les places d’honneur – sinon toutes les places – dans les Actes du Parlement de la Démocratie de l’Etat Juif. Je prendrai le deuil pour la démocratie de ce pays dans lequel la moitié des habitants doivent vivre dans des conditions qui seraient interdites, même pour des animaux, dans d’autres démocraties.
Je prendrai le deuil pour les enfants. Ceux qui sont morts. Ceux qui mourront demain. Ceux qui ne supportent plus de vivre ici et ceux qui y vivent , semblables à de monstrueux golems qui se sont retournés contre leurs créateurs , êtres formés de peur, de mal, de racisme, d’amour tordu pour une terre qui n’est pas la leur, de haine pour tout ce qui n’est pas à leur propre image, et d’appétit insatiable pour le meurtre.
Je prendrai le deuil le jour de la Nakba. Et aussi le jour qui le précède que nous appelons le Jour de Commémoration et qui n’est rien d’autre qu’un jour dédié à l’idolâtrie de la chair morte , et à la fin duquel chacun sort et grille d’autres chairs mortes à même les flammes, chante, danse , se goinfre et finit saoul. Je prendrai le deuil pour le jour de notre indépendance qui n’est rien d’autre que la célébration du triomphe de l’enfermement et de l’assujettissement.
Pour toutes ces raisons, je prendrai le deuil le jour de la Nakba. Je rejoindrai les millions de dépossédés, d’opprimés et d’humiliés qui n’ont pas désespéré du futur et qui pensent qu’il reste une chance et qui se dressent comme les témoins et comme les braises encore vives du véritable esprit humain.
Je prendrai le deuil le jour de la Nakba afin d’être digne d’eux, afin que mes enfants sachent de quel côté je suis et afin qu’eux aussi puissent croire qu’il y a une chance pour l’espoir et pour un futur où la justice l’emportera.”
(Traduction en français de Roseline Derrien)
Prof. Nurit Peled-Elhanan
telefax : ++972-(0)2-5700112
il m’a mis les larmes aux yeux…
Un très beau texte, en effet . . . Il faudrait le diffuser davantage !
Rem : ton argument/comparaison Berluchon était celui qu’avançait miner Grossbàbbe, il y a 35 ans . . .