convergence des luttes

QUEL VIRUS LA PREFETE DU BAS RHIN CRAINT-ELLE LE PLUS?
LA COVID 19 OU LA CONTESTATION?

Interdiction de la manifestation du 31 décembre par la préfète du Bas-Rhin

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La manifestation organisée par Gilets Jaunes tous ensemble a été interdite par la préfète le 29/12/2020. Avec notre avocat Me Pialat, nous avons déposé un référé-liberté qui a été examiné en audience le 31/12 au matin.

Le jugement a été communiqué vers 13h, seulement deux heures avant l’heure du rassemblement place Kléber!

Notre recours a été rejeté et la manifestation interdite.
Mais, si on considère les attendus du jugement, et c’était déjà perceptible durant l’audience, tous les arguments de la préfecture ont été rejetés sauf un.

Parmi les arguments rejetés, rien que du lourd: le plan Vigipirate, les violences urbaines du 31 décembre 2019, l’utilisation des forces de police à d’autres tâches le soir du 31 décembre, le caractère potentiellement dangereux de la manifestation, tout a été balayé par le juge qui a d’ailleurs refusé d’écouter le développement de la représentante de la préfète après celui de Me Pialat.

Le seul argument retenu a rapport avec le décret du 29/10/202: les manifestations peuvent avoir lieu, mais les organisateurs doivent préciser les mesures prises pour combattre le risque sanitaire. C’est sur ce seul point que le juge administratif a donné raison à la préfète.

Par conséquent, la préfète osera-t-elle interdire la manifestation du 9 janvier appelée par toutes les organisations syndicales, politiques et associatives et les Gilets Jaunes?

Une manifestation à Paris, le 28 novembre a ainsi pu se tenir légalement, malgré l’interdiction première du préfet Lallement, après un référé-liberté gagné par les organisateurs.

Référé-liberté posé par Me Vialat pour le QG Gilets Jaunes Strasbourg République

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE STRASBOURG
N° 2008317
___________
M. Hervé GOURVITCH ___________
M. Jean-Pierre Vogel Braun Juge des référés ___________
Ordonnance du 31 décembre 2020 ___________
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Le Tribunal administratif de Strasbourg Le juge des référés
Vu la procédure suivante :
Par une requête, enregistrée le 30 décembre 2020, ainsi que trois mémoires complémentaires enregistrés les 30 et 31 décembre 2020, M. Hervé Gourvitch, représenté par Me Pialat, demande au juge des référés :
1°) d’ordonner, sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, la suspension de l’arrêté préfectoral du 29 décembre 2020 par lequel la préfète du Bas-Rhin a interdit la manifestation et son parcours déclarés le 24 décembre 2020 ayant pour objet la défense des libertés démocratiques, la justice sociale et environnementale le 31 décembre 2020 de 15 heures à 18 heures et empruntant la Place Kléber, la place de l’Homme de Fer, la rue du Vieux Marché aux Vins, la Grand Rue, la rue de la Division Leclerc, la rue du vieux Marché aux Poissons, la rue Mercière, la place de la Cathédrale, la rue du Dôme, la rue de la Mésange et la Place Kléber ;
2°) d’enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de garantir le libre exercice du droit de manifestation tel que déclaré le 24 décembre 2020 ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 800 euros en application des dispositions l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. Gourvitch soutient que :
– l’urgence est constituée dès lors que la décision d’interdiction n’a été notifiée au requérant que le 29 décembre 2020 vers 17 heures 30 par courriel et porte sur une interdiction de manifester à Strasbourg le 31 décembre 2020 de 15 heures à 18 heures et que l’interdiction en cause fait obstacle à l’exercice de la liberté de manifestation qui est une liberté fondamentale ;
– toutes les modalités d’organisation n’ont pas à être mentionnées dans la déclaration préalable. Il était loisible à la représentante de l’Etat de prescrire des modalités de respect des gestes barrières dans le cadre du récépissé d’autorisation mais en aucun cas interdire la manifestation pour ce motif ;
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– il existe une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale qu’est la liberté de manifestation ;
– les modalités d’organisation spécifiques à la manifestation projetée ne peuvent se comprendre que comme la limitation de la taille de la manifestation car d’autres dispositions pour faire respecter la sécurité sanitaire sont déjà en vigueur dans le périmètre de la manifestation ;
– les dispositions de l’article L. 114-5 du code des relations entre le public et l’administration n’ont pas été mises en œuvre ;
– le port du masque est déjà obligatoire dans le territoire de la Grande Ile de Strasbourg par arrêté préfectoral du 15 décembre 2020.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 décembre 2020, la préfète du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que :
– le dépôt de la déclaration de manifestation n’est assortie d’aucun document
précisant les conditions d’organisation propres à respecter le respect des mesures « barrières » tel que prévu par le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de Covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire et notamment au II de l’article 3 du décret du 29 octobre 2020 ;
– il n’y a pas d’atteinte grave et illégale à la liberté de manifester ;
– les heures de manifestation retenues coïncident avec les heures d’ouverture des
commerces et le début des heures de sortie de travail ;
– tout mouvement de foule non encadré violent ou non pouvant participer de loin
ou de près à une détérioration de la situation sanitaire dans les hôpitaux
Bas-Rhinois est à proscrire ;
– s’il est mentionné que seules 200 personnes seront présentes lors de la
manifestation, le requérant n’est pas exonéré de respecter la réglementation en
vigueur ;
– le caractère exigu de certaines rues du passage associé à la fréquentation de ces
rues par la population ne permettra pas un encadrement efficace par les forces de police.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
– la Constitution ;
– le code de sécurité intérieure ;
– le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 ; – le code de la santé publique ;
– le code de justice administrative.
Le président du tribunal a désigné M. Vogel Braun pour statuer sur les demandes en référé en application de l’article L. 511-2 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
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Au cours de l’audience publique du 31 décembre 2020 tenue en présence de Mme Trinité, greffière d’audience, M. Vogel Braun a lu son rapport et entendu :
– les observations de Me Pialat, avocat de M. Gourvitch ;
– les observations de Mme Leitao, représentant la préfète du Bas-Rhin ; – et les observations de M. Gourvitch.
La clôture de l’instruction a été prononcée à l’issue de l’audience.
Considérant ce qui suit :
Sur les circonstances et le cadre juridique du litige :
1. Aux termes de l’article L. 3131-12 du code de la santé publique, issu de la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 : « L’état d’urgence sanitaire peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain ainsi que du territoire des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution et de la Nouvelle-Calédonie en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population ». L’article L. 3131-13 du même code, applicable, en vertu de l’article 7 de la même loi, jusqu’au 1er avril 2021, précise que « L’état d’urgence sanitaire est déclaré par décret en conseil des ministres pris sur le rapport du ministre chargé de la santé. (…) /La prorogation de l’état d’urgence sanitaire au-delà d’un mois ne peut être autorisée que par la loi, après avis du comité de scientifiques prévu à l’article L. 3131-19 ». Enfin, il résulte de l’article L. 3131-15 du même code que « dans les circonscriptions territoriales où l’état d’urgence sanitaire est déclaré, le Premier ministre peut, par décret réglementaire pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, aux seules fins de garantir la santé publique » prendre un certain nombre de mesures de restriction ou d’interdiction des déplacements, rassemblements sur la voie publique et réunions « strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu ».
2. L’émergence d’un nouveau coronavirus, responsable de la maladie à coronavirus 2019 ou Covid-19 et particulièrement contagieux, a été qualifiée d’urgence de santé publique de portée internationale par l’Organisation mondiale de la santé le 30 janvier 2020, puis de pandémie le 11 mars 2020. La propagation du virus sur le territoire français a conduit le ministre des solidarités et de la santé puis le Premier ministre à prendre, à compter du 4 mars 2020, des mesures de plus en plus strictes destinées à réduire les risques de contagion. Pour faire face à l’aggravation de l’épidémie, la loi du 23 mars 2020 mentionnée ci-dessus a créé un régime d’état d’urgence sanitaire aux articles L. 3131-12 à L. 3131-20 du code de la santé publique et déclaré l’état d’urgence sanitaire pour une durée de deux mois à compter du 24 mars 2020. La loi du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ces dispositions, a prorogé cet état d’urgence sanitaire jusqu’au 10 juillet 2020 inclus. L’évolution de la situation sanitaire a conduit à un assouplissement des mesures prises et la loi du 9 juillet 2020, a organisé un régime de sortie de cet état d’urgence.
3. Une nouvelle progression de l’épidémie a conduit le Président de la République à prendre, sur le fondement des articles L. 3131-12 et L. 3131-13 du code de la santé publique, le décret du 14 octobre 2020 déclarant l’état d’urgence à compter du 17 octobre à 00 heure sur l’ensemble du territoire national. Le législateur, par l’article 1er de la loi du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l’état d’urgence sanitaire et portant

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diverses mesures de gestion de la crise sanitaire, a prorogé cet état d’urgence sanitaire jusqu’au 16 février 2021 inclus.
4. Dans ce cadre, le décret du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de Covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire définit au niveau national, à son article 1er, les mesures d’hygiène et de distanciation sociale, dites « barrières », et prévoit, notamment, que les rassemblements, réunions et déplacements qui ne sont pas interdits en vertu de ce décret sont organisés en veillant au strict respect de ces mesures. Aux termes de l’article premier du décret du 29 octobre 2020 : « I. – Afin de ralentir la propagation du virus, les mesures d’hygiène définies en annexe 1 au présent décret et de distanciation sociale, incluant la distanciation physique d’au moins un mètre entre deux personnes, dites barrières, définies au niveau national, doivent être observées en tout lieu et en toute circonstance. / II. – Les rassemblements, réunions, activités, accueils et déplacements ainsi que l’usage des moyens de transports qui ne sont pas interdits en vertu du présent décret sont organisés en veillant au strict respect de ces mesures. (…) ». L’article 3 du même décret dispose : « I. – Tout rassemblement, réunion ou activité sur la voie publique ou dans un lieu ouvert au public, qui n’est pas interdit par le présent décret, est organisé dans des conditions de nature à permettre le respect des dispositions de l’article 1er. / II. – Les organisateurs des manifestations sur la voie publique mentionnées à l’article L. 211-1 du code de la sécurité intérieure adressent au préfet de département sur le territoire duquel la manifestation doit avoir lieu, sans préjudice des autres formalités applicables, une déclaration contenant les mentions prévues à l’article L. 211-2 du même code, en y précisant, en outre, les mesures qu’ils mettent en œuvre afin de garantir le respect des dispositions de l’article 1er du présent décret. / Sans préjudice des dispositions de l’article L. 211-4 du code de la sécurité intérieure, le préfet peut en prononcer l’interdiction si ces mesures ne sont pas de nature à permettre le respect des dispositions de l’article 1er. (…) ».
Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 521-2 du code de justice administrative :
5. Aux termes de l’article L. 521-2 du code de justice administrative : « Saisi d’une demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. ». Aux termes de l’article L. 522-1 dudit code : « Le juge des référés statue au terme d’une procédure contradictoire écrite ou orale. Lorsqu’il lui est demandé de prononcer les mesures visées aux articles L. 521-1 et L. 521-2, de les modifier ou d’y mettre fin, il informe sans délai les parties de la date et de l’heure de l’audience publique (…) ». Enfin aux termes du premier alinéa de l’article R. 522-1 dudit code : « La requête visant au prononcé de mesures d’urgence doit (…) justifier de l’urgence de l’affaire. ».
6. Le 24 décembre 2020, M. Gourvitch a déposé, une déclaration de manifestation ayant pour objet la défense des libertés démocratiques, la justice sociale et environnementale, appelée à se dérouler à Strasbourg le 31 décembre 2020 de 15 heures à 18 heures avec environ 200 personnes. Le parcours déclaré et prévu passe par la Place Kléber, la Place de l’Homme de Fer, la rue du Vieux-Marché aux Vins, la rue de la Division Leclerc, la rue du Vieux Marché aux poissons, la rue Mercière, la Place de la Cathédrale, la rue du Dôme, la rue de la Mésange et la Place Kléber.

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7. Le respect de la liberté de manifestation ne fait pas obstacle à ce que l’autorité investie du pouvoir de police interdise une activité si une telle mesure est seule de nature à prévenir un trouble à l’ordre public.
8. Compte tenu de ce que l’interdiction de manifester a été notifiée à l’organisateur par courriel le 29 décembre 2020 alors que la manifestation en cause est prévue le 31 décembre 2020 de 15 heures à 18 heures, le requérant justifie de l’existence d’une situation d’urgence au sens des dispositions précitées de l’article R. 522-1 du code de justice administrative.
9. Le respect de la liberté de manifestation, qui a le caractère d’une liberté fondamentale, doit être concilié avec le maintien de l’ordre public et il appartient à l’autorité investie du pouvoir de police, lorsqu’elle est saisie de la déclaration préalable prévue à l’article L. 211-1 du code de la sécurité intérieure, d’apprécier le risque de troubles à l’ordre public et, sous le contrôle du juge administratif, de prendre les mesures de nature à prévenir de telles troubles dont, le cas échéant, l’interdiction de la manifestation si une telle mesure est seule de nature à préserver l’ordre public.
10. Par arrêté du 29 décembre 2020, la préfète du Bas-Rhin a interdit la manifestation et son parcours déclarés le 24 décembre 2020 tel que ci-dessus mentionné ayant pour objet la défense des libertés démocratiques, la justice sociale et environnementale le 31 décembre 2020 de 15 heures à 18 heures. Cet arrêté a été pris au motif de violences urbaines survenues fin décembre 2019 à Strasbourg et dans sa périphérie au cours desquelles des artifices de divertissement ont été utilisées contre les forces de l’ordre et les sapeurs- pompiers, de l’éventuelle mobilisation des forces de l’ordre le jour de la sainte Sylvestre, du plan Vigipirate relevé au niveau « urgence Attentat » depuis le 29 octobre 2020, de l’état d’urgence sanitaire prorogé par la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 jusqu’au 16 février 2021, de la situation sanitaire dans la Région Grand Est et notamment dans le Bas-Rhin avec un taux d’incidence atteignant 150,2 sur 100 000 habitants entre le 19 et le 20 décembre 2020, une situation sanitaire dégradée dans l’Eurométropole avec un taux d’incidence de 160,6 pour 100 000 habitants la semaine du 20 décembre 2020, de ce que les personnes de plus de 65 ans sont particulièrement touchées, une circulation accrue du virus avec 450 patients hospitalisés dans le Bas-Rhin au 27 décembre 2020 dont 49 en réanimation, de la fréquentation élevée de clients dans le centre-ville de Strasbourg le 31 décembre 2020 pour les derniers achats du réveillon, du couvre-feu en vigueur à partir de 20 heures, de l’absence de mention dans la déclaration de manifestation des conditions propres à garantir les respect des mesures barrières telles que définies par l’article 1er du décret du 29 octobre 2020, du rassemblement important de personnes dans des conditions erratiques et d’excitation peu propices au respect des gestes barrières et de l’impossibilité pour la représentante de l’Etat d’autoriser la tenue du rassemblement ne permettant pas de faire respecter les mesures de prévention sanitaire qui s’appliquent dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire.
11. En l’espèce, la préfète du Bas-Rhin ne fait pas état de risques caractérisés de troubles à l’ordre public susceptibles de se produire à l’occasion d’une manifestation démocratique pour la défense des libertés de la justice sociale et environnementale devant rassembler environ 200 personnes selon la déclaration de l’organisateur. La circonstance que les effectifs de police soient susceptibles d’être mobilisés lors des fêtes de la saint Sylvestre en raison d’incidents déjà survenus dans des communes périphériques de Strasbourg en décembre 2019 avec usages d’artifices contre les services de police est sans rapport avec la manifestation projetée eu égard aux circonstances. S’il est fait état du relèvement au niveau
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« Urgence Attentat » du plan Vigipirate depuis le 29 octobre 2020 mobilisant les forces de l’ordre ces observations d’ordre organisationnelles ne permettent nullement d’établir que des troubles à l’ordre public pourraient résulter du déroulement de la manifestation ni que les services de police ne pourraient les prévenir.
12. Cependant la préfète du Bas-Rhin se prévaut également des impératifs de protection de la santé et de l’aggravation de la situation sanitaire dans le Grand Est ou le taux d’incidence atteint est de 160,6 pour 100 000 habitants en semaine 52 avec 150 personnes hospitalisées dont 49 en réanimation courant décembre 2020. Il n’est pas contesté par l’organisateur de la manifestation qu’à l’appui de la déclaration de la manifestation effectuée en préfecture, il n’a pas fait connaître les mesures qu’il comptait mettre en œuvre pour ralentir la propagation du virus et notamment les mesures d’hygiènes et de distanciation sociale, incluant la distanciation physique d’au moins un mètre entre deux personnes, dites barrières, définies au niveau national qui doivent être observées en tout lieu et en toute circonstances ainsi que le lui prescrit le II du 3° du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020. La circonstance que la préfète du Bas-Rhin a déjà rendu le port du masque obligatoire dans la grande Ile de Strasbourg par arrêté du 15 décembre 2020 ne saurait pallier suppléer aux carences de l’organisateur.
13. Dans l’actuelle période d’état d’urgence sanitaire, il appartient aux différentes autorités compétentes de prendre, en vue de sauvegarder la santé de la population, toutes dispositions de nature à prévenir ou à limiter les effets de l’épidémie. Ces mesures, qui peuvent limiter l’exercice des droits et libertés fondamentaux doivent, dans cette mesure, être nécessaires, adaptées et proportionnées à l’objectif de sauvegarde de la santé publique qu’elles poursuivent.
14. La liberté d’expression et de communication, garantie par la Constitution et par les articles 10 et 11 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et dont découle le droit d’expression collective des idées et des opinions, constitue une liberté fondamentale au sens de l’article L. 521-2 du code de justice administrative. Son exercice, notamment par la liberté de manifester ou de se réunir, est une condition de la démocratie et l’une des garanties du respect d’autres droits et libertés constituant également des libertés fondamentales au sens de cet article. Il doit cependant être concilié avec le respect de l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé et avec le maintien de l’ordre public.
15. L’article 3 du décret du 29 octobre 2020 n’interdit pas les manifestations sur la voie publique pendant la période d’urgence sanitaire mais fixe un cadre pour que l’organisation de ces manifestations puisse intervenir dans des conditions de nature à permettre le respect des « mesures barrières ». Eu égard aux derniers chiffres de l’Agence régionale de santé au 30 décembre 2020 communiquées au cours de l’audience par la représentante du préfet de Strasbourg mentionnant 472 personnes hospitalisées contre 450 le 28 décembre 2020 et en l’absence de toute justifications par le requérant des moyens qui seraient mis en œuvre au cours de la manifestation pour empêcher la propagation du Covid-19 à l’appui de sa déclaration de manifestation, la préfète du Bas-Rhin qui doit opérer la nécessaire conciliation entre le maintien de l’ordre public et la nécessaire protection de la santé de la population n’a pas porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté de manifester en prenant la décision en litige.
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16. Il résulte de tout ce qui précède que la requête ne peut qu’être rejetée, y compris les conclusions présentées en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
O RD O N N E :
Article 1er : La requête de M. Gourvitch est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Hervé Gourvitch et au ministre de l’intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.
Fait à Strasbourg, le 31 décembre 2020.
Le juge des référés,
J.-P. Vogel Braun
La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente ordonnance.
Pour expédition conforme, La greffière,
G. Trinité