Réponse de notre camarade Gabriel Ash au texte de Gideon Levy
merci beaucoup Alice et Béatrice Roux, pour la traduction

Gideon Levy almost gets it

The Israeli left wing “peace camp” never existed, so says now Gideon Levy:

Mars 07, 2010
Gideon Levy a presque compris

L’aile gauche israélienne du “camp de la paix” n’a jamais existé, déclare aujourd’hui Gideon Levy:

Tout d’abord, le problème est enraciné dans l’impossible adhésion de la gauche au sionisme dans son sens historique. Précisément dans le fait qu’il ne peut y avoir un état démocratique et juif d’un seul jet, il faut d’abord définir ce qui vient avant – il ne peut y avoir une aile gauche engagée dans l’ancien sionisme, qui a construit l’État, mais qui a fait son temps. En définitive cette aile gauche illusoire n’a jamais réussi à comprendre le problème palestinien – qui est né en 1948, non pas en 1967 – sans jamais comprendre qu’il ne peut pas être résolu en faisant abstraction de l’injustice causée dès le départ. Une aile gauche refusant d’oser affronter 1948 n’est pas une véritable aile gauche. (Ha’aretz

Un bon endroit pour commencer. Lévy, qui vit à Tel-Aviv et admet avoir voté pour son maire néo-libéral, qui aime les promoteurs, mais qui hait le peuple, est lui-même la pièce à conviction n° 1 dans l’histoire de l’inexistante gauche israélienne, justement parce que sa sympathie pour les souffrances des Palestiniens est sincère et sa haine de l’occupation, réelle et intransigeante, Levy ne comprend toujours pas que Ben Gourion, même un Ben Gourion mort et dépassé, ne peut jamais être le fondement d’un mouvement de gauche. Il ne suffit pas de constater qu’un “sionisme démodé” a “fait son temps”. La gauche ne peut exister sans comprendre que cette voie, la construction en Palestine d’un état capitaliste juif, bourgeois et européen, selon l’idée sioniste de la normalité, un état avec «un voleur juif et une putain juive», c’est-à-dire avec une structure de classe purement juive, cependant complète et “normale”, un état qui, ayant en effet fait son temps, importe maintenant des voleurs de Russie et traffique des femmes en provenance des Balkans, et qui est incarné aujourd’hui par le maire roublard, lié au monde des affaires, de Tel-Aviv, pour qui la rénovation urbaine signifie se débarrasser des résidents pauvres, n’a jamais été et ne pourrait jamais avoir été un projet de gauche.

C’est encore un fantasme de Levy que les habitants des banlieues aisées de la côte israélienne, ceux dont le vote hésite entre Meretz et Kadima, qui espèrent que leurs enfants fréquentent les écoles de commerce de Columbia et Harvard, et qu’ils trouvent un emploi de direction dans la banque ou la téléphonie quand ils – si ils – reviennent, et qu’ils vont, grâce à leur meilleure éducation, à leur culture européenne et leur expérience du monde, se rebeller contre la cruauté et le sadisme de l’occupation. C’est un espoir vain, car ces gens sont les mercenaires d’un ordre global néo-libéral, et sont motivés par la nécessité de maintenir leur statut social et leur identité, même dans le cas improbable où ils saisissent leur situation difficile, «d’être le rempart de l’Europe contre l’Asie, un avant-poste de la civilisation contre la barbarie» que Herzl a déjà imaginé pour eux. Aussi, peu importe combien ils haïssent l’occupation, ils détestent encore plus la proximité de l’Arabe. Des individus exceptionnels qui peuvent transcender leur classe existeront toujours, et ils – bénissons-les – continueront d’alimenter les rangs en diminution du radicalisme juif israélien, et de définir tragiquement son caractère désespéré. Un mouvement social ne peut cependant pas exister sans l’expression d’une expérience de vie, et il n’y a pas grand-chose dans l’expérience de la banlieue aisée de Tel-Aviv et Herzliya qui puisse être un incubateur de l’esprit de sacrifice dont Levy déplore l’absence. Les communautés des Juifs israéliens pauvres et marginalisées non plus, en particulier les orthodoxes et les Juifs Mizrahi, susceptibles de former la base sociale d’une gauche israélienne car étant moins opprimés que les Palestiniens et souvent employés ou autrement engagés dans cette oppression, leurs perspectives sont limitées par la nécessité pour eux d’être séparés des Palestiniens et de défendre leurs intérêts contre eux
Ainsi, le maintien d’allégeance à l’Etat «juif», qui exclut les Palestiniens dans la pensée tout en les incluant comme tout groupe opprimé dans la pratique, fait du génocide une condition préalable à une politique israélienne de gauche. C’est pourquoi les “socialistes” sionistes, avec leur souci de remplir les plus bas échelons sociaux avec les juifs, ont conduit à la purification ethnique de la Palestine. Il n’y a aucune raison d’échapper à ces faits fondamentaux de la colonisation, qui renvoient l’espoir d’un renouveau de la gauche sioniste en Israël effectivement à une envie de génocide. La condition préalable pour une vraie gauche en Israël est la dissolution de l’idée d’Israël à gauche, c’est-à-dire l’idée d’un État juif fondé sur une nation juive complète avec sa structure de classe à part, tant dans la réflexion et la pratique. Il n’y aura pas de gauche en Israël, sauf à travers un rejet absolu du Sionisme, non seulement comme un mouvement qui «suit son cours», mais comme un projet qui a toujours été sur la mauvaise voie. Les Juifs israéliens qui veulent être à gauche ont un seul choix. Se joindre à la lutte des Palestiniens ou à jamais se taire.