Les DNA rendent compte de manière plus précise des raisons de la polémique née à propos de la soirée inaugurale de Bibliothèque Idéale.

La Feuille de Chou en a parlé ici:

http://la-feuille-de-chou.fr/?p=11431

Strasbourg / Les Bibliothèques idéales

Surtout si vous n’êtes pas d’accord

Les Bibliothèques idéales de Strasbourg ouvrent leurs soirées thématiques par un débat univoque et passe-plats, entre écrivains et intellectuels de plateau télé.
Alain Finkielkraut, Renaud Camus et Élisabeth Lévy, parmi d’autres réunis à l’enseigne du site web Causeur.fr, en officiel débat d’ouverture : il n’est pas interdit de s’interroger sur ce que ce choix – car c’est un choix bien entendu, et il n’est dès lors pas insignifiant – projette naturellement sur l’esprit même des Bibliothèques idéales qu’organise à partir de demain lundi la Ville de Strasbourg. Et le débat est vif en effet, et public, au sein même de la municipalité, et de la majorité municipale, où chacun n’admet pas qu’il y ait là, comme on veut le faire croire, simple tolérance, respect du pluralisme et refus du politiquement correct.

Vaine querelle et vraie question

Car où diable situer le politiquement correct ? Qu’est-ce qui est politiquement correct, ou ne l’est pas, ou ne l’est plus ? Chacun est le politiquement correct d’un d’autre, chacun veut réserver à son camp la volupté d’être incorrect. Est-il donc politiquement correct de s’opposer à Alain Finkielkraut et Renaud Camus, ou est-il politiquement correct de les soutenir ? C’est vaine querelle.
Mais d’Alain Finkielkraut certains égarements idéologiques sont bien connus de tous. Et de Renaud Camus, le journal intime – le volume paru en 2000, La campagne de France – scandalisa bel et bien. Cet écrivain, jusqu’alors peu connu, donne dans le genre vieille France, réactionnaire, passéiste au point de retrouver les accents d’avant-guerre : il s’y étonnait, particulièrement, du nombre de Juifs qui s’expriment dans telle émission de radio. Ironie du sort, l’un d’entre eux, Antoine Spire pour ne pas le nommer, est ici mandaté par la ville de Strasbourg – c’est l’un des programmateurs des Bibliothèques idéales. Dans une chronique radiophonique, Élisabeth Levy, qui dirige le très orienté site web du Causeur et n’apparaît jamais qu’en campagne polémique permanente, tança Mathieu Cahn, adjoint au maire de Strasbourg, pour avoir critiqué « le fétichisme du drapeau ».
Chacun ses choix ? Tout cela, que sous couvert de littérature la Ville assume, n’est pas du meilleur effet – c’est un euphémisme -, en tête d’affiche d’une manifestation qui promettait de nous faire oublier, certes sans jamais convaincre à cet égard, qu’un jour Strasbourg se priva d’un exemplaire Carrefour européen des littératures et d’un Parlement international des écrivains présidé par Salman Rushdie. Autre idée de la littérature, autre vertu politique, autres valeurs.

Joël Isselé & Veneranda Paladino

Les Bibliothèques idéales, du 20 au 25 septembre. www.bibliothques-ideales.strasbourg.eu